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Ratonnade est toujour d'actualite


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salam

constat fait apres guere de la France

 

 

 

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DES « RATONS »

Nous étions en droit d'espérer que les Français, tant par leur rationalisme

et leur libéralisme relatifs que par les souffrances subies durant

l'occupation hitlérienne, se trouvaient immunisés contre le ra-'CÏsme. Mais dès qu'on étudie leur comportement envers les Nord-Africains.

On est bien obligé de convenir que tel n'est pas le cas.

MESURES DISCRIMINATOIRES

Certes, nous n'avons jamais assisté,

dans notre pays, à ces explosions de fureur

hystérique qui éclataient dans l'Allemagne

d'hier contre les Israélites, qui

flambent aujourd'hui encore aux EtatsUnis

ou en Afrique du Sud contre les

noirs. Même à l'époque où l'antisémitisme

était encouragé par les pouvoirs publics,

ceux-là mêmes qui le pratiquaient

ne le faisaient, à l'exception d'une poiKIlée

d'excités, qu'avec prudence, voire

une certaine gêne.

Il en va de même, aujourd'hui, avec

moins de retenue, il est vrai, au fur et

à mesure que la guerre d'Algérie se prolonge,

à l'égard des Nord-Africains.

Je ne parlerai que pour mémoire des

mesures discriminatoires prises à leur

encontre par certaines administrations.

Elles ont déjà été analysées maintes fois

.avec pertinence. Je m'étonnerai simplement

du fait que la ségrégation, au mépris

de tous les textes légi slatifs, est

officiellement pratiquée dans les hôpitaux,

les asiles de nuit et les prisons. Je

demanderai également pourquoi, dans

·certaines villes, les Algériens, sous peine

d'être raflés et emmenés de force au

commissariat, sont contraints de se présenter

mensuellement à la police qui

leur délivre un certificat valable jusqu'au

mois suivant. C'est un privilège qu'ils

partagent avec les filles de joie et les

'interdits de séjour!

ILS NE VIVENT PAS

COMME NOUS ...

Mais, ce qui me paraît infiniment plus

'grave, c'est l'attitude à leur égard de la

majorité de nos compatriotes. J'ai lu,

:avec émotion, la « lettre d'un Algérien»

publiée par « Droit et Liberté » de dé"

cembre 1960. Dans ces lignes, intelligen'

tes et sensibles, j'ai retrouvé l'écho des

nlaintes de tous mes amis nord-africains.

Du plus simple des manoeuvres au plus

·évolué des étudiants, tous se plaignent de

ne pouvoir trouver place dans notre société.

Non de leur fait, mais du nôtre.

A ce grief, beaucoup de Français rétor'

quent avec une soupir hypocrite : « C'est

malheureusement impossible! Ces gens-

là ne vivent pas comme nous! »

Qu'est-ce à dire? Ex;iste-t-il deux peuples

qui possèdent une conception exac'

tement identique de la vie? Un Méditerranéen

et un Nordique n'ont-ils pas chacun

leur mode de vie bien distinct, voire

' leur propre vie existentielle?

Alors, poussés dans leurs derniers re-

· tranchements, ceux qui, tout en se défendant

d'étre racistes dans les mots, pra'

tiquent la ségrégation dans les faits, répondent

: « Que voulez-vous, on ne peut

se lier d'amitié avec ces gens-là. Ils sont

fai néants, fourbes, sales. voleurs ... »

· LES PLUS PENIBLES BESOGNES ...

Fainéants? Les neuf dixièmes des

400.000 musulmans qui vivent en France

. travaillent. Et les besognes qu'ils accom-

plissent sont les plus pénibles, les plus

mal rémunérées. Ce sont celles dont les

jeunes -Français ne veulent plus se char-

· ger. Ce qui est d'ailleurs parfaitement

normal en raison de la prolongation de

la scolarité et des progrès de la technique.

Mais ce qui est moins normal c'est

foie voi r un certain patronat cantonner

dans ces travaux, qui usent l'homme sans

l'enrichir, de jeunes Nord-Africains

ayant acquis dans nos écoles une culture

semblable à la nôtre et méritant d'être

affectés à des tâches plus adéquates à

leur niveau intellectuel.

CE TUTOIEMENT DESINVOLTE

Fourbes? Ils peuvent donner cette impression

à quiconque, les connaissant superficiellement,

les traite du haut d'une

imaginaire supériorité. Comme tous les

être longtemps opprimés ou méprisés, ils

se ferment dès qu'ils ont l'impression

qu'on attente à leur dignité. Rien ne les

blesse davantage, par exemple que ce

tutoiement, pratiqué à leur égard, avec

par

Pierre RENIER

une déconcertante désinvolture, par trop

de nos compatriotes.

Mais à qui les aborde avec un minimum

de sympathie et de chaleur humaine,

ils ouvrent volontiers leur coeur et

parlent sans détour. Certes, l'Arabe, et

particulièrement l'Algérien, possède une

susceptibilité à fleur de peau, une imagination

prompte, un tel)1pérament ombragéux,

propice aux soudaines fl ambées

de colère et de violence. Mais c'est

un trait commun à tous les peuples méditerranéens.

Pour ma part, après avoir couru le

monde arabe depuis vingt ans, je dirai

simplement ceci : j'ai trouvé, dans des

moments difficiles, plus de gratitude,

plus d'aide agissante, plus de charité

vraie chez bien des musulmans que chez

certains chrétiens de ma connaissance.

SI NOUS VIVIONS COMME EU.X ...

Sales? En raison de leur condition

économique et sociale, la plupart des

Nord-Africains logent; soit dans des baraquements

trop souVient privés de toute

installation sanitaire, soit dans des chambres

misérables (q\1i rapportent, en

moyenne, de 15 à 2fooo fr. par mois à

leurs heureux propriétaires !) où il faut,

dans la majorité des cas, aller puiser

l'eau sur le palier. Vivant en célibataires,

fourbus par leur travail quotidien,

il leur est difficile d'être toujours tirés

à quatre épingles. Mais je ne connais

pas un ouvrier nord-africain qui n'aille,

au moins une fois par semaine, prendre

sa douche. Et si nous étions plongés

dans les mêmes conditions d'existence,

pouvons-nous assurer que nous nous

tiendrions avec autant de dignité qu'eux?

POURCENTAGES SIGNIFICATIFS

Voleurs? Bien sûr qu'il en existe, chez

eux comme partout. D'autant plus que

la pauvreté finit toujours par engendrer

parfois la lassitude. Dans une société inhumaine,

la mendicité ou le vol sont trop

souvent les seuls recours d'une âme en

désarroi. Mais, si les musulmans travail-

ET DES HOMMES

lant en France représentent 1 % du chiffre

de la population, ils ne comptent que

pour 0 ,63 % de la délinquence. Concluez.

C'est pourquoi je trouve, comme l'auteur

de la « Lettre d'un Algérien », abusive

et presque criminelle cette tendance

d'une certaine presse à attribuer automatiquement

vols et agressions à « des

auteurs inconnus, de type nord-africain

».

DES LEGENDES

QUI ONT LA VIE DURE

Ainsi, toutes ces légendes colportées

sur les Algériens, toutes ces tares qu'on

leur impute, ne résistent pas à un examen

objectif, Si l'on en recherche l'origine,

on s'aperçoit qu'elles furent introduites,

dès les débuts de la colonisation,

par des militaires, des fonctionnaires,

des colons qui, de retour en France,

exhalaient leur rancoeur contre des populations

dont ils n'avaient cherché à

comprendre ni les moeurs ni le rythme

de vie et tenta ient de justifier de la sorte

leur injustifiable complexe de supériorité.

Le malheur est que ces légendes et ce

complexe de supériorité, pieusement

transmis à travers les génératiot:ls, ont

la vie dure. Même (je serais tenté de

dire : surtout) dans les milieux les plus

simples. De là naquit ce climat psychologique

dont le Nord-Africain, mêJ11e

Illstallé sur notre s_ol depuis longt emps,

pâtit dans sa vie économique comme

dans ses rapports sociaux.

Certes, la plupart des Français se regimbent

quand on leur reproche leur racisme

latent. Mais quel autre nom donner

à cette suspicion sans fondement, à

cet éloignement sans base rationnelle

qui, même après plus d'un siècle de cohabitation,

fait des Nord-Africains des

êtres à part dont, si l'on peut dire qu'ils

sont tolérés, on ne peut affirmer qu'ils

soient acceptés par 'la plupart de nos

compatriotes!

Malheureusement, l'opinion publique,

intoxiquée par une propagande insidieusement

raciste, non seulement se désintéresse

de ces problèmes, mais les regarde

avec hostilité. Trop de nos compatriotes

ont cette réaction simpliste :

« Pourquoi s'occuper de ces bicots? Ils

ne seront jamais comme nous! Qu'ils

rentrent chez eux! »

DES HOMMES COMME NOUS ...

C'est contre cela qu'il faut lutter sans

relâche. D'abord parce que ces « bicots

», ces « ratons », sont des hommes

comme nous, souvent meilleurs que beaucoup

d'entre nous et que nous n'avons

le droit ni de les humilier ni de les abandonner.

Seuls les imbéciles peuvent se

permettre d'être racistes.

Ensuite, que nous le voulions ou non,'

la France aura besoin, pendant de longues

années encQTe de main-d'oeuvre algérienne

tandis que l'Algérie, quel q~e

soit son destin, devra exporter sous peine

d'asphyxie, de nombreux travailleurs.

A défaut de générosité, le simple bon

sens nous conseille, dans l'intérêt même

de notre équilibre social, d'intégrer ces

Algériens dans notre vie quotidienne.

Au même titre que tous les étrangers,

s'ils ne nous sont pas identiques, ils sont

nos semblables. Et d'autant plus proches

Qu'ils sont impréKIlés de notre culture.

Sans parler de tous ceux qui furent tués

ou mutilés dans nos guerres.

Enfin - et cela devrait faire réfléchir

les plus enragés des « ultras » - si

nous refusons d'intégrer 400.000 musulmans

dans la société française, à quel

titre pourrons-nous exiger demain l'intégration

de douze cent mille Européens

dans l'Algérie musulmane: Les manifestations

qui ont éclaté sur divers pQints

d'Algérie doivent nous donner à réfléchir.

Le racisme est un boomerang. Ceux

qui ont applaudi - quand ils n'y ont pas

participé - aux « ratonnades ~_sont

mal placés pour protester aujourd'hui

contre le racisme à rebours de certains

musulmans.

Et c'est seulement dans la mesure où

nous-mêmes ayant accepté sans arrièrepensée

la présence des Nord-Africains

sur notre sol et dans nos foyers, aurons

acquis une bonne conscience que nous

aurons le droit de nous élever contre

tous les excès et de protéger nos compatriotes

d'outre-mer contre les conséquences

de leurs erreurs passées. Tâchons

de prendre à notre compte la réplique

d'Antigone : « Je m'attache à

l'Amour et non pas à la Haine ». Car,

nous pouvons en assurer les cyniques, à

longue échéance, l'Amour seul est payant.

0 7 autres voix ...

(SUITE DE LA PAGE 6)

Prix de la Fraternité de bousculer toutes questions

latérales, d'aller droit à la plus brûlante

de toutes. Quitte à signaler ou public d'olltrp~

oeuvres.

Par exemple le témoignage de M. Henri

Alexandre, « CEUX QU'EMPORTE LE TRAIN»

traité par Schwartz-Bort et tant d'outres, l'inépuisable

angoisse de « l'Univers concentrationnaire

».

En évoquant ces temps abominables, l'auteur

nous rappelle que, même alors, toute humanité

n'était pas bannie de ce monde. et son

recit devient acte de foi ,

Une mention rapp.lle également à l'attention

du lecteur l'oeuvre de Michèle Lacrasil,

« SAPOTILLE ET LE SERIN D'ARGILE » (Gallimard).

Ce roman frappait par la nouveauté du sujet

: Un réquisitoire contre le racisme aux Antilles.

Mois oui, dons les « Iles » réputées paradis

de la vie faci le, du soleil, des chansons et

de l'amour ... dons les îles parées par les âmes

sensibles et poétiques d'images de rêve; dons

ces îles qui chatouillent en leur orgueil les

consciences saucieu'ses de la grondeur française;

en ces fameux déportements d'outremer,

sévit un racisme à multiples faces et qui

n'ose pas dire son ' ~am .

Ra cisme des gens d'église (très douces et

très zélées religieuses à l'endroit de l'enfonce

confiée à leurs soins>. Pire : racisme de Nègre

à Nègre. Selon l'int.msité de la disgrâce attachée

à la pigmentat ion des épidermes.

Le principal mérite de Michèle Lacrosil, romancier

fronça is, est d'avoir osé débrider la

ploie.

Avec une grâce, une sensibilité bien féminines,

nuancées de la pudeur dont l'Anti llais

tempère son a rdeur, avec une mesure, une réserve

dont il a été question ici même, avec un

art d'authentique, et bon écrivain, Michè le Lacrosil

a construit son « SAPOTI LLE ».

Ces messages différents, de même que l'oeuvre

collective « Le racisme devant la science

" et le film « Mein Kampf », complètent

heureusement le Dalmarès du Prix de la Fraternité.

Edited by pmat
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