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Les soldats américains privés de blogs


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Les autorités militaires ont décidé de mieux surveiller les écrits émanant des troupes déployées en Irak. Une réglementation qui risque de creuser davantage le fossé entre l'armée et les civils, estime le magazine en ligne Slate.

 

Le mois dernier, l'armée de terre a mis en place de nouvelles règles pour mieux surveiller le contenu des lettres, courriels, blogs et articles rédigés par le personnel militaire. Tous ces textes doivent désormais obtenir une autorisation de sécurité avant d'être rendus publics. Pour justifier cette nouvelle réglementation, l'armée cite des rapports affirmant qu'Al-Qaida et d'autres groupes terroristes écument Internet en quête d'informations sur les méthodes de combat des unités américaines sur le terrain.

 

Mais nous ne devrions pas oublier que les blogs, articles et courriels des militaires ont contribué à combler le fossé grandissant qui sépare les civils de l'armée américaine, et qu'ils ont même apporté leur pierre à l'effort de guerre.

 

Quelque 2,5 millions d'Américains portent aujourd'hui l'uniforme, soit à peine 0,84 % de la population et 2,83 % de la population en âge de servir. De même, les anciens combattants sont de moins en moins nombreux dans la société américaine, car les générations qui ont fait la Seconde Guerre mondiale, la Corée et le Vietnam disparaissent peu à peu. Le recensement de 1980 dénombrait 28,4 millions d'anciens combattants. Aujourd'hui, ils ne sont plus que 24,5 millions. Or ces bouleversements démographiques ont un impact profond : la plupart des Américains n'ont que peu ou pas de contacts directs avec l'armée.

 

C'est pourquoi les blogs, les courriels et autres articles écrits par des soldats au front permettent aux Américains d'avoir accès à des opinions qui, sinon, leur échapperaient. Les citoyens qui se préoccupent de la guerre peuvent en apprendre beaucoup grâce à la couverture exhaustive des médias. Mais ces récits à la troisième personne ne parviennent tout simplement pas à transmettre le sentiment viscéral d'immédiateté que l'on retrouve dans la correspondance ou le blog d'un soldat.

 

Il est d'autant plus essentiel d'entendre ces voix que l'ensemble du public est déconnecté de l'effort de guerre.

 

L'opinion des soldats peut également parfois permettre à la machine militaire de mieux fonctionner. Certes, les militaires ont besoin de discipline, mais les mesures qu'elle prend pour faire taire les dissensions vont parfois trop loin. En Irak, où j'ai servi l'an dernier, j'ai vu la hiérarchie militaire conspirer pour trafiquer des rapports jugés trop négatifs ou pessimistes, pour empêcher ces rapports de remonter la chaîne de commandement, ou encore pour réduire au silence certains avis avant qu'ils ne parviennent aux généraux à Bagdad.

 

Les nouvelles réglementations de l'armée de terre vont logiquement neutraliser toute divergence d'opinion, ainsi que les multiples articles de journaux et débats spécialisés écrits par des militaires sur la guerre et qui ont permis au public d'en savoir plus. Cette politique réduit le débat d'idées en empêchant les civils de prendre part à des discussions avec les militaires sur la stratégie et la tactique.

 

Ce sont des règles d'une rare myopie, en particulier dans le cadre de la lutte anti-insurrectionnelle que nous menons en Irak, où certaines des meilleures idées peuvent venir d'universitaires ou d'employés civils travaillant dans des ministères comme le département d'Etat.

 

Philip Carter

Slate

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