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Deux jours à tlemcen, par pierre-yves cossé


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Algérie : deux jours à Tlemcen

 

Une légère brise de paix flotte sur cette ville algérienne proche du Maroc. Par Pierre-Yves Cossé, ancien commissaire au Plan

 

Ne le dites pas trop fort en Algérie mais Tlemcen fait beaucoup penser au Maroc. Oujda est à 70 kilomètres et la frontière officiellement fermée est perméable. Des familles, plutôt que prendre l'avion à Oran, la franchissent illégalement pour se retrouver entre cousins. La contrebande se porte bien, moyennant quelques bakchichs aux douaniers : produits algériens largement subventionnés, comme l'essence ou le sucre contre le kif du Rif. La cuisine, d'excellente qualité, est pour une bonne part marocaine. Les dynasties berbères, Almoravides ou Mérinides, ont laissé des mosquées avec leurs minarets et des medersas et près de 50 000 Andalous industrieux s'y sont installés lors de la Reconquista . Le touriste parisien pense inévitablement à l'exposition au Louvre en 2013 sur le Maroc médiéval.

 

Il flotte sur Tlemcen une légère brise de paix, plus marocaine qu'algéroise. Les contrôles policiers sont moins visibles qu'à Alger, même si l'institut français est gardé en permanence.

La ville attire des touristes algériens, venant en particulier d'Oran (140 km). Ils sont attirés d'abord par le plateau de Lalla Setti (nom d'une héroïne locale célébrée par une petite koubba blanche). On y accède en voiture ou en téléphérique (1100 m.) La vue sur la ville est magnifique. Des aménagements ont été réalisés (2011) pour les jeux et la détente, un lac artificiel a été creusé, des restaurants ont été construits sur le bord de la falaise. L'édifice le plus spectaculaire est le grand Hôtel Renaissance, établissement de luxe (plus de 200 chambres) avec ses jardins, sa piscine et ses salons. En contrebas, des familles algériennes viennent pique niquer dans les bois de pins.

L'autre attraction populaire, les grottes de Beni Add ou d'Ain-Fezza, est située à une vingtaine de kilomètres à l'est dans une montagne rocailleuse et aride. Dans trois salles souterraines de stalactites et de stalagmites, des formes étranges faisant penser à des animaux ou à des monstres dépaysent et stimulent l'imagination. Comme dans beaucoup de lieux touristiques, les souvenirs proposés aux visiteurs sont indigents.

la tribune fr

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La vieille ville en partie détruite par les Français

Les destructions commises par les Français pour les besoins de l'armée et du développement de la ville européenne ont été nombreuses, notamment le Mechouar (la citadelle) dont il ne restait que des murailles, des medersas, des mosquées et la plupart des Portes.

De la ville européenne, il reste de beaux immeubles art nouveau et art déco, qui ont besoin d'être rénovés et des terrasses de cafés à l'ombre de beaux platanes, où des Algériens sirotent leur kawa à la place d'Européens sirotant leur anisette.

 

Le lieu le plus attachant de la vieille ville est la mosquée de Sidi Boumediène (14è siècle), juchée au haut d'une sorte de kasbah, dont le minaret carré se voit de loin. On y accède par une rue étroite et pentue bordée de maisons crépies à la chaux, Le porche d'entrée est décoré de mosaïques de faïence. Les murs intérieurs sont revêtus de plâtres finement sculptés et les arcs sont en fer à cheval. Les vantaux de la porte en bois de cèdre sont revêtus de plaques de bronze ajouré, un chef d'œuvre exécuté par un artiste andalou. Les chapiteaux de la salle de prière sont d'une grande finesse, le mihrab et le minbar en bois de cèdre sculpté aux reflets rougeâtres. Une collection de corans anciens y est conservée, un garçon de douze ans en avait emprunté un et le lisait assis à côté du minbar. La mosquée a subi des mutilations lors de la décennie sanglante.

En dessous de la mosquée, les ruines de la même époque de la maison du sultan (Dar Es Soltane) disposées autour de trois patios et conservant des traces d'ornementation offrent une vue admirable ; ce vendredi matin, l'air était léger et le paysage lumineux.

La médersa, contigüe à la mosquée et de la même époque, qui fut fréquentée par le plus célèbre historien du Maghreb, Ibn Khaldoun, n'était pas ouverte.

 

Commentaires en français et en arabe

De même, au centre de la ville, la grande mosquée n'était pas accessible en raison de la prière du vendredi et la mosquée de Sidi Bel Hassan, dont les quatre faces du minaret sont ornées de colonnettes d'onyx et de mosaïques était fermée.

En face, le musée a été installé (2009) dans l'ancienne mairie et entièrement restauré. Sur deux niveaux, est présentée de façon claire l'évolution de la civilisation islamique à Tlemcen : maquettes, plans, chapiteaux, colonnes, manuscrits, monnaies, armes. Les commentaires sont en arabe et en français, sous l'influence probable de Bouteflika.

Dans le Palais Mechouar, reconstruit pour la plus grande partie, un musée de vêtements de fête, du Nord et du Hoggar. C'est une réussite, qui s'inscrit dans une tradition de Tlemcen l'artisanat du vêtement. Des habits, fonctionnels et élégants, sont présentés sur des mannequins. Au milieu, un grand patio a été construit.

 

En moins de deux jours, la visite a été incomplète et superficielle. Néanmoins, j'en suis reparti heureux et satisfait des choses vues et de l'accueil reçu. Il me semble que même dans le contexte incertain actuel les Français peuvent s'y rendre, mais ce n'est pas du tourisme bon marché.

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