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Aït Ahmed agite le Carré des Martyrs


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Quelques minutes après que Hocine Aït Ahmed a rendu son âme à Dieu, Mohamed Boudiaf, le coordinateur du Groupe des Six, convoque les locataires du Carré des Martyrs à une réunion urgente.

 

Boudiaf : Salut les amis, j’ai une bonne nouvelle à vous annoncer, on sera très bientôt rejoints par une personne que vous connaissez tous.

 

Amirouche : J’espère que ce n’est pas Amel Wahbi, parce que, depuis quelque temps, notre carré est devenu dar aâmi Moh.

 

Warda El Djazaïria : Héééééé ! Que veux-tu insinuer par là ? Ce n’est pas moi qui ai choisi d’être ici, d’ailleurs c’est à ma mort que j’ai appris que j’étais une grande Moudjahida ! Et ce n’est pas ma faute si celui qui a décidé de m’enterrer ici adore mes chansons…

 

Mohamedi Saïd : J’espère que celui qui délivre ces permis d’inhumer n’est pas un fan de Chab Abdou…

 

Boudiaf : Hhhhh, tu ne changeras jamais yawahad nazi, non c’est un ami, un compagnon d’armes. Aya devinez… c’est qui ?

 

Ben Bella : Youpiiiii ! c’est mon ami Abdelkader El Mali, Boutef, quoi ! comme disent les jeunes !

 

 

 

Boudiaf : J’ai bien dit un chef historique. Aya retourne dans ton coin avec ton autre ami Boukharrouba ! Je veux dire… Boumediène ! Même sous terre, t’es resté masochiste, tu aimes toujours ceux qui t’ont fait du mal, yakhi hala yakhi…

 

Bitat : Un homme ou une femme ? Wallah j’ai hâte de retrouver mon épouse, Zohra…

 

Boudiaf : C’est un homme, un homme avec un grand H…

 

Abane Ramdane : Mathématiquement, il ne reste que Da El Hocine, sauf s’ils ont décidé de convertir un autre planqué en grand maquisard…

 

Boudiaf : Ah ya Si Ramdane, j’ai oublié que t’étais un matheux, bravo ! Eh oui, mes amis… Da l’Ho est décédé hier. A Genève, pas à Paris, Rabbi yarahmou.

 

Krim Belkacem : Allah yarahmou, il doit être fatigué, meskine, il n’a jamais cessé de combattre l’ennemi, même après l’indépendance. Je suis content qu’il soit parmi nous maintenant, mais je sais que ce n’est pas le cas pour certains… Hhhhhhhhh, n’est-ce pas ya Si Boukharoubahhhh ?

 

Boumediene (tremblant de peur) : Malgré tout ce que je lui ai infligé à lui et à sa famille, je sais qu’il me pardonnera, c’est un homme civilisé et un adepte des droits de l’Homme.

 

Khider arrive en courant : Ya jmaâa, je viens d’apprendre que Si El Hocine sera inhumé dans les montagnes de Kabylie, chez lui, à Aïn El Hammam… C’était son vœu et sa décision avant de mourir, et il a même refusé des funérailles officielles.

 

Boumediene lève les mains au ciel et balbutie : Hamdoullah ya Rabbi !

 

Boudiaf éclate en sanglots : Pourquoi ya Si Ahmed, pourquoi…

 

Amirouche : Sacré Da l’Ho, même mort il a décidé de leur livrer un quatrième et dernier combat, après ceux de 1947 avec l’OS, puis de 1954, ensuite 1963 contre ceux qui ont confisqué l’indépendance du pays.

 

Mustapha Ben Boulaïd : C’est tout à son honneur. En décidant d’être inhumé au maquis, Si El Hocine vient de donner une gifle à ceux qui veulent récupérer sa mort, après l’avoir lynché à plusieurs reprises. Chapeau bas, mon ami, Rabbi yarahmak, on se retrouvera tous au Paradis, Inch’Allah.

 

Chikh El Bachir El Ibrahimi : Ya Si Mustapha, je dois préciser que tous ceux qui sont dans ce carré n’iront pas forcément au Paradis, comme l’a si bien dit Si Amirouche : El Djenna machi dar aâmi Moh.

 

Chaâbani : Oui ya chikh, certains doivent payer pour les assassinats qu’ils ont commis, ils ont tué, emprisonné et poussé à l’exil de valeureux hommes et femmes qui se sont sacrifiés pour ce pays. Moi personnellement je ne pardonnerai jamais à ces deux-là (il montre du doigt un coin du carré) qui m’ont kidnappé et exécuté.

 

Ferhat Abbès : Oui ya Si Mohamed, je me rappelle que tu avais refusé un ordre de ces deux-là pour aller mater le FFS en 1963. Dommage ! Da el Hocine aurait aimé te rencontrer pour te remercier.

 

Didouche Mourad : Maintenant que Si Aït Ahmed est parti, nous n’avons plus de représentants qui ont autant de charisme, El Khatib refuse de sortir de sa coquille, Madame Bitat, Bouregaâ, Zbiri font la pluie et le beau temps et il ne reste que de rares Moudjahidine et Moudjahidate, je pense à Louisa Ighilahriz, Djamila Bouhired, qui sont restées dignes et attachées aux principes de Novembre, mais qui ne peuvent rien faire avec ce peuple devenu amorphe…

 

Ben Bella : Détrompe-toi, il reste encore un grand révolutionnaire…

 

Abane lui coupe la parole : Askout ya aghioul ! Tu nous donnes envie de vomir avec ton…

 

Ben Bella : Non attend, ce n’est pas à lui que je pense, mais plutôt à Yacef Saâdi…

 

Hassiba Ben Bouali : Quoi ??? Et pourquoi pas Nezzar ou Ali Haroun ? Attends, j’appelle Ali La Pointe, il va t’arranger la cravate. Ali ! Ali !

 

Ali La Pointe (sorti d’un trou et qui se secoue pour se dépoussiérer) : Oui, j’ai entendu, et au train où vont les choses, tout est possible, j’ai établi un plan B au cas où Yacef Saâdi serait conduit ici.

 

P'tit Omar : Et en quoi consiste ce plan, tonton ?

 

Ali La Pointe : J’ai creusé une planque sous ce carré pour m’isoler jusqu'au jour de la Résurrection.

 

Amirouche : Wallah j’étais mieux au cachot de l’état-major de la gendarmerie de Bab J'did avec Si El Haouès. C’est gentil de la part de Chadli qui nous a libérés de cette prison, 18 ans après que Boumediene nous a déterrés de Bou Saâda pour nous jeter dans ce cachot. Au début on était contents de retrouver nos compagnons dans ce carré, mais après koul men habba wadabba s’invite dans cet endroit sacré.

 

Si El Haouès : C’est vrai qu’il faut reconnaître à Chadli le courage d’avoir réhabilité tous les vrais Moudjahidine.

 

Chadli : Je n’ai fait que mon devoir, chers amis. Je voulais faire plus, mais ce n’était pas possible avec ces DAF et cette promotion Lacoste qui ne cessaient de prendre de l’ampleur.

 

Ben Khedda : Je n’ai jamais cessé de mettre en garde mes collègues du CNRA contre ces officiers déserteurs de l’armée française.

 

Moufdi Zakaria : Eh oui, même moi je me retrouve dans ce carré avec les mêmes personnes qui m’ont exilé. Kassaman par notre sang noble et pur généreusement versé… Nous avons décidé que l'Algérie vivra. Fach' hadou, fach' hadou, f’ach' hadou…

 

Chadli : C’est vrai que ce carré des martyrs a été souillé par la présence de certains, mais sachez qu’une Jabana li mafihach machakil machi jabana et hamdoullah ma aândnach machakil.

 

Après un long silence, Si Larbi Ben M’Hidi prend la parole et toute l’assistance se mit à l’écouter religieusement :

 

Ecoutez, chers amis, ne vous prenez pas trop la tête, vous savez que même moi j’ai été trahi par les miens. Et, comme vous, je ne pardonnerai jamais à ceux qui ont dévié des valeurs de Novembre. En décidant d’être inhumé au maquis, notre cher ami et compagnon Hocine Aït Ahmed, Allah yarahmou, a non seulement honoré nos mémoires, mais il a aussi adressé un message à travers lequel il perpétue l’espoir d’une Algérie libre et démocratique. Alors, tout ce qu’il nous reste à faire à partir de ce carré c’est de prier Allah qui nous a gratifiés de Sa Miséricorde en nous accordant cette grande chance qui est le martyre.

 

Tous levèrent les mains et dirent : Ya Rab, faites que notre combat ne soit pas vain et que notre peuple puisse vivre dans la dignité, la prospérité et la justice. Amine !

 

Omar Khayam

source:http://www.hoggar.org/index.php?option=com_content&view=article&id=4615:ait-ahmed-agite-le-carre-des-martyrs-par-omar-khayam&catid=94:hoggar&Itemid=36.

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