SOLAS 79 Posted June 7, 2021 Partager Posted June 7, 2021 Les archives de la révolution algérienne rassemblées et commentées par Mohammed Harbi postface de Charles-Robert Ageron Introduction Quand on aborde l’histoire de ta révolution algérienne, tout devient d ’une extrême complexité. Chargée de passions en France, elle a été sujette, en Algérie, aux interprétations tendancieuses de tous ceux qui varient l’utiliser à leur profit. M algré les nombreux travaux qui lui ont été consacrés, cette histoire reste donc lacunaire et peu comprise. Certes des facteurs objectifs y contribuent. L e nationalisme révolutionnaire s ’est forgé dans la clandestinité et s ’est développé dans le contexte d ’une guerre inégale et meurtrière. Ces conditions se prêtent plus à la propagande qu’à la diffusion d ’une information aisément contrôlable. Par ailleurs, la diversité des expériences, des form ations et des orientations des leaders du mouvement national ne facilite pas l’interprétation des positions de leurs organisations. Enfin le nationalisme a souvent considéré la dissimulation comme une arme tactique légitime à l ’égard d ’ennemis puissants ou d ’alliés chancelants. L ‘occultation et la déformation intentionnelle des fa its n ’épargnaient pas les acteurs eux-mêmes. Peu de militants algériens peuvent se vanter d ’avoir toujours fa it leurs choix en connaissance de cause. Peut-on éclairer une scène où règne la confusion sans en fin ir avec le culte du secret et la censure, forcée ou volontaire, que chacun s ’impose ? Evidemment non. La publication de ces archives se veut donc une réponse à cette question. On trouvera là des écrits de toutes les composantes du mouvement national. C ’est que l’histoire de la révolution algérienne ne se confond pas, quoiqu’on en dise, avec celte du FLN. Il est certes légitime de considérer te triomphe du FLN comme la seule vote alors possible pour l’Algérie. M ais si l’on ne veut pas tom ber dans te fatalism e historique, il est nécessaire de prendre en compte toutes tes virtualités inhérentes au processus historique et de jauger tes opacités non déployées ou gaspillées. 10 INTRODUCTION D ’où l ’intérêt de l’étude des alternatives proposées p a r le MNA de M essali H adj et le P arti communiste algérien. J ’ai utilisé une partie de ces archives à l ’occasion de mes travaux star le FLN, en particulier dans mon ouvrage Le FLN, mirage et réalité >. L ’autre m ‘était parvenue trop tard pou r être exploitée. Sa lecture je tte un éclairage nouveau sur la tragédie du M NA, une tragédie qui, contrairement à ce que beaucoup pensent, continue à avoir des effets, ne serait-ce que par lesilence ou l’ignorance qui l’entourent. L e passé, en Algérie, doit redevenir le patrim oine de chacun. Privé de mémoire, un peuple peu t errer longtemps dans les ténèbres. Pour qu’une réflexion collective éclaire les problèm es actuels de l ’Algérie et soit éclairée par eux un préalable est requis : l’accès de tous à l’information. L ’histoire, on lésait, est une reconstruction. Les mêmes matériaux peuvent donna' naissance à des interprétations différentes. Les archives de la révolution algérienne ne doivent pas re sta le m onopole de gardiens jaloux, hommes du pouvoir ou opposants, qui gèrent le passé sans que personne ne soit en mesure de les contesta. La confrontation des idées et des expériences et la form ation des opinions politiques ne peuvent qu’y gagner. Sans cela, il n ’est pas de progrès réels et irréversibles. Quiconque s ’intéresse à une véritable libération sociale ne peut s ’accommoder des mythologies héroïques et des récits moralisateurs que l’on sert à un peuple désorienté et meurtri. Il ne fa it pas de doute que les considérations de pouvoir entravent la recherche de la vérité historique. Or, l’Algérie n ’a aucun intérêt à voir s ’organisa l ’ignorance. L ’intelligence des problèm es qu’eut à affronter le mouvement national, et des crises successives qui perturbèrent son évolution, est indispensable. Un livre d ’histoire contemporaine est nécessairement lu par ceux-là mêmes qui en ont vécu les péripéties. Or, ces acteurs historiques, souvent hommes de pouvoir, ont à l’égard d ’une histoire objective une attitude ambiguë, caractéristique de leur vision politique. Ils relèvent tel ou tri détail qui leur paraissent hypothéqua l’ensemble mais refusent le débat public dans toute son ampleur et dans ses implications. En même temps, ils sont persuadés que l’histoire étant toujours en cours, il n’est pas bon de la raconter, avant d ’en connaître la fin . M ais précisément n ’est-ce pas un des rôles des historiens de l’immédiat que de perm ettre aux acteurs de « faire le poin t » et de récupéra par ta réflexion et la raison ce qu’ils ont produit par la passion et parfois l’aveuglement ? Il ne s ’agit pas de distrib u a blâmes ou éloges mais de rendre intelligible un devenir social que l’action quotidienne et les affrontements tendent à obscurcir. Cet ouvrage n ’est pas un choix de textes. Je rends publics ici tous les documents que j ’ai pu rassembler. L ’absence de témoignage enregistrant l’activité autonome des masses ne m ’est donc pas imputable. Si l’enregistrement documentaire des qu ations qui nous intéressent le plus (attitude u LES ARCHIVES DE LA REVOLUTION ALGERIENNE des sim ples m ilitants et des masses face à la direction du FLN, niveau de conscience politique, aspirations des groupes sociauxj fa it défaut, c ’est que la vision unitaire de la société est imposée à tous et que les positions non conform istes sont perçues en Algérie comme relevant de l ’anarchie. La prem ière partie du recueil porte sur la préparation de l’insurrection et la scission du MTLD. J ’en regrette la minceur. L ’attention des historiens a été surtout concentrée sur la période 1954-1962. Or, plus on étudie l’histoire contemporaine de l’Algérie, plus on se rend com pte de l’importance décisive des années qui ont précédé le 1er novembre 1954. Il est tem ps d ’en fin ir avec les exégèses discutables qui fo n t d ’une période d ’accumulation des forces une ère de « jeux stériles » et de « faillites des partis ». La seconde partie qui porte sur la révolution armée est plus homogène. Elle se prêtait mieux à une présentation par groupe de textes, et non plus texte par texte comme dans la première partie. En définitive, la méthode nous a été dictée par la matière elle-même. Si nous n ‘avons pas adopté l’ordre chronologique, c’est qu’il ne nous paraissait pas indispensable à la lecture des documents. L ’ouvrage se compose dans sa quasi-totalité d ’inédits. Nous avons cependant retenu quelques documents déjà publiés en raison de leur importance. L e lecteur doit pouvoir s ’y référer. Ce sont les positions du Com ité central contre Messali, la déclaration du FLN en date du 31 octobre, des articles et des tracts de l’année 1955-1956 occultés depuis le ralliement de l’UDMA et des centralistes, etc. N otre but n’était pas défaire une édition critique. Nous nous sommes contentés de situer les documents et de les annoter pour en rendre la lecture plus msée. Quelques textes de M essali ont posé des problèm es particuliers. Il a fallu parfois procéder à des coupes mineures pour éviter les répétitions. Les titres sont toujours ceux des documents, sauf pour quelques-uns où il n’y en avait pas. Dans ce cas nous avons mis des titres purem ent explicatifs. Pour bien distinguer les notes incluses dans les textes originaux de celles que nous avons ajoutées pour éclaira1 ceux-ci, les premières, fo rt peu nombreuses d ’ailleurs, sont indiquées à l’aide d ’un * les secondes sont numérotées. B nous fau t, enfin, rem ercia tous ceux qui ont bien voulu nous céder les archives en leur possession aux fin s de publication. Que la plupart aient voulu garda l’anonymat, le lecteur le comprendra aisément. M o h a m m e d Ha r b i l. les-archives-de-la-revolution-a-Inconnue.pdf1_.pdf Citer Link to post Share on other sites
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