Jump to content

Recommended Posts

IL faut le dire par des pages claire et en première pages ces choses

 

et pas laisser et rendre sans voix les citoyen d'un pays et presque les rendre responsable

de..

 

POURQUOI C'EST CACHER MONSIEUR JOFFRIN

 

 

 

 

 

 

 

VOLTAIRE TRAITE SUR LA

TOLÉRANCE

 

Traité sur la

Tolérance

 

 

Auteur: Voltaire

 

Texte: édition originale de 1763, (Wikisource, la biblio- thèque libre)

 

Photo de Une: Johann Rousselot, Signatures

 

Table des matières

 

 

▪ Couverture

 

▪ Traité sur la tolérance

 

▪ Table des matières

 

▪ Préface de Laurent Joffrin

 

▪ Chapitre I

 

▪ Chapitre II

 

▪ Chapitre III

 

▪ Chapitre IV

 

▪ Chapitre V

 

▪ Chapitre VI

 

▪ Chapitre VII

 

▪ Chapitre VIII

 

▪ Chapitre IX

 

▪ Chapitre X

 

▪ Chapitre XI

 

▪ Chapitre XII

 

▪ Chapitre XIII

 

▪ Chapitre XIV

 

 

▪ Chapitre XV

 

▪ Chapitre XVI

 

▪ Chapitre XVII

 

▪ Chapitre XVIII

 

▪ Chapitre XIX

 

▪ Chapitre XX

 

▪ Chapitre XXI

 

▪ Chapitre XXII

 

▪ Chapitre XXIII

 

▪ Chapitre XXIV

 

▪ Chapitre XXV

 

▪ Pour l'Histoire: le hors-série

 

Une brûlante actualité

 

 

PRÉFACE Voltaire aurait-il été Charlie? On laissera la question en suspens. Le génie du style et la limpidité des arguments effacent toutes les réserves. La langue est une arme. Voltaire la tourne contre l’idiotie du dogme, la stupidité des vérités révélées...

Par Laurent JOFFRIN

 

 

Quand on lui parle de l’affaire la première fois, Voltaire n’est guère tendre pour la famille Calas: «Nous ne valons pas grand-chose, mais les huguenots sont pires que nous, et de plus ils déclament contre la comédie». Un soir d’octobre 1761, au 16 rue des Filatiers à Toulouse, on a trouvé le fils Calas, Marc-Antoine, pendu à une poignée de porte au rez- de-chaussée de la maison familiale. Les Calas accusent un criminel inconnu venu de l’extérieur. Mais la porte qui donne sur la rue est fermée de l’intérieur. Très vite la rumeur publique donne une autre version. Au sein de ce foyer protestant, le jeune homme voulait se convertir au catholicisme ; pour l’en empêcher, la famille a décidé de le

 

 

tuer. C’est ce crime du fanatisme qui révulse Voltaire. Il est encore mal informé.

 

Au terme d’un procès injuste sur fond de haine envers les réformés, Jean Calas, le père, est condamné à mort. On lui broie les os, on le force à boire vingt cruches d’eau, on l’at- tache sur la roue et on lui brise les bras et les jambes avant de l’étrangler et de brûler son corps. Jean Calas n’avoue ri- en. Au milieu de souffrances indicibles, il proteste jusqu’au bout de son innocence et demande à Dieu de pardonner à ses juges.

 

Un peu plus tard, un ami éclaire Voltaire. Le procès est scandaleux, lui dit-il. Calas est innocent, son fils n’a pas été tué mais il s’est suicidé. Le meurtre collectif est une inven- tion populaire avalisée par une justice partiale, une fable née de l’intolérance. Marc-Antoine était mélancolique, il ne supportait pas l’avenir qui lui était destiné. Si la famille a in- voqué le crime d’un rôdeur, c’est pour éviter à leur fils le sort des suicidés, dont le corps était traîné face contre terre avant d’être jeté aux ordures. Ce mensonge initial a éveillé les soupçons. Les préjugés du peuple de Toulouse ont fait le reste. L’enquête est menée par un officier municipal pétri de préventions contre les huguenots. On fait appel à la délation publique en recourant à la procédure du monitoire, qui con- siste à lire dans les églises un texte appelant à témoignage, sous peine d’excommunication. Les accusations contre la fa- mille Calas ont afflué, toutes fondées sur des on-dit. Jean

 

 

Calas a été condamné sans preuves, sur la foi d’une rumeur et du fanatisme ambiant.

 

Intrigué par l’énigme policière, indigné par la barbarie de l’exécution, Voltaire reçoit l’un des fils Calas. Les accusa- tions ne tiennent pas, dit le jeune homme. Calas aimait tendrement Marc-Antoine. Un des frères s’est converti au catholicisme sans que le père en fasse un drame. Découv- rant le corps, la famille a poussé des cris de désespoir si forts que les voisins les ont entendus, ce qui ne cadre pas avec un assassinat collectif. Et pourquoi les Calas auraient- ils tué leur fils en présence d’un invité, devant la servante catholique qui risquait de les dénoncer, alors qu’ils avaient tout loisir d’organiser le meurtre à un moment plus propice

? Seul le suicide est logique.

 

Convaincu, Voltaire entre en campagne. Agé de 67 ans, il est alors au faîte de sa gloire. Dramaturge comblé, auteur d’in- nombrables écrits, âme du parti philosophique, il est aussi l’ami des rois, la coqueluche des salons, écrivain aussi ad- miré qu’il est redouté de l’Eglise, retiré à Ferney où il mène la vie d’un sage des Lumières, administrant son domaine et correspondant avec l’Europe entière. Révulsé par le crime judiciaire, voyant dans la condamnation inique l’illustration de ses idées sur le fanatisme religieux, il met tout en jeu, sa gloire, sa fortune et bientôt sa personne même pour obtenir la révision du jugement et la réhabilitation de Calas. Il écrit lettre sur lettre à ses amis de l’aristocratie et de la Cour,

 

 

publie des pamphlets, interpelle les autorités, réfute impitoyablement les accusateurs, ironise sur les arguments des dévots, procure des subsides à la famille Calas et reçoit chez lui la veuve du supplicié.

 

Son activité inlassable finit par avoir raison des pouvoirs. En 1765, ébranlé par les philippiques du seigneur de Ferney, voyant qu’une grande partie de l’opinion éclairée soutient la cause de la révision, Louis XV reçoit les Calas. Il réunit en- suite son conseil et décide de casser le jugement. Un deux- ième procès innocente Jean Calas ; le roi octroie une indem- nité importante à la famille.

 

L’écrivain a eu raison de l’Eglise, du parti dévot et de la justice. Un siècle avant Zola et la naissance des «intellec- tuels», Voltaire a fondé la figure bien française de l’écrivain engagé au nom de valeurs universelles contre l’iniquité des pouvoirs.

En 1763, en pleine bataille, il juge que le sort des Calas con- cerne en fait l’humanité tout entière. La famille martyrisée n’est pas seulement la protagoniste lamentable d’un fait divers judiciaire. Elle est la victime emblématique de l’in- tolérance religieuse, qui a ensanglanté le XVIe siècle, soutenu les tyrannies du XVIIe siècle et qui continue d’exer- cer au siècle des Lumières sa funeste influence.

 

Appelant à lui toutes les ressources de son style et de son érudition, Voltaire compose ce Traité sur la tolérance qui

 

 

prend encore aujourd’hui une résonance dramatique. C’est un texte de circonstance: on y trouve un récit de l’affaire Calas, des dialogues satiriques ou philosophiques, de longues digressions historiques, des plaidoyers pleins de feu et de bon sens pour le droit à la différence religieuse, dès lors qu’elle est maintenue dans la sphère privée. C’est un texte classique: face à tous les pouvoirs théocratiques, face à tous les fanatismes, il est un acide pour les préjugés, un réquisitoire contre les cagots, un bélier littéraire qui enfonce à grands coups les portes du dogmatisme religieux.

 

S’il obtient encore aujourd’hui un succès inattendu, c’est bi- en qu’il met en cause de nouveaux pouvoirs. Les dictatures catholiques étant rares désormais, l’islam politique, qui nie la modernité et change la religion en tyrannie, devient la cible contemporaine de la prose voltairienne. Un journaliste condamné à mille coups de fouet, une écolière coupable de vouloir apprendre et menacée par des tueurs, des otages dé- capités, des jeunes filles enlevées et mariées de force, sont les Calas d’aujourd’hui, immolés au nom d’un Dieu tyran- nique par des dévots sans humanité. Un tribunal sous l’em- prise du préjugé, une foule haineuse au nom de la foi, le re- fus de la Raison, la loi de Dieu en lieu et place de celle des hommes, des règlements de compte politiques sous couvert de piété, des châtiments cruels: la France de 1763 a bien des traits communs avec les théocraties contemporaines. Avec cette différence: Voltaire ne fut pas arrêté ni menacé de mort, ses plaidoyers furent malgré tout diffusés et le pouvoir

 

 

politique finit par se laisser convaincre de réparer l’injustice. La poussée de la modernité avait rendu la France du XVIIIe siècle plurielle et ambiguë, la monarchie souhaitait se réformer et la classe dirigeante était divisée entre traditionalistes et partisans des idées nouvelles. La Révolution couvait.

 

Qu’en est-il dans l’Arabie saoudite d’aujourd’hui? Sans par- ler des cruautés qui font le quotidien de l’Etat islamique. Ce que vivait la France de l’époque, nombre de nations musul- manes l’éprouvent, dans la lutte, dans la contradiction, qu’on songe à la Tunisie qui a évité le danger islamiste par le compromis, une solution que Voltaire aurait à coup sûr approuvée.

 

Les exégètes remarqueront que le Traité sur la tolérance n’est pas tout à fait adapté à la situation crée par le massacre de Charlie Hebdo et de l’Hyper Casher. Voltaire plaide pour la liberté de conscience plus que pour la liberté d’expression. Saisissant le cas de Farel, cet extrémiste calviniste qui attaque ses adversaires dans les rues de Genève, il lui reproche non de réprimer l’expression des autres mais directement leur foi. Il sous-entend ainsi que la conscience doit être libre, non sa manifestation publique, qui doit rester dans les limites de la bonne entente entre les religions. Restriction d’époque, à coup sûr, tant les cath- oliques de France cherchaient à régenter non seulement l’expression publique, mais aussi les idées conçues ou

 

 

approuvées dans le secret de la vie privée. Voltaire veut que chacun soit libre de penser ce qu’il veut. Il ne va pas jusqu’à approuver les paroles provocantes ou les atteintes directes à tel ou tel culte. Voltaire est un homme de sagesse, de mod- ération, on dirait aujourd’hui qu’il est un pragmatique, un réformiste de la laïcité.

Mais justement: dans les pays de théocratie, la liberté de conscience serait déjà un énorme progrès. Les minorités re- ligieuses en pays d’islam radical ou fondamentaliste sont persécutées pour ce qu’elles sont avant de l’être pour ce qu’elles font. On cherche à les éradiquer, pas seulement à les confiner dans l’espace privé. La tolérance selon Voltaire leur ferait faire un pas en avant considérable; le traité reste d’une brûlante actualité, même s’il porte la marque du XVIIIe siècle et de l’emprise minutieuse exercée sur la vie sociale par les dévots catholiques, qu’il fallait faire sortir des maisons avant de proclamer la liberté des places publiques.

 

Voltaire aurait-il été Charlie? On laissera la question en sus- pens. Le génie du style et la limpidité des arguments effa- cent toutes les réserves. La langue est une arme. Voltaire la tourne contre l’idiotie du dogme, la stupidité des vérités révélées, la tyrannie à front bas, la bêtise des fanatiques. Là est l’essentiel. Là réside la force éternelle de cette prose lu- mineuse, dont l’éclat fait toujours fuir les cancrelats de l’obscurantisme.

 

Chapitre I

Link to post
Share on other sites

2

Chapitre II

 

 

Conséquences du supplice de Jean Calas.

 

 

Si les Pénitents blancs furent la cause du supplice d’un inno- cent, de la ruine totale d’une famille, de sa dispersion, & de l’opprobre qui ne devrait être attaché qu’à l’injustice, mais qui l’est au supplice ; si cette précipitation des Pénitents blancs à célébrer comme un saint, celui qu’on aurait dû traîner sur la claye, a fait rouer un père de famille vertueux ; ce malheur doit sans doute les rendre pénitents en effet pour le reste de leur vie : eux & les Juges doivent pleurer, mais non pas avec un long habit blanc & un masque sur le visage, qui cacheraient leurs larmes.

 

On respecte toutes les Confrairies ; elles sont édifiantes : mais quelque grand bien qu’elles puissent faire à l’État, égale-t-il ce mal affreux qu’elles ont causé ? Elles semblent instituées par le zèle qui anime en Languedoc les Cath- oliques contre ceux que nous nommons Huguenots. On dirait qu’on a fait vœu de haïr ses frères ; car nous avons as- sez de religion pour haïr & persécuter, nous n’en avons pas assez pour aimer & pour secourir. Et que serait-ce, si ces Confrairies étaient gouvernées par des enthousiastes, comme l’ont été autrefois quelques Congrégations des

 

 

Artisans & des Messieurs, chez lesquels on réduisait en art & en système l’habitude d’avoir des visions, comme le dit un de nos plus éloquents & savants Magistrats ? Que serait-ce si on établissait dans les Confrairies ces chambres obscures, appelées chambres de méditation, où l’on faisait peindre des diables armés de cornes & de griffes, des gouffres de flammes, des croix & des poignards, avec le saint nom de Jésus au-dessus du tableau ? Quel spectacle pour des yeux déjà fascinés, & pour des imaginations aussi enflammées que soumises à leurs Directeurs !

 

II y a eu des temps, on ne le sait que trop, où des Confrairies ont été dangereuses. Les Frérots, les Flagellants ont causé des troubles. La Ligue commença par de telles associations. Pourquoi se distinguer ainsi des autres Citoyens ? s’en croyait-on plus parfait ? cela même est une insulte au reste de la Nation. Voulait-on que tous les Chrétiens entrassent dans la Confrairie ? Ce ferait un beau spectacle que l’Europe en capuchon & en masque, avec deux petits trous ronds au- devant des yeux ! Pense-t-on de bonne foi que Dieu préfère cet accoutrement à un justaucorps ? Il y a bien plus ; cet habit est un uniforme de Controversistes, qui avertit les Ad- versaires de se mettre sous les armes ; il peut exciter une es- pèce de guerre civile dans les esprits ; elle finirait peut-être par de funestes excès, si le Roi & ses Ministres n’étaient aus- si sages que les fanatiques font insensés.

 

 

On sait assez ce qu’il en a coûté depuis que les Chrétiens dis- putent sur le dogme ; le sang a coulé, soit sur les échafauds, soit dans les batailles, dès le quatrième siècle jusqu’à nos jours. Bornons-nous ici aux guerres & aux horreurs que les querelles de la réforme ont excitées, & voyons quelle en a été la source en France. Peut-être un tableau raccourci & fidèle de tant de calamités ouvrira les yeux de quelques personnes peu instruites, & touchera des cœurs bien faits.

 

Chapitre III

 

 

Idée de la Réforme du seizième siècle.

 

 

Lorsqu’à la renaissance des Lettres, les esprits com- mencèrent à s’éclairer, on se plaignit généralement des abus; tout le monde avoue que cette plainte était légitime.

 

Le Pape Alexandre VI avait acheté publiquement la Tiare, & ses cinq bâtards en partageaient les avantages. son fils, le Cardinal Duc de Borgia, fit périr, de concert avec le Pape son père, les Vitelli, les Urbino, les Gravina, les Oliveretto,

& cent autres seigneurs, pour ravir leurs domaines. Jules II, animé du même esprit, excommunia Louis XII, donna son Royaume au premier occupant, & lui-même le casque en tête, & la cuirasse sur le dos, mit à feu & à sang une partie de l’Italie. Léon X, pour payer ses plaisirs, trafiqua des Indul- gences, comme on vend des denrées dans un marché public. Ceux qui s’élevèrent contre tant de brigandages, n’avaient du moins aucun tort dans la morale ; voyons s’ils en avaient contre nous dans la politique.

 

Ils disaient que Jésus-Christ n’ayant jamais exigé d’annates, ni de réserves, ni vendu des dispenses pour ce monde, & des indulgences pour l’autre, on pouvait se dispenser de payer à

 

 

un Prince étranger le prix de toutes ces choses. Quand les annates, les procès en Cour de Rome, & les dispenses qui subsistent encore aujourd’hui, ne nous coûteraient que cinq cents mille francs par an, il est clair que nous avons payé depuis François I, en deux cents cinquante années, cent vingt millions ; & en évaluant les différents prix du marc d’argent, cette somme en compose une d’environ deux cents cinquante millions d’aujourd’hui. On peut donc convenir sans blasphème, que les Hérétiques, en proposant l’aboli- tion de ces Impôts singuliers, dont la postérité s’étonnera, ne faisaient pas en cela un grand mal au Royaume, & qu’ils étaient plutôt bons calculateurs que mauvais sujets. Ajoutons qu’ils étaient les seuls qui sussent la Langue Grecque, & qui connussent l’antiquité. Ne dissimulons point que, malgré leurs erreurs, nous leur devons le développe- ment de l’esprit humain, longtemps enseveli dans la plus épaisse barbarie.

 

Mais comme ils niaient le Purgatoire, dont on ne doit pas douter, & qui d’ailleurs rapportait beaucoup aux Moines ; comme ils ne révéraient pas des reliques qu’on doit révérer, mais qui rapportaient encore davantage; enfin, comme ils attaquaient des dogmes très-respectés, on ne leur répondit d’abord qu’en les faisant brûler. Le Roi qui les protégeait, & les soudoyait en Allemagne, marcha dans Paris à la tête d’une Procession, après laquelle on exécuta plusieurs de ces malheureux ; & voici quelle fut cette exécution. On les sus- pendait au bout d’une longue poutre qui jouait en bascule

 

 

sur un arbre debout ; un grand feu était allumé sous eux, on les y plongeait, & on les relevait alternativement ; ils éprouvaient les tourments & la mort par degrés, jusqu’à ce qu’ils expirassent par le plus long & le plus affreux supplice que jamais ait inventé la barbarie.Peu de temps avant la mort de François I, quelques Membres du Parlement de Provence, animés par des Ecclésiastiques contre les Habit- ants de Mérindol & de Cabriere, demandèrent au Roi des Troupes pour appuyer l’exécution de dix-neuf personnes de ce Pays, condamnées par eux ; ils en firent égorger six mille, sans pardonner ni au sexe, ni à la vieillesse, ni à l’enfance ; ils réduisirent trente Bourgs en cendres. Ces Peuples, jusqu’alors inconnus, avaient tort sans doute d’être nés Vau- dois, c’était leur seule iniquité. Ils étaient établis depuis trois cents ans dans des déserts, & sur des montagnes qu’ils avaient rendu fertiles par un travail incroyable. Leur vie pastorale & tranquille retraçait l’innocence attribuée aux premiers âges du monde. Les Villes voisines n’étaient con- nues d’eux que par le trafic des fruits qu’ils allaient vendre ; ils ignoraient les procès & la guerre ; ils ne se défendirent pas ; on les égorgea comme des animaux fugitifs qu’on tue dans une enceinte.

 

Après la mort de François I, Prince plus connu cependant par ses galanteries & par ses malheurs que par ses cruautés, le supplice de mille Hérétiques, surtout celui du Conseiller au Parlement Dubourg, & enfin le massacre de Vassy, armèrent les persécutés, dont la secte s’était multipliée à la

 

 

lueur des buchers, & sous le fer des bourreaux ; la rage suc- céda à la patience ; ils imitèrent les cruautés de leurs en- nemis : neuf guerres civiles remplirent la France de carnage ; une paix plus funeste que la guerre, produisit la st. Barthelemi, dont il n’y avait aucun exemple dans les annales des crimes.

 

La Ligue assassina Henri III & Henri IV, par les mains d’un Frère Jacobin, & d’un monstre qui avait été Frère Feuillant. Il y a des gens qui prétendent que l’humanité, l’indulgence,

& la liberté de conscience, sont des choses horribles ; mais en bonne foi, auraient-elles produit des calamités comparables?

 

Chapitre IV

 

 

Si la Tolérance est dangereuse et chez quels Peuples elle est pratiquée.

 

 

Quelques-uns ont dit que si l’on usait d’une indulgence pa- ternelle envers nos frères errants, qui prient Dieu en mauvais Français, ce serait leur mettre les armes à la main, qu’on verrait de nouvelles batailles de Jarnac, de Moncon- tour, de Coutras, de Dreux, de st. Denis, &c. C’est ce que j’ig- nore, parce que je ne suis pas Prophète ; mais il me semble que ce n’est pas raisonner conséquemment, que de dire :

«Ces hommes se sont soulevés quand je leur ai fait du mal, donc ils se soulèveront quand je leur ferai du bien.»

 

J’oserais prendre la liberté d’inviter ceux qui sont à la tête du Gouvernement, & ceux qui font destinés aux grandes places, à vouloir bien examiner mûrement, si l’on doit craindre en effet que la douceur produise les mêmes ré- voltes que la cruauté a fait naître ; si ce qui est arrivé dans certaines circonstances, doit arriver dans d’autres; si les temps, l’opinion, les mœurs sont toujours les mêmes?

 

Les Huguenots, sans doute, ont été enivrés de fanatisme, & souillés de sang comme nous : mais la génération présente

 

 

est-elle aussi barbare que leurs pères ? le temps, la raison qui fait tant de progrès, les bons Livres, la douceur de la so- ciété, n’ont-ils point pénétré chez ceux qui conduisent l’es- prit de ces Peuples? & ne nous apercevons-nous pas que pr- esque toute l’Europe a changé de face depuis environ cin- quante années?

Link to post
Share on other sites

Le Gouvernement s’est fortifié par-tout, tandis que les mœurs se sont adoucies. La Police générale, soutenue d’armées nombreuses toujours existantes, ne permet pas d’ailleurs de craindre le retour de ces temps anarchiques, où des Paysans Calvinistes combattaient des Paysans Cath- oliques, enrégimentés à la hâte entre les semailles & les moissons.

 

D’autres temps, d’autres soins. Il serait absurde de décimer aujourd’hui la sorbonne, parce qu’elle présenta requête autrefois pour faire brûler la Pucelle d’Orléans ; parce qu’elle déclara Henri III déchu du droit de régner, qu’elle l’excommunia, qu’elle prescrivit le grand Henri IV. On ne recherchera pas, sans doute, les autres Corps du Royaume qui commirent les mêmes excès dans ces temps de frénésie ; cela serait non-seulement injuste, mais il y aurait autant de folie qu’à purger tous les Habitants de Marseille parce qu’ils ont eu la peste en 1720.

 

Irons-nous saccager Rome, comme firent les troupes de Charles-quint, parce que sixte-quint, en 1585, accorda neuf ans d’indulgence à tous les Français qui prendraient les

 

 

armes contre leur souverain ? & n’est-ce pas assez d’em- pêcher Rome de se porter jamais à des excès semblables ?

 

La fureur qu’inspirent l’esprit dogmatique & l’abus de la Re- ligion Chrétienne mal entendue, a répandu autant de sang, a produit autant de désastres en Allemagne, en Angleterre, & même en Hollande, qu’en France : cependant aujourd’hui la différence des Religions ne cause aucun trouble dans ces États ; le Juif, le Catholique, le Grec, le Luthérien, le Calvin- iste, l’Anabatiste, le socinien, le Memnoniste, le Morave & tant d’autres, vivent en frères dans ces Contrées, & con- tribuent également au bien de la société.

 

On ne craint plus en Hollande que les disputes d’un Gomar sur la prédestination fassent trancher la tête au grand Pen- sionnaire. On ne craint plus à Londres que les querelles des Presbytériens & des Episcopaux pour une Lithurgie & pour un surplis, répandent le sang d’un Roi sur un échafaud. L’Ir- lande peuplée & enrichie, ne verra plus ses Citoyens Cath- oliques sacrifier à Dieu pendant deux mois ses Citoyens Protestants, les enterrer vivants, suspendre les mères à des gibets, attacher les filles au cou de leurs mères, & les voir ex- pirer ensemble; ouvrir le ventre des femmes enceintes, en tirer les enfants à demi-formés, & les donner à manger aux porcs & aux chiens ; mettre un poignard dans la main de leurs prisonniers garrotés, & conduire leurs bras dans le sein de leurs femmes, de leurs pères, de leurs mères, de leurs filles, s’imaginant en faire mutuellement des

 

 

parricides, & les damner tous en les exterminant tous. C’est ce que rapporte Rapin-Toiras, Officier en Irlande, presque contemporain ; c’est ce que rapportent toutes les Annales, toutes les Histoires d’Angleterre, & ce qui sans doute ne sera jamais imité. La Philosophie, la seule Philosophie, cette sœur de la Religion, a désarmé des mains que la superstition avait si longtemps ensanglantées; & l’esprit humain, au ré- veil de son ivresse, s’est étonné des excès où l’avait emporté le fanatisme.

 

Nous-mêmes, nous avons en France une Province opulente, où le Luthéranisme l’emporte sur le Catholicisme. L’Université d’Alsace est entre les mains des Luthériens : ils occupent une partie des Charges municipales ; jamais la moindre querelle religieuse n’a dérangé le repos de cette Province depuis qu’elle appartient à nos Rois. Pourquoi? c’est qu’on n’y a persécuté personne. Ne cherchez à point gêner les cœurs, & tous les cœurs seront à vous.

 

Je ne dis pas que tous ceux qui ne sont point de la Religion du Prince doivent partager les places & les honneurs de ceux qui sont de la Religion dominante. En Angleterre, les Cath- oliques, regardés comme attachés au Prétendant, ne peuvent parvenir aux emplois ; ils payent même double taxe ; mais ils jouissent d’ailleurs de tous les droits des Citoyens.

 

On a soupçonné quelques Évêques Français de penser qu’il n’est ni de leur honneur, ni de leur intérêt, d’avoir dans leur

 

 

Diocèse des Calvinistes ; & que c’est là le plus grand obstacle à la Tolérance : je ne le puis croire. Le Corps des Évêques en France est composé de gens de qualité, qui pensent & qui agissent avec une noblesse digne de leur naissance ; ils sont charitables & généreux, c’est une justice qu’on doit leur rendre : ils doivent penser que certainement leurs Diocé- sains fugitifs ne se convertiront pas dans les Pays étrangers,

& que, retournés auprès de leurs Pasteurs, ils pourraient être éclairés par leurs instructions, & touchés par leurs ex- emples ; il y aurait de l’honneur à les convertir : le temporel n’y perdrait pas ; & plus il y aurait de Citoyens, plus les terres des Prélats rapporteraient.

 

Un Évêque de Varmie, en Pologne, avait un Anabatiste pour Fermier, & un socinien pour Receveur ; on lui proposa de chasser & de poursuivre l’un parce qu’il ne croyait pas la consubstantialité, & l’autre parce qu’il ne baptisait son fils qu’à quinze ans : il répondit qu’ils seraient éternellement damnés dans l’autre monde, mais que dans ce monde-ci ils lui étaient très-nécessaires.

 

sortons de notre petite sphère, & examinons le reste de notre globe. Le grand seigneur gouverne en paix vingt Peuples de différentes Religions; deux cents mille Grecs vivent avec sécurité dans Constantinople ; le Muphti même nomme & présente à l’Empereur le Patriarche Grec ; on y souffre un Patriarche Latin. Le sultan nomme des Évêques Latins pour quelques Isles de la Grèce, & voici la formule

 

 

dont il se sert ; Je lui commande d’aller résider Évêque dans l’Isle de Chio, selon leur ancienne coutume & leurs vaines cérémonies. Cet Empire est rempli de Jacobites, de Nestoriens, de Monotélites ; il y a des Cophtes, des Chré- tiens de st. Jean, des Juifs, des Guèbres, des Banians. Les Annales Turques ne font mention d’aucune révolte excitée par aucune de ces Religions.

 

Allez dans l’Inde, dans la Perse, dans la Tartarie ; vous y ver- rez la même tolérance & la même tranquillité. Pierre-le- Grand a favorisé tous les Cultes dans son vaste Empire : le Commerce & l’Agriculture y ont gagné, & le Corps politique n’en a jamais souffert.

 

Le Gouvernement de la Chine n’a jamais adopté, depuis plus de quatre mille ans qu’il est connu, que le Culte des Noachides, l’adoration simple d’un seul Dieu : cependant il tolère les superstitions de Fo, & une multitude de Bonzes qui serait dangereuse, si la sagesse des Tribunaux ne les avait pas toujours contenus.

 

Il est vrai que le grand Empereur Yont-Chin, le plus sage & le plus magnanime peut-être qu’ait eu la Chine, a chassé les Jésuites ; mais ce n’était pas parce qu’il était intolérant, c’était au contraire parce que les Jésuites l’étaient. Ils rapportent eux-mêmes dans leurs Lettres curieuses, les pa- roles que leur dit ce bon Prince : Je sais que votre Religion est intolérante ; je sais ce que vous avez fait aux Manilles & au Japon ; vous avez trompé mon Père, n’espérez pas me

 

 

tromper de même. Qu’on lise tout le discours qu’il daigna leur tenir, on le trouvera le plus sage & le plus clément des hommes. Pouvait-il en effet retenir des Physiciens d’Europe, qui, sous prétexte de montrer des thermomètres & des éoli- piles à la Cour, avaient soulevé déjà un Prince du sang ? & qu’aurait dit cet Empereur, s’il avait lu nos Histoires, s’il avait connu nos temps de la ligue, & de la conspiration des poudres ?

 

C’en était assez pour lui d’être informé des querelles indé- centes des Jésuites, des Dominicains, des Capucins, des Prêtres séculiers envoyés du bout du monde dans ses États : ils venaient prêcher la vérité, & ils s’anathématisaient les uns les autres. L’Empereur ne fit donc que renvoyer des per- turbateurs étrangers : mais avec quelle bonté les renvoya-t- il ? quels soins paternels n’eut-il pas d’eux pour leur voyage,

& pour empêcher qu’on ne les insultât sur la route ? Leur bannissement même fut un exemple de tolérance & d’humanité.

 

Les Japonais étaient les plus tolérants de tous les hommes, douze Religions paisibles étaient établies dans leur Empire : les Jésuites vinrent faire la treizième ; mais bientôt n’en voulant pas souffrir d’autre, on fait ce qui en résulta ; une guerre civile, non moins affreuse que celles de la Ligue, désola ce Pays. La Religion Chrétienne fut noyée enfin dans des flots de sang. Les Japonais fermèrent leur Empire au reste du monde, & ne nous regardèrent que comme des

 

 

bêtes farouches, semblables à celles dont les Anglais ont purgé leur Isle. C’est en vain que le Ministre Colbert, sent- ant le besoin que nous avions des Japonais, qui n’ont nul besoin de nous, tenta d’établir un commerce avec leur Em- pire ; il les trouva inflexibles.

 

Ainsi donc notre Continent entier nous prouve qu’il ne faut ni annoncer ni exercer l’intolérance.

 

Jettez les yeux sur l’autre hémisphère, voyez la Caroline, dont le sage Loke fut le Législateur ; tout père de famille qui a sept personnes seulement dans sa maison, peut y établir une Religion à son choix, pourvu que ces sept personnes y concourent avec lui. Cette liberté n’a fait naître aucun désordre. Dieu nous préserve de citer cet exemple pour en- gager chaque maison à se faire un culte particulier : on ne le rapporte que pour faire voir que l’excès le plus grand où puisse aller la tolérance, n’a pas été suivi de la plus légère dissension.

 

Mais que dirons-nous de ces pacifiques Primitifs, que l’on a nommés Quakres par dérision, & qui, avec des usages peut- être ridicules, ont été si vertueux, & ont enseigné inutile- ment la paix au reste des hommes ? Ils sont en Pensylvanie au nombre de cent mille ; la discorde, la controverse sont ig- norées dans l’heureuse Patrie qu’ils se sont faite: & le nom seul de leur Ville de Philadelphie, qui leur rappelle à tout moment que les hommes sont frères, est l’exemple & la

Link to post
Share on other sites

Chapitre V

 

 

Comment la Tolérance peut être admise.

 

 

J’ose supposer qu’un Ministre éclairé & magnanime, un Prélat humain & sage, un Prince qui sait que son intérêt consiste dans le grand nombre de ses sujets, & sa gloire dans leur bonheur, daigne jeter les yeux sur cet Écrit in- forme & défectueux ; il y supplée par ses propres lumières ; il se dit à lui-même : Que risquerai-je à voir la terre cultivée

& ornée par plus de mains laborieuses, les tributs aug- mentés, l’État plus florissant ?

 

L’Allemagne serait un désert couvert des ossements des Catholiques, Évangéliques, Réformés, Anabaptistes, égorgés les uns par les autres, si la paix de Westphalie n’avait pas procuré enfin la liberté de conscience.

 

Nous avons des Juifs à Bordeaux, à Metz, en Alsace ; nous avons des Luthériens, des Molinistes, des Jansénistes ; ne pouvons-nous pas souffrir & contenir des Calvinistes à peu près aux mêmes conditions que les Catholiques sont tolérés à Londres ? Plus il y a de sectes, moins chacune est dangereuse ; la multiplicité les affaiblit ; toutes sont réprimées par de justes Lois, qui défendent les assemblées

 

 

tumultueuses, les injures, les séditions, & qui sont toujours en vigueur par la force coactive.

 

Nous savons que plusieurs Chefs de famille, qui ont élevé de grandes fortunes dans les Pays étrangers, sont prêts à re- tourner dans leur Patrie ; ils ne demandent que la protec- tion de la Loi naturelle, la validité de leurs mariages, la cer- titude de l’état de leurs enfants, le droit d’hériter de leurs pères, la franchise de leurs personnes ; point de Temples publics, point de droit aux Charges municipales, aux dig- nités : les Catholiques n’en ont ni à Londres, ni en plusieurs autres Pays. Il ne s’agit plus de donner des privilèges im- menses, des places de sûreté à une faction ; mais de laisser vivre un Peuple paisible, d’adoucir des Édits, autrefois peut- être nécessaires, & qui ne le sont plus : ce n’est pas à nous d’indiquer au Ministère ce qu’il peut faire; il suffit de l’im- plorer pour des infortunés.

 

Que de moyens de les rendre utiles, & d’empêcher qu’ils ne soient jamais dangereux ! La prudence du Ministère & du Conseil, appuyée de la force, trouvera bien aisément ces moyens, que tant d’autres Nations employent si heureusement.

 

Il y a des fanatiques encore dans la populace Calviniste ; mais il est constant qu’il y en a davantage dans la populace Convulsionnaire. La lie des insensés de st. Médard est comptée pour rien dans la Nation, celle des Prophètes Calvinistes est anéantie. Le grand moyen de diminuer le

 

 

nombre des Maniaques, s’il en reste, est d’abandonner cette maladie de l’esprit au régime de la raison, qui éclaire lente- ment, mais infailliblement les hommes. Cette raison est douce, elle est humaine, elle inspire l’indulgence, elle étouffe la discorde, elle affermit la vertu, elle rend aimable l’obéissance aux Loix, plus encore que la force ne les main- tient. Et comptera-t-on pour rien le ridicule attaché au- jourd’hui à l’enthousiasme par tous les honnêtes gens ? Ce ridicule est une puissante barrière contre les extravagances de tous les sectaires. Les temps passés sont comme s’ils n’avaient jamais été. Il faut toujours partir du point où l’on est, & de celui où les Nations sont parvenues.

 

Il a été un temps où l’on se crut obligé de rendre des Arrêts contre ceux qui enseignaient une Doctrine contraire aux Cathégories d’Aristote, à l’horreur du vide, aux quiddités, & à l’universel de la part de la chose. Nous avons en Europe plus de cent volumes de Jurisprudence sur la sorcellerie, & sur la manière de distinguer les faux sorciers des véritables. L’excommunication des sauterelles, & des infectes nuisibles aux moissons, a été très en usage, & subsiste encore dans plusieurs Rituels ; l’usage est passé, on laisse en paix Aris- tote, les sorciers & les sauterelles. Les exemples de ces graves démences, autrefois si importantes, sont innom- brables : il en revient d’autres de temps en temps ; mais quand elles ont fait leur effet, quand on en est rassasié, elles s’anéantissent. si quelqu’un s’avisait aujourd’hui d’être Car- pocratien, ou Eutichéen, ou Monothélite, Monophisite,

 

 

Nestorien, Manichéen, &c. qu’arriverait-il? On en rirait comme d’un homme habillé à l’antique avec une fraise & un pourpoint.

 

La Nation commençait à entr’ouvrir les yeux, lorsque les Jé- suites Le Tellier & Doucin fabriquèrent la Bulle Unigenitus, qu’ils envoyèrent à Rome ; ils crurent être encore dans ces temps d’ignorance, où les Peuples adoptaient sans examen les Assertions les plus absurdes. Ils osèrent proscrire cette proposition, qui est d’une vérité universelle dans tous les cas

& dans tous les temps ; La crainte d’une excommunication injuste ne doit point empêcher de faire son devoir : c’était proscrire la raison, les libertés de l’Église Gallicane, & le fondement de la morale ; c’était dire aux hommes, Dieu vous ordonne de ne jamais faire votre devoir, dès que vous craindrez l’injustice. On n’a jamais heurté le sens commun plus effrontément ; les Consulteurs de Rome n’y prirent pas garde. On persuada à la Cour de Rome que cette Bulle était nécessaire, & que la Nation la désirait ; elle fut signée, scellée & envoyée, on en fait les suites : certainement si on les avait prévues, on aurait mitigé la Bulle. Les querelles ont été vives, la prudence & la bonté du Roi les a enfin apaisées.

 

Il en est de même dans une grande partie des points qui di- visent les Protestants & nous ; il y en a quelques-uns qui ne sont d’aucune conséquence, il y en a d’autres plus graves, mais sur lesquels la fureur de la dispute est tellement

 

 

amortie, que les Protestants eux-mêmes ne prêchent au- jourd’hui la controverse en aucune de leurs Églises.

 

C’est donc ce temps de dégoût, de satiété, ou plutôt de rais- on, qu’on peut saisir comme une époque & un gage de la tranquillité publique. La controverse est une maladie épidémique qui est sur sa fin, & cette peste, dont on est guéri, ne demande plus qu’un régime doux. Enfin l’intérêt de l’État est que des fils expatriés reviennent avec modestie dans la maison de leur père ; l’humanité le demande, la rais- on le conseille, & la politique ne peut s’en effrayer.

Link to post
Share on other sites

Chapitre V

 

 

Comment la Tolérance peut être admise.

 

 

J’ose supposer qu’un Ministre éclairé & magnanime, un Prélat humain & sage, un Prince qui sait que son intérêt consiste dans le grand nombre de ses sujets, & sa gloire dans leur bonheur, daigne jeter les yeux sur cet Écrit in- forme & défectueux ; il y supplée par ses propres lumières ; il se dit à lui-même : Que risquerai-je à voir la terre cultivée

& ornée par plus de mains laborieuses, les tributs aug- mentés, l’État plus florissant ?

 

L’Allemagne serait un désert couvert des ossements des Catholiques, Évangéliques, Réformés, Anabaptistes, égorgés les uns par les autres, si la paix de Westphalie n’avait pas procuré enfin la liberté de conscience.

 

Nous avons des Juifs à Bordeaux, à Metz, en Alsace ; nous avons des Luthériens, des Molinistes, des Jansénistes ; ne pouvons-nous pas souffrir & contenir des Calvinistes à peu près aux mêmes conditions que les Catholiques sont tolérés à Londres ? Plus il y a de sectes, moins chacune est dangereuse ; la multiplicité les affaiblit ; toutes sont réprimées par de justes Lois, qui défendent les assemblées

 

 

tumultueuses, les injures, les séditions, & qui sont toujours en vigueur par la force coactive.

 

Nous savons que plusieurs Chefs de famille, qui ont élevé de grandes fortunes dans les Pays étrangers, sont prêts à re- tourner dans leur Patrie ; ils ne demandent que la protec- tion de la Loi naturelle, la validité de leurs mariages, la cer- titude de l’état de leurs enfants, le droit d’hériter de leurs pères, la franchise de leurs personnes ; point de Temples publics, point de droit aux Charges municipales, aux dig- nités : les Catholiques n’en ont ni à Londres, ni en plusieurs autres Pays. Il ne s’agit plus de donner des privilèges im- menses, des places de sûreté à une faction ; mais de laisser vivre un Peuple paisible, d’adoucir des Édits, autrefois peut- être nécessaires, & qui ne le sont plus : ce n’est pas à nous d’indiquer au Ministère ce qu’il peut faire; il suffit de l’im- plorer pour des infortunés.

 

Que de moyens de les rendre utiles, & d’empêcher qu’ils ne soient jamais dangereux ! La prudence du Ministère & du Conseil, appuyée de la force, trouvera bien aisément ces moyens, que tant d’autres Nations employent si heureusement.

 

Il y a des fanatiques encore dans la populace Calviniste ; mais il est constant qu’il y en a davantage dans la populace Convulsionnaire. La lie des insensés de st. Médard est comptée pour rien dans la Nation, celle des Prophètes Calvinistes est anéantie. Le grand moyen de diminuer le

 

 

nombre des Maniaques, s’il en reste, est d’abandonner cette maladie de l’esprit au régime de la raison, qui éclaire lente- ment, mais infailliblement les hommes. Cette raison est douce, elle est humaine, elle inspire l’indulgence, elle étouffe la discorde, elle affermit la vertu, elle rend aimable l’obéissance aux Loix, plus encore que la force ne les main- tient. Et comptera-t-on pour rien le ridicule attaché au- jourd’hui à l’enthousiasme par tous les honnêtes gens ? Ce ridicule est une puissante barrière contre les extravagances de tous les sectaires. Les temps passés sont comme s’ils n’avaient jamais été. Il faut toujours partir du point où l’on est, & de celui où les Nations sont parvenues.

 

Il a été un temps où l’on se crut obligé de rendre des Arrêts contre ceux qui enseignaient une Doctrine contraire aux Cathégories d’Aristote, à l’horreur du vide, aux quiddités, & à l’universel de la part de la chose. Nous avons en Europe plus de cent volumes de Jurisprudence sur la sorcellerie, & sur la manière de distinguer les faux sorciers des véritables. L’excommunication des sauterelles, & des infectes nuisibles aux moissons, a été très en usage, & subsiste encore dans plusieurs Rituels ; l’usage est passé, on laisse en paix Aris- tote, les sorciers & les sauterelles. Les exemples de ces graves démences, autrefois si importantes, sont innom- brables : il en revient d’autres de temps en temps ; mais quand elles ont fait leur effet, quand on en est rassasié, elles s’anéantissent. si quelqu’un s’avisait aujourd’hui d’être Car- pocratien, ou Eutichéen, ou Monothélite, Monophisite,

 

 

Nestorien, Manichéen, &c. qu’arriverait-il? On en rirait comme d’un homme habillé à l’antique avec une fraise & un pourpoint.

 

La Nation commençait à entr’ouvrir les yeux, lorsque les Jé- suites Le Tellier & Doucin fabriquèrent la Bulle Unigenitus, qu’ils envoyèrent à Rome ; ils crurent être encore dans ces temps d’ignorance, où les Peuples adoptaient sans examen les Assertions les plus absurdes. Ils osèrent proscrire cette proposition, qui est d’une vérité universelle dans tous les cas

& dans tous les temps ; La crainte d’une excommunication injuste ne doit point empêcher de faire son devoir : c’était proscrire la raison, les libertés de l’Église Gallicane, & le fondement de la morale ; c’était dire aux hommes, Dieu vous ordonne de ne jamais faire votre devoir, dès que vous craindrez l’injustice. On n’a jamais heurté le sens commun plus effrontément ; les Consulteurs de Rome n’y prirent pas garde. On persuada à la Cour de Rome que cette Bulle était nécessaire, & que la Nation la désirait ; elle fut signée, scellée & envoyée, on en fait les suites : certainement si on les avait prévues, on aurait mitigé la Bulle. Les querelles ont été vives, la prudence & la bonté du Roi les a enfin apaisées.

 

Il en est de même dans une grande partie des points qui di- visent les Protestants & nous ; il y en a quelques-uns qui ne sont d’aucune conséquence, il y en a d’autres plus graves, mais sur lesquels la fureur de la dispute est tellement

 

 

amortie, que les Protestants eux-mêmes ne prêchent au- jourd’hui la controverse en aucune de leurs Églises.

 

C’est donc ce temps de dégoût, de satiété, ou plutôt de rais- on, qu’on peut saisir comme une époque & un gage de la tranquillité publique. La controverse est une maladie épidémique qui est sur sa fin, & cette peste, dont on est guéri, ne demande plus qu’un régime doux. Enfin l’intérêt de l’État est que des fils expatriés reviennent avec modestie dans la maison de leur père ; l’humanité le demande, la rais- on le conseille, & la politique ne peut s’en effrayer.

 

EST CE QUE VOUS VOULEZ LA SUITE

SUR LES ARNAQUE DE LA DEMOCRATIE

ET DE L'EXCUSE POUR TROUVER FACILEMENT LE BOUC ÉMISSAIRE

Link to post
Share on other sites

LE PS LE PRESIDENT FRANCOIS HOLLANDE

ET SON PREMIER MINISTRE

QUI N'ARRÊTENT PAS DE SE DRAPER DANS LA MARCHE DU DIMANCHE 11 JANVIER 2005

 

ET ISRAEL

 

POUR ACCUSER L'ISLAM ET LES MUSULMANS

Et déclarer vouloir leur faire la guerre

Link to post
Share on other sites
Comme quoi ceux qui n'ont pas fait cette marche ont bien fait de ne pas cautionner de tels agissements... ;)

 

Tu as l'art de formuler

pour que moi j'ai des dificultes à comprendre tes propos

car avoir marcher le dimanche 11 janvier 2015 c'est s'indigner et ne pas cautionner

les agissement des meurtriers

 

Sauf

que l'état français à politisé cette journée

 

Pour s'en approprié

et comme jouant le paternaliste

alors qu'il a mis en danger les musulmans

Link to post
Share on other sites
Comme quoi ceux qui n'ont pas fait cette marche ont bien fait de ne pas cautionner de tels agissements... ;)

 

Tu as l'art de formuler

pour que moi j'ai des dificultes à comprendre tes propos

car avoir marcher le dimanche 11 janvier 2015 c'est s'indigner et ne pas cautionner

les agissement des meurtriers

Link to post
Share on other sites

Join the conversation

You can post now and register later. If you have an account, sign in now to post with your account.

Guest
Répondre

×   Pasted as rich text.   Paste as plain text instead

  Only 75 emoji are allowed.

×   Your link has been automatically embedded.   Display as a link instead

×   Your previous content has been restored.   Clear editor

×   You cannot paste images directly. Upload or insert images from URL.

×
×
  • Create New...