Clouseau 899 Posted May 29, 2007 Partager Posted May 29, 2007 Gidéon Lévy publié le mardi 29 mai 2007 Afrique du Sud : rencontre de Gideon Levy (Haaretz) avec Ronnie Kasrils, ancien combattant juif contre l'Apartheid. Il dit que l'occupation israélienne est pire que l'Apartheid. Palestine : c'est pire que l'Apartheid d'Afrique du Sud « L'occupation me rappelle les jours les plus sombres de l'Apartheid, mais on n'a jamais vu des tanks et des avions tirer sur la population civile. C'est une monstruosité que je n'avais jamais vue auparavant... Ce que j'essaie de dire : ce n'est pas les juifs, c'est le sionisme qui fait cela. Donc j'ai décidé de me lever et de parler. J'ai trouvé cela dans la tradition juive : ouvrir la bouche, au nom de sa conscience. » Image du film Matzpen. Pleure, pays bien-aimé Pretoria, Afrique du sud - C'était comme si on était au cinéma. Seulement là on voyait une photo inerte qui se réveillait soudain à la vie. Nous étions debout au musée de la mémoire de Soweto, prés d'une photo d'un garçon mort entourés d'autres enfants, et notre guide Antoinette nous en parlait. Antoinette nous a dit que la jeune fille sur la photo c'était elle. La photo est à l'entrée du musée, construite pour commémorer le combat des noirs contre l'Apartheid qui a commencé ici. De l'autre côté il y a la petite hutte de Nelson Mandela, à proximité la maison de Desmond Tutu, et en bas de la rue l'actuelle maison de Winnie Mandela. La photo nous était étonnement familière. Nous étions 4 : le parlementaire Ran Cohen (Meretz), Riyad Mansour, l'ambassadeur palestinien auprès des Nations unies, Diana Buttu, ex-conseillère juridique auprès de l'OLP et moi-même. Nous faisions tous les mêmes associations. Hector c'est Mohammed Dura, les soldats blancs tirant sur des enfants c'est nous (les Israéliens, ndlt). Evidence que du temps s'était écoulé. Antoinette, la jeune fille de la photo est maintenant une femme fin quarantaine. Son frère aurait 44 ans mais une balle du fusil d'un policier blanc lui a enlevé la possibilité d'être le témoin du miracle qui a fait que le régime cruel raciste s'est effondré. C'était une autre conférence de l'ONU sur la paix avec les Palestiniens, mais cette fois elle se tenait dans un endroit particulièrement chargé. Nous étions seulement deux Israéliens présents, mais les cartes de visite que j'ai ramassées étaient plutôt variées : des ambassadeurs arabes et africains, l'ancien ministre des Affaires étrangères égyptien, des représentants de pays musulmans et des diplomates en poste à Pretoria. L'ambassadeur syrien a souri et n'a pas offert sa carte de visite, l'ambassadeur de Libye non plus. Mais ils nous ont écouté attentivement. Le nouveau régime a été positif pour l'Afrique du Sud, aucun camp de réfugiés palestiniens n'est aussi attractif que Soweto 2007. Mais pas loin de là, il y a un bidonville appelé Alexandra et ce qu'on y voit est pire que dans n'importe quel camp de réfugiés palestiniens que nous avons vus. C'est là que les noirs sud africains qui n'ont pu s'extirper de la pauvreté vivent, ensemble avec des réfugiés du Zimbabwe voisin. Il y a moins d'un km séparant l'Alexandra pauvre du quartier luxueux de Johannesburg appelé Sandton. Là, derrière les clôtures électriques et les gardes du corps personnels se cachent les riches de la ville - beaucoup d'entre eux, des juifs et un bon nombre d'ex-Israéliens. Le shabbat nous avons mangé du cholent. Vendredi soir nous avons dîné avec un ancien israélien de Nahalal. On est allé en voiture jusqu'à Alexandra avec un type originellement de Tivon, qui vit ici depuis 30 ans et possède une vaste entreprise agricole qui emploie 1800 travailleurs noirs qui gagnent 2$ de l'heure. Impossible de ne pas admirer ce qui s'est passé sur cette terre de lutte depuis que le joug de la tyrannie blanche a été levé. Pas en mon nom Lors du buffet de la conférence, Ronnie Kasrils, le ministre sud africain pour les Services de renseignement, s'est précipité pour occuper un siège auprès de nous. Kasrils, un juif, n'a jamais été en Israël (où il a de la famille) jusqu'à ce qu'il visite les territoires (occupés ndlt) en début de mois, quand il a invité le premier ministre palestinien Ismail Haniyeh à venir dans son pays. Il a alors fait un voyage express à Tel Aviv, vu la place Rabin et mangé du poisson à Jaffa. Il a reconnu que c'était « la plus agréable soirée que j'ai eu ». Tom Segev a écrit de lui que « c'est le type avec qui je n'aimerais pas être coincé dans un ascenseur », mais je serais très heureux de l'être, à l'intérieur ou à l'extérieur. C'est un juif en conflit avec son peuple, peut être aussi avec son identité - un combattant de la liberté courageux et communiste, qui a rejoint la race opprimée dans son combat, a été exilé de son pays pendant 27 ans et est maintenant ministre. Fils de juifs lithuaniens, qui a fait sa bar mitzva et appartenu aux mouvements de jeunesse juive, Kasrils est l'un des personnages les plus fascinants originaires de la communauté juive - qui actuellement l'accuse complètement. Il brandit sa judaïté ouvertement, peut être avec défiance, même lorsqu'il a fait une visite non officielle récemment en Iran et en Syrie. Il a autrefois fondé le mouvement « pas en notre nom » pour se dissocier des injustices commises par Israël dans les territoires. (occupés, ndlt). Ronnie Kasrils hait l'occupation israélienne. Quand nous discutons, il dit que l'occupation israélienne est pire que l'Apartheid. Les blancs n'ont jamais bombardé les quartiers noirs avec des tanks et à l'artillerie. 1ére partie Citer Link to post Share on other sites
Clouseau 899 Posted May 29, 2007 Author Partager Posted May 29, 2007 Suite et fin 2éme partie Tout comme les pogroms Si cet homme chaleureux, de 69 ans est protégé personnellement, cette protection est invisible. Nous nous sommes assis dans une pièce vacante dans un immeuble du campus de l'Université de Pretoria et nous avons parlé. « Vous êtes un Israélien et je suis un Sud-Africain » a-t-il fait remarqué immédiatement, comme s'il voulait nier toute identité commune. « Je suis confiant que la boucle sera bouclée un jour et que les gens comprendront que je ne suis pas anti-juif ou anti-Israélien... Cela me fait vraiment de la peine en tant que juif que dans ce pays une telle hostilité se soit développée contre Israël à cause des mauvais traitements infligés aux palestiniens. » « Quand nous avons vu à la TV le drame qui se jouait dans votre pays, les images d'oppression des méthodes que vous utilisez envers les Palestiniens, les déracinements d'arbres, les tanks entrant dans Jenin, et la vieille femme pleurant sur les ruines de sa maison démolie et criant "les juifs, les juifs", c'est tout à fait comme ce que ma grand-mère avait l'habitude de me raconter sur les pogroms. "Les Cosaques arrivent, les cosaques arrivent". Ce que j'essaie de dire : ce n'est pas les juifs, c'est le sionisme qui fait cela. Donc j'ai décidé de me lever et de parler. J'ai trouvé cela dans la tradition juive : ouvrir la bouche, au nom de sa conscience. » « L'homme qui m'a salué quand je suis rentré en Afrique du sud après des années d'exil c'était le rabbin Cyril Harris... Il m'a donné une kippa rouge dédicacée : au combattant de la liberté. Quand j'ai commencé à exprimer ma critique d'Israël, je pensais que les juifs dénonceraient Ariel Sharon, mais je me suis rendu compte que j'étais naïf. J'ai été effaré de voir que pour la communauté juive ici cela n'avait pas d'importance qui était au pouvoir en Israël, et à quel point la politique envers les Palestinien était extrémiste... Ils soutiennent aveuglément tout gouvernement. Le rabbin Harris est devenu mon ennemi. Il m'a appelé un juif marginal et ma réponse a été : nous étions les seuls a nous dresser contre l'Apartheid, et maintenant nous sommes la minorité contrez l'injustice. » « Quand j'ai visité les territoires (occupés, ndlt) j'ai traversé Israël et j'ai vu les forêts qui couvrent les ruines des villages palestiniens. Comme ancien ministre des forêts, cela m'a vraiment frappé. Je suis aussi allé dans quelques colonies. C'était dément. Des jeunes américains ont craché sur le drapeau qui se trouvait sur ma voiture. L'occupation me rappelle les jours les plus sombres de l'Apartheid, mais nous n'avions jamais vu des tanks et des avions tirer sur la population civile. C'est une monstruosité que je n'avais jamais vue auparavant. Le mur que vous avez construit, les check points et les routes pour les juifs seulement - cela donne mal à l'estomac même pour quelqu'un qui a grandi sous le régime d'Apartheid. C'est des centaines de fois pire. » « Nous savons de notre propre expérience que l'oppression motive la résistance et que plus la répression est sauvage, plus la résistance s'endurcit. A un certain moment vous pensez que la répression fonctionne et que vous contrôlez l'autre peuple, emprisonnant ses dirigeants et activistes, mais la résistance triomphera à la fin. » « Nous avons vu l'entrée de Qalqilyah, le mur, les gens debout pendant des heures en ligne aux check points. C'est un magnifique pays, j'aime les paysages, mais je sais que c'est suffisamment grand pour contenir plus de monde. Israël s'est développé de manière impressionnante. Mais combien ce serait impressionnant si vous trouviez une solution juste. Pour moi cela n'a pas d'importance si c'est deux Etats ou un - c'est à vous Israéliens et Palestiniens de décider. » « J'ai pris le café avec le commandant du check-point d'Erez. Cela m'a rappelé la prison centrale de Pretoria, un endroit que j'ai visité à maintes reprises. Et c'était tellement horrible de traverser cela pour pouvoir rentrer dans Gaza. D'abord j'ai dit que je ne voulais pas parler avec l'homme au check point, puis j'ai décidé que c'était stupide. Les Israéliens ont en fait été très gentils avec moi. » « Qu'est ce que le sionisme pour moi ? Quand j'avais 10 ans cela voulait dire sécurité et un foyer national pour les juifs. J'ai agité le drapeau israélien à ma bar mitzva et j'étais très fier de mon judaïsme. Le premier livre que j'ai reçu pour ma bar mitzva c'était « la Révolte » de Menachem Begin. Mon plus grand héros c'était Asher Ginsberg, Ahad Ha'am... Plus tard j'ai commencé à lire non seulement Herzl mais aussi Ilan Pappe, Benny Morris et Tom Segev ( historiens) et j'ai commencé à voir 1948 sous un autre jour. J'ai compris que c'était un nettoyage ethnique. » « L'Afrique du Sud m'a changé et a renforcé mon identité sud-africaine. Et puis j'ai commencé à comprendre que le principal problème du sionisme c'est l'exclusivité de l'établissement d'un foyer national et le concept du peuple choisi. Très vite j'ai commencé à m'y opposer. L'établissement d'un foyer national pour les juifs seulement me semblait un parallèle de l'Apartheid. Les dirigeants de l'Apartheid parlaient aussi du peuple choisi. En 1961, le Premier ministre Hendrik Verwoerd a dit qu'Israël c'est comme l'Afrique du Sud. Cela m'a ouvert les yeux. Pendant des années nous étions aussi au courant de la coopération militaire entre Israël et l'Afrique du Sud, une force navale offensive conjointe, des bateaux transportant des missiles, les avions Cheetah, et le grand secret des armes nucléaires. Le Premier ministre Johannes Voerster, qui avait un passé nazi connu, a reçu un accueil de héros de votre part. Cela s'est ajouté à mes sentiments concernant Israël. » « Je suis très conscient de l'Holocauste et de l'antisémitisme, mais mon expérience ici me conduit à la conclusion que toutes les formes de racisme doivent être combattues au moyen d'une lutte commune. J'ai un rêve. Que vous changiez votre aspect, comme cela est arrivé ici, et que le changement viendra. Quand les politiciens tombent d'accord, c'est étonnant comment les gens ordinaires peuvent changer leur manière de penser. Changer la direction et les conditions économiques et vous verrez comme le changement est facile. » Citer Link to post Share on other sites
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