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Dominique Moïsi, la voix d'Israel en France.


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Regardez la propagande pro-isréalienne en France pour abattre l'a Syrie et son armée, seule force qui résiste encore à Israel.

 

Pourquoi Bachar n’est pas la solution à la crise syrienne

Dominique Moïsi / Chroniqueur - Conseiller spécial à l'Ifri (Institut français des relations internationales) | Le 19/02/2016 Les Echos

 

Face à la menace de Daech et à l’afflux de réfugiés, les pays occidentaux pourraient considérer le régime de Bachar Al Assad comme un moindre mal et laisser le champ libre à son allié russe. Ce serait une grave erreur.

 

de Dominique Moïsi

 

1914, 1936, 1962… 2016 ? L’internationalisation du conflit syrien constitue la menace la plus grave que le monde ait connue depuis la fin de la guerre froide. L’hiver 2016 au Moyen-Orient commence à évoquer tout à la fois l’été inexorable de 1914, l’« été impardonnable » de 1936, pour reprendre le titre de l’ouvrage de Gilbert Grellet sur la guerre d’Espagne et le scandale de la non-intervention, sans oublier l’automne 1962 et le point culminant de la guerre froide avec la crise des missiles de Cuba.

 

Bien sûr, prise individuellement, chacune de ces analogies peut paraître exagérée, à l’exception sans doute de la comparaison avec l’été 1936. La crise syrienne, comme par un effet de boomerang, nous frappe d’autant plus fortement que nous avons voulu l’ignorer, prisonniers comme nous pouvions l’être de nos hésitations et de nos contradictions. Mais l’addition de ces trois analogies reflète l’approfondissement d’une crise, dont ne pouvons plus nous masquer la gravité, pour nous-mêmes, et pas seulement pour les plus de 260.000 Syriens qui ont déjà perdu la vie, ou les millions d’autres qui ont dû quitter leur pays ravagé par la guerre.

 

Comme en 1914, le jeu des coalitions – même si elles sont plus informelles aujourd’hui, et non basées sur des traités et pactes d’alliances souvent secrets comme elles pouvaient l’être hier – risque de déboucher sur un engrenage fatal. Quel affrontement potentiel faut-il craindre le plus, celui entre l’Arabie saoudite et l’Iran, celui entre la Russie et la Turquie, celui qui résulterait d’une escalade de la violence entre les Kurdes du PKK et la Turquie ? Sans oublier qu’une aggravation sur un front peut inexorablement mener à une escalade ailleurs ? Tout apparaît si confus et pourtant tout est d’une si affligeante clarté. Comme pouvait l’être la Pologne à la fin du XVIIIe siècle, la Syrie est devenue le « terrain de jeu » des dieux, pour reprendre la formule de l’historien Norman Davies sur la Pologne. Des dieux ou plutôt des hommes, animés les uns par la peur, les autres par l’ambition.

 

Mais ces peurs et ces ambitions sont d’une extrême diversité. Peur de se retrouver englué dans un nouveau conflit moyen-oriental pour les Etats-Unis, peur d’être envahie par le flux des réfugiés pour l’Europe, peur de voir son rival iranien renforcer son influence régionale pour l’Arabie saoudite, peur de l’indépendantisme kurde pour la Turquie. Peur de la montée en puissance de Daech et des vagues d’attentats terroristes pour tous ou presque tous, mêmes si les Russes semblent avoir plus d’ambition que de peur.

 

Mais, avant l’apparition de toutes ces peurs, il y a eu à la base comme un péché originel. C’est en ce sens que la référence à 1936 est incontournable. Il y a aujourd’hui la tentation de réécrire l’histoire, comme le fait de manière troublante un reportage de France 2 diffusé jeudi dernier et qui présente une vue partisane et biaisée du conflit, dont le message pourrait se résumer ainsi : si nous voulons stopper le flot de réfugiés vers l’Europe, notre seul espoir est le régime de Bachar Al Assad – <<<« était-il si mauvais, d’ailleurs ? »>>>

 

En réalité, en Syrie, aujourd’hui, nous payons le prix d’un double aveuglement : celui qui a poussé les Etats-Unis à intervenir en Irak en 2003, celui qui a poussé le monde occidental dans son ensemble (encouragé en cela par l’attitude craintive et hésitante des Etats-Unis) à fermer les yeux, en dépit de condamnations verbales fortes et d’actions faibles, sur les crimes du régime Assad contre sa population. La radicalisation de l’opposition au pouvoir en place n’est devenue inévitable qu’à partir de nos hésitations à soutenir les modérés.

 

Les leçons de 1936 – l’attentisme et la démission étant inexcusables dans les situations extrêmes – sont d’une troublante actualité et posent bien sûr le problème de nos relations avec la Russie. Pour avoir répété les erreurs de 1936, serions-nous retombés dans le climat de guerre froide qui prévalait en 1962, en ayant encouragé de manière dangereuse l’appétit russe ?

 

L’escalade de la violence en Syrie, son retour à l’est de l’Ukraine, la volonté toujours plus apparente de Moscou de jouer des faiblesses et divisions de l’Europe, sinon celle de déstabiliser tout particulièrement l’Allemagne d’Angela Merkel : tout cela semble correspondre à une stratégie d’autant plus problématique qu’elle semble cohérente dans ses objectifs et aventureuse dans sa conjonction d’atouts militaires et de faiblesses économiques. Comme un disque rayé, la Russie rejouerait-elle la partition de l’URSS, celle qui a conduit à son effondrement à la fin des années 1980 ?

 

Au lendemain de bombardements d’une extrême brutalité sur la ville d’Alep, qui ne peuvent s’inscrire dans une quelconque lutte contre Daech, mais traduisent la volonté brutale, de marquer des points sur le terrain pour le gouvernement d’Assad, au moment même où l’on est censé négocier un cessez-le feu, il ne saurait être question de lever les sanctions à l’encontre de Moscou. Et ce, quelles que puissent être les raisons économiques ou politiques, qui pourraient nous y encourager. Pour reprendre la formule du sénateur John McCain aux Etats-Unis : « L’appétit de Moscou grandit en mangeant. »

 

Il n’est bien sûr pas question pour les Etats-Unis et les pays européens d’intervenir directement dans le conflit syrien. De la même manière, il est important de donner des leçons de modération à notre principal allié sur le flanc sud de l’Otan, la Turquie d’Erdogan. Mais la Russie ne doit pas croire qu’elle a les mains libres et qu’elle peut en conséquence faire n’importe quoi en Syrie.

 

Rien n’est plus dangereux en histoire qu’une forme d’illusion rétrospective de fatalité, qui nous conduirait aujourd’hui à la conclusion qu’un dictateur cruel soutenu entre autres par la Russie est un moindre mal face au risque de califat.

Dominique

Moïsi

 

Dominique Moïsi, professeur au King’s College de Londres, est conseiller spécial à l’Ifri.

 

En savoir plus sur http://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/021710988892-pourquoi-bachar-nest-pas-la-solution-a-la-crise-syrienne-1201621.php?uLw0ZgAdg6pFKfhl.99

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