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Liban. “Ce porc a ouvert sa veste en hurlant Allah Akbar !”


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Liban. “Ce porc a ouvert sa veste en hurlant Allah Akbar !”

 

L’Orient-Le Jour - Beyrouth Publié le 13/11/2015 -

 

Les secours arrivent dans la banlieue sud de Beyrouth, Burj al-Barajneh, le 12 novmbre 12, 2015, après un double attentat qui a fait au moins 41 morts. PHOTO ANWAR AMRO/AFP

 

Beyrouth est sous le choc. Un fief du Hezbollah a été pris pour cible par deux explosions dans le sud de la capitale, le 12 novembre, faisant au moins 41 morts. L’Etat islamique revendique l’attaque. Reportage dans les rues où on partage tristesse et colère.

 

Le sang des victimes n’a pas encore séché dans l’étroite ruelle commerçante de la husseiniyé, sur les lieux du double attentat-suicide. Ici, il est partiellement recouvert de carton, pudeur oblige. Quelques mètres plus loin, il se mélange aux débris de vitres qui jonchent le sol, aux chaussures dépareillées aussi.

 

L’alarme d’une voiture défoncée n’en finit pas de sonner, sous une façade éventrée par le souffle, à quelques mètres de la husseiniyé (lieu de culte chiite) et de l’école de bienfaisance visées par la deuxième explosion. Des voisins se retrouvent et s’enlacent. D’autres, pendus à leur téléphone portable, se frappent la tête en signe de désespoir. Une femme de couleur pleure son frère blessé.

Les miliciens du Hezbollah, armés jusqu’aux dents, le visage fermé

 

Tenus à l’écart, derrière une rangée de barbelés, les habitants hagards, encore sous le choc, observent les enquêteurs des services de renseignements à l’œuvre. Ces derniers viennent tout juste d’entamer leur travail de fourmi, à la recherche d’indices, d’informations, de restes humains. Ils sont encadrés par l’armée libanaise, mais aussi et surtout par les miliciens du Hezbollah en nombre imposant, armés jusqu’aux dents, le visage fermé, qui ont bouclé la totalité du secteur.

 

Les ramifications internationales de Daech

Des heures après le drame, des habitants n’ont toujours pas quitté leur balcon. D’autres errent, à la recherche d’un proche à consoler, d’un voisin avec lequel partager sa colère. D’abord muettes, les langues se délient. “Il était 17h30, lorsque deux kamikazes, descendus d’une mobylette, se sont fait exploser devant la boulangerie Makké, raconte un partisan du Hezbollah. Mais seule la ceinture d’explosifs de l’un d’entre eux a été actionnée, tuant les deux hommes”, dit-il.

 

Un héros

 

C’est alors qu’un troisième kamikaze s’est mis à courir vers la mosquée, située juste en face de la husseiniyé où des fidèles étaient réunis pour réciter la prière du jeudi soir, à une cinquantaine de mètres de la première explosion. “Ce porc a ouvert sa veste en hurlant Allah Akbar !” crache un habitant de la famille Karout.

 

“Un jeune homme du quartier s’est précipité vers lui et l’a enlacé, soucieux de lui couper l’accès à la mosquée. Le kamikaze s’est alors fait exploser en pleine rue, à l’entrée du lieu de culte et de l’école, trois minutes à peine après la première explosion.” Fort heureusement, les élèves étaient déjà rentrés chez eux.

 

Désormais, le nom de Adel Termos est sur toutes les lèvres. Chacun rend hommage à sa manière à ce héros, père de trois enfants, qui s’est sacrifié pour sauver des vies. On raconte aussi qu’un “quatrième kamikaze a été appréhendé par le Hezbollah avant de se faire exploser”, de même que “des ressortissants syriens, par mesure de sécurité”. Des propos difficiles à confirmer.

 

“Ça fait mal. Ils ont touché le souk populaire”

Dans ce quartier populaire surpeuplé où se côtoient, non loin de l’hôpital al-Rassoul al-Aazam, des habitants défavorisés du Sud, de la Békaa et de la banlieue sud, la tristesse se lit sur les visages. On revit en boucle les deux explosions. “La maison en a tremblé”, raconte un garçonnet. “Le quartier tout entier a été secoué”, renchérit une voisine. Les habitations sont si modestes. “Ça fait mal. Ils ont touché le souk populaire de Bourj el-Brajneh”, lance une habitante. Excédée par le cordon sécuritaire déployé par l’armée, elle s’en prend à un soldat. “Laissez-nous passer, nous habitons dans la rue. Où étiez-vous donc au moment du drame ? Vous n’étiez même pas là”, lui crie-t-elle, dans un sanglot.

 

Hassan Ammar, un habitant, n’en revient pas. Sa fille de 12 ans est sortie de l’école de la husseiniyé sept minutes à peine avant l’explosion. Son frère, lui, tient un stand de vêtements, à quelques mètres des lieux des deux attentats. “Ils sont tous deux sains et saufs, mais ceux qui sont morts sont nos amis, nos voisins, nos proches”, observe-t-il tristement.

 

“Ce drame unira-t-il les Libanais ? Je l’espère, sincèrement”, pense tout haut un homme qui a grandi dans ce quartier et fréquenté son école. Mais pour l’instant, il ne peut que penser avec révolte et indignation à ceux qui ont perdu la vie dans cet attentat inutile.

 

– Par Anne-Marie El-Hage, publié dans L’Orient-Le Jour le 13 octobre

Anne-Marie El-Hage

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