SOLAS 79 Posted March 13, 2022 Partager Posted March 13, 2022 L’Espagne se rêve en « hub » pour l’entrée, le stockage et la distribution de gaz en Europe madrid correspondante A lors que l’Europe cherche à réduire sa dépendance au gaz russe, l’Espagne entend se positionner en « hub » stratégique permettant de diversifier les sources d’approvisionnement du continent. « Nous pouvons être une alternative au gaz russe », insistaiton au ministère des affaires étrangères, dès le début du mois de février, avant même l’invasion en Ukraine. L’idée, depuis, a fait son chemin. « Avec sa grande capacité énergétique et sa grande expérience dans les énergies renouvelables, l’Espagne peut et va jouer un rôle important pour approvisionner l’Europe, a confirmé la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, à Madrid, le 5 mars. Et, pour cela, nous devons travailler dans les interconnexions entre la péninsule Ibérique et le reste de l’Union européenne [UE]. » « Erreur stratégique » Sur la table, un dossier que l’on croyait définitivement enterré a été ressuscité : le MidCat. Lancé par l’Espagne, le Portugal et la France en 2003, ce projet de gazoduc traversant les Pyrénées entre la Catalogne et le sudouest de l’Hexagone devait permettre de relier les réseaux espagnols et portugais au réseau européen et aider à désenclaver la péninsule Ibérique, véritable « île énergétique », qui compte moins de 5 % d’interconnexions – loin des 15 % demandés par l’Europe. Avec un coût estimé à 400 millions d’euros dans sa première phase de développement, l’infrastructure avait même figuré un temps parmi les infrastructures prioritaires de l’UE, avant d’être abandonnée en 2019, sur fond de manifestations d’écologistes. « Ne pas faire aboutir le MidCat a été une erreur stratégique, regrette l’ancien ministre des affaires étrangères espagnol (de 2011 à 2016) José Manuel GarciaMargallo. Avec ses autres gazoducs et ses usines de regazéification, l’Espagne aurait pu permettre une véritable alternative au gaz russe. » Mais une étude commandée par la Commission européenne estimait que le gazoduc ne serait ni rentable ni nécessaire. Faute de consensus sur la répartition des coûts et d’intérêt côté français, le projet a finalement été enterré, en 2019, par la Commission de régulation de l’énergie (CRE). Laquelle remettait en question son intérêt stratégique… Celuici, à présent, ne fait guère de doutes et les Espagnols, déjà déçus à l’époque, se lamentent de cette occasion perdue. Le royaume, en effet, ne manque pas d’atouts. Il est relié à l’Algérie par le gazoduc sousmarin Medgaz, d’une capacité de 10 milliards de mètres cubes par an. Et, jusqu’à sa fermeture, le 1er novembre 2021, après une crise entre l’Algérie et le Maroc, il l’était aussi par le gazoduc MaghrebEurope. Afin d’augmenter les flux, le gouvernement espagnol ne cesse de courtiser Alger : dimanche 6 mars, le premier ministre socialiste, Pedro Sanchez, a encore appelé le président algérien, Abdelmadjid Tebboune. L’Espagne compte aussi six usines de regazéification de gaz naturel liquéfié (GNL), représentant 27 % des capacités totales de l’UE et le RoyaumeUni inclus, soit 60 milliards de mètres cubes par an. Ces terminaux lui permettent d’importer par méthaniers du gaz provenant de quatorze pays – principalement des EtatsUnis, mais aussi de pays d’Afrique subsaharienne et du Golfe, alors que le gaz russe représente moins de 10 % de ses importations. Or, ils ne sont utilisés qu’à la moitié de leur capacité. Enfin, l’Espagne est aussi le pays d’Europe ayant les plus grandes capacités de stockage de GNL (35 % du total), devant le RoyaumeUni (22 %) et la France (14 %), selon l’association Gas Infrastructure Europe (GIE), qui regroupe les opérateurs de 27 pays. Cependant, pour faire transiter ce gaz dans le reste de l’Europe et mettre ainsi à profit les infrastructures espagnoles, le pays ne compte que deux gazoducs. A Larrau, en Navarre, et à Irun, au Pays basque, ils ne permettent que le passage de 8 milliards de mètres cubes par an vers la France. Depuis la dernière semaine de février, ces deux gazoducs envoient en moyenne 40 gigawattheures, chaque jour, vers l’Hexagone, une quantité limitée, mais significative de la volonté de l’Espagne de contribuer à une solution. Ses terminaux gaziers, en particulier celui de Bilbao, stockent par ailleurs du GNL destiné à être, ensuite, réparti dans d’autres pays d’Europe. « L’Europe doit le financer » La crise énergétique provoquée par la guerre en Ukraine peutelle à présent ressusciter le projet MidCat ? Si le ministre des affaires étrangères, José Manuel Albares, plaide en ce sens, la ministre de la transition écologique, Teresa Ribera, tempère. « Cela ne doit pas finir dans une voie sans issue. Il est important qu’il y ait une connexion adéquate en France », atelle expliqué, mardi 8 mars, en conseil des ministres. Pour la ministre, une telle infrastructure devrait être financée « comme un projet d’intérêt européen, pas par les utilisateurs espagnols », puisque son objectif principal est la sécurité de l’approvisionnement des pays du nord et de l’est de l’Europe. L’infrastructure devrait avoir des caractéristiques techniques qui « permettent le transport de biométhane et autres biogaz, et, dans un avenir proche, d’hydrogène renouvelable, afin d’assurer sa viabilité commerciale », a souligné Mme Ribera. Avec 6,9 milliards d’euros des fonds de relance européens pour développer l’hydrogène vert, l’Espagne pourrait utiliser, à l’avenir, le MidCat pour exporter son surplus de production. Car il est impossible que cette infrastructure apporte une solution à court terme : Mme Ribera a rappelé que sa construction prendrait, au mieux, « cinq à six ans ». sandrine morel Citer Link to post Share on other sites
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