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Jamal Maarouf : «l’Armée syrienne libre est sous la coupe d’Al-Nosra »


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Jamal Maarouf : «l’Armée syrienne libre est sous la coupe d’Al-Nosra »

 

Le Monde.fr | 15.03.2016 à 14h04 • Mis à jour le 15.03.2016 à 15h54 | Par Benjamin Barthe (Beyrouth, correspondant)

 

Jamal Ma'arouf, ici le 16 juin 2013 dans la province d'Idlib.

Au sein de l’opposition syrienne, le nom de Jamal Maarouf suscite des commentaires diamétralement opposés. Certains sont reconnaissants à cet ex-ouvrier du bâtiment, qui commanda le Front des révolutionnaires syriens (FRS), une brigade rebelle modérée, d’avoir été le principal artisan de « la deuxième révolution syrienne », à savoir l’expulsion des djihadistes de l’Etat islamique (EI) des provinces d’Idlib, de Hama et de la ville d’Alep, en janvier 2014.

 

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D’autres, vouent aux gémonies ce chef de guerre de 41 ans, éphémère favori de l’Arabie saoudite et des Américains, qui a sali l’image de la révolution et contribué à affaiblir son bras militaire, l’Armée syrienne libre (ASL), en se livrant à des exactions dans les régions sous son contrôle. Depuis son exil forcé en Turquie, à l’automne 2014, suite à l’écrasement de ses troupes par le Front Al-Nosra, la branche syrienne d’Al-Qaida, Jamal Maarouf était resté quasiment silencieux. Le Monde l’a rencontré en janvier dans une banlieue du sud de la Turquie où il réside.

 

La révolution est-elle terminée pour vous ? Ou bien avez-vous l’intention de retourner sur le champ de bataille ?

 

Je suis un fils de la révolution et je ne l’ai pas abandonnée. Même si je suis loin du terrain, mon esprit est toujours là-bas. Mes troupes ont changé de nom mais elles combattent toujours sur place. Elles sont notamment dans la région de Dera’a, dans le sud. [Début mars, le commandant du FRS dans cette zone, Abou Hamza Al-Nuaimi, a été tué dans un attentat à la bombe].

 

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Des rumeurs affirment que vous avez rejoint les Forces démocratiques syriennes [une coalition militaire, conduite par les Kurdes du PYD, avec l’appoint de tribus arabes, qui combat l’EI dans le nord-est de la Syrie]. Est-ce exact ?

 

Je ne collabore pas avec les Forces démocratiques syriennes. Je n’ai pas participé aux combats de Kobané [une ville kurde assiégée par l’EI entre septembre 2014 et janvier 2015], comme certaines sources l’ont affirmé. Certains de mes hommes se sont juste mis sous la protection des Kurdes, dans leur canton d’Afrin, au nord d’Alep. Mais je travaille toujours pour le même objectif : libérer la Syrie de la dictature d’Assad et d’Al-Qaida et rendre à mon pays sa stabilité, avec toutes ses composantes. Notre problème n’est pas avec les alaouites [la minorité syrienne dont est issu le clan Assad], mais avec les gens du régime et leurs tueurs.

 

Pourquoi ne rentrez-vous pas en Syrie ?

 

J’y ai trop d’ennemis. Aujourd’hui, en Syrie, on ne sait plus qui est avec qui. La contre-révolution menée par l’EI et Nosra a brouillé les cartes. L’Armée syrienne libre est trop faible. J’ai besoin de davantage de soutien avant de retourner sur le terrain.

 

N’avez-vous pas vous-même contribué à cette situation ? On vous a accusé de racket, de trafic de pétrole et même d’avoir éliminé certains de vos opposants au sein de la rébellion.

Quant aux accusations d’assassinats, formulées par Nosra, c’est un stratagème pour me salir

 

Ces accusations ne reposent sur aucune preuve. Je n’ai pas de compte en banque, même pas d’appartement à moi, ni ici ni en Syrie. C’est le gouvernement turc qui me loge, me nourrit et pourvoit à toutes mes dépenses. Si quelqu’un pense que je suis corrompu, qu’il porte plainte et je répondrai devant un tribunal. Quant aux accusations d’assassinats, formulées par Nosra [les djihadistes s’étaient filmés en train de sortir des cadavres d’un puits, dans le QG de Maarouf, dans la province d’Idlib], c’est un stratagème pour me salir. Ce sont eux qui ont jeté des corps dans le puits. Où sont les parents de ces morts dont on m’accuse ?

 

Avez-vous gardé des contacts avec l’Arabie saoudite et les Etats-Unis qui vous ont armé et financé pendant un temps ?

 

Le MOM [la cellule de soutien aux rebelles, installée en Turquie, sous l’égide des services secrets américains] a cessé tout soutien le jour où j’ai fui en Turquie. Depuis, je n’ai plus eu de contact avec les Américains et les Saoudiens. A vrai dire, ils m’ont complètement lâché. Ils savaient que j’étais assiégé par Nosra. J’ai appelé le MOM et j’ai demandé des bombardements sur les positions de Nosra, en leur fournissant des coordonnées GPS. Mais ils n’ont pas réagi. Seule la Turquie a facilité ma fuite, en ouvrant la frontière sur mon passage.

 

Quels types de soutien receviez-vous du MOM ?

Aujourd’hui, l’ASL est sous la coupe de Nosra

 

Un soutien financier essentiellement. De juillet à octobre 2014, on a reçu chaque mois la somme de 250 000 dollars, à diviser entre 4 500 combattants, soit environ 50 dollars par personne. Le soutien militaire était plus faible. Ils nous fournissaient des balles principalement. On avait déjà des armes, qui provenaient pour l’essentiel des entrepôts du régime, dont nous nous étions emparés. Nous avons reçu une seule cargaison de missiles anti-tanks TOW [livrés par l’Arabie saoudite, avec l’assentiment de la CIA]. Il y en avait dix. L’offensive contre l’EI, en janvier 2014, a été menée sans le moindre soutien international. Pas une seule brigade de l’ASL n’a pu rééditer ce que nous avons fait à cette époque. Car aujourd’hui, l’ASL est sous la coupe de Nosra.

 

Lire aussi : Mohammad Ghannam, le révolutionnaire que la France et les Etats-Unis veulent accueillir (1/10) #Syrie5ans

 

Que voulez-vous dire ?

 

Les chefs actuels de l’ASL sont obligés de composer avec Nosra, qui prélève une partie de l’aide humanitaire et militaire qui leur est envoyée. Les leaders de Nosra leur laissent les missiles TOW car ils ne sont pas bêtes. Ils savent que s’ils les saisissent, les livraisons cesseront aussitôt. Et ils ont besoin de ces missiles pour détruire les tanks du régime. En gros, Nosra dit à l’ASL où et comment les utiliser. Les principaux chefs de l’ASL, comme Farès Bayoush et Ahmed As-Saoud [le chef de la « divison 13 », dont les bases à Maaret Al-Nouman ont été récemment saisies par Nosra] sont obligés de se faire tout petits. L’ASL est terriblement handicapée, mais c’est toujours mieux que rien.

 

Que faut-il faire pour sauver l’ASL et la révolution ?

Nous avons besoin d’un sursaut de l’Occident

 

Nous avons besoin d’un sursaut de l’Occident, qu’il prenne une position forte. L’ASL est la seule force armée qui porte un projet pour toute la Syrie. Le projet de Nosra est islamiste et celui du régime est alaouite. Les Kurdes veulent s’allier avec l’Occident, mais ils sont incapables de contrôler tout le territoire. Seule l’ASL a un projet acceptable par toutes les composantes de la société.

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