Et quand Hezbollah interdit Fayrouz...

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.. Et quand Hezbollah interdit Fayrouz...

C’est l'autre martyre de la ville sacrée, El-Qods, sublimement chantée par la grande diva libanaise Fayrouz.

Cette dernière, qui a fêté ses 82 ans cette année, est elle-même une icône sacralisée dont la sublime voix a porté le destin déchiré du Liban. A son propos, un fait qui parait majeur et qui passe pourtant totalement inaperçu est l’interdiction par le Hezbollah des chansons de Fayrouz au sein de l’Université libanaise. C’est ce que révèle le site libanais de gauche libérale Al-Modon. Comment ne pas être sidéré par cette nouvelle ? Etre arrivé à un moment où au Liban qu’elle incarne, on interdise Fayrouz ! Difficilement pensable ! Le fait, pour considérable qu’il soit, n’est cependant rien à côté du phénomène dont il est le symptôme et le sinistre présage.

La prégnance de l’islamisme dans ce pays dont le multi-confessionnalisme natal, si j'ose dire, a certes toujours été source de tension, est importante au point que le Liban peut glisser vers le statut de République islamique sans même que l’on s’en aperçoive.

Sans pour autant être spectaculaire, le processus a commencé depuis un bon moment. Le fait est que même les observateurs qui ont constaté le phénomène l’excusent d’une certaine manière pour une raison qui semble supérieure car le Hezbollah incarne quelque part la résistance. Or, visiblement, le Hezbollah ne donne rien sans contrepartie. Le revers de cette résistance est l’extension d’une islamisation, non pas sur le modèle iranien où le totalitarisme islamiste est imposé par le haut, mais comme par capillarité, par le bas. C’est-à-dire par un maillage de la société «à travers des associations islamiques et des réseaux financiers qui s’épaulent pour imposer l’application de la Charia». (Al-Modon).

Ainsi, les groupes islamistes sont-ils parvenus à interdire le chant profane dont celui de Fayrouz en contradiction avec la loi officielle du pays. Mais ce n’est pas tout. Mille faits de ce genre tissent la trame qui fera qu’un jour, on puisse se réveiller dans une république islamique.

D’autres exemples, anodins d’apparence ? Les groupes de pression islamistes usent de tous les moyens pour interdire les magasins de vente d’alcool pourtant autorisée par la loi officielle. La Charia est en train d’être imposée de facto par les contraintes tyranniques des groupes islamistes qui menacent le modèle libanais. S’ils arrivaient à boucler leur objectif en imposant par le haut la religiosité en donnée politique ce sera la fin du dernier espace où les religions monothéistes ont pu coexister, fût-ce dans le conflit.

Entre Friedman et le Hezbollah, que tout sépare évidemment, il y a pourtant au moins un point commun. L’un et l’autre interdiraient Fayrouz. Pas pour les mêmes raisons, évidemment.

A. M.

Par Arezki Metref

arezkimetref@free.fr