Ode à l'oubli

[bagdadcafé 10]

Je suis née au Pays de Dali; des éléphants dans des mares et des arbres décharnés, balançant leurs membres d'ébène qui craquent et martèlent, sans répit, sans surcis.

 

Une nuit, nuit de parfait clair de lune, un éclair déchira le ciel. La brèche aspira des miettes de vie et j'y fus engloutie, loin, si loin de mon beau pays.

De la sécurité à la peur, de la paix au doute, je me suis retrouvée en terrain ennemi, me débattant contre des ombres, chassant les prédateurs, pour ne pas être leur proie. Difficile de comprendre ce monde, d'en respirer l'essence et de s'en sortir indemne. Des brûlures et des cicatrices, des blessures et des séquelles, en souvenir de chaque combat dont je sortais victorieuse.

 

Mais la bête a failli et baissé sa garde; et les prédateurs se sont élevés. Je n'ai plus rien reconnu, sans repères dans un monde où j'étais déjà perdue.

 

[bagdadcafé 10]

Après un certain temps

 

La lutte avait été longue, les combats violents.

Ils m'avaient laissée sans force, ou presque et je me demandais où trouver l'étincelle qui raviverait ma flamme. Elle avait brillait si fort auparavant, vibrante, brûlante. Elle m'avait poussée plus loin, plus fort, pour briller, vibrer et brûler moi aussi, plus loin et plus fort. Elle avait été ma force et mon espoir, le souvenir étincelant d'un passé plus glorieux et d'un avenir plein de promesses. Le flambeau qui éclairait ce monde terne et acre où je m'étais embourbée.

 

 

Je ne voulais que raviver ma flamme.

C'était une image suranée, un cliché. J'aurai dû me douter qu'elle ne pouvait se réaliser que par une histoire tout aussi cliché.

 

 

 

 

Tu étais là, un soir, juste en face de moi, sans me voir, sans que je ne te voye. Et pourtant, à partir de cet instant, tu étais dans ma tête à chaque seconde; où es-tu ? que fais-tu ? me vois-tu ? me sens-tu prendre possession de ton être comme tu es en train de prendre possession du mien ? Quel était ce sort, quel poison, quel venin ? Quelle folie!

Le jour mon esprit était tien, la nuit, mon esprit était tien! Et j'attendais à chaque instant, de te voir; encore une fois. Cette toute première fois, tu avais plongé ton regard dans le mien et j'avais été saisie, d'un coup, par cet éclair... Ce fameux éclair, qui bien avant, m'avait déjà surpris, alors que je rêvassais, sur le dos d'un éléphant, qui trempait dans une mare, abritée par des branches décharnées... Cet éclair, il était là à nouveau, dans ses yeux! Et peut-être... Peut-être... Peut-être que cet étranger, que je n'avais jamais vu auparavant et avec qui je n'avais échangé que quelques phrases, était juste ce que j'attendais depuis si longtemps. Le moyen de retrouver la paix, de quitter ce monde putride, de retourner chez moi.

[bagdadcafé 10]

Ya rayt ez-zaman yardja3 fina

 

J'avais attendu tout le jour, guettant à ma fenêtre l'instant où tu m'apparaîtrais.

Je m'impatientais, mais j'avais bon espoir; je savais que ce ne serait plus long. Derrière moi, une musique m'entraînait sur des chemins de songes et de soupirs...

 

A mon énième souffle, il y eut un grondement au loin. Mes sens aussitôt en alerte, le rythme de mon coeur s'accéléra alors que ma respiration s'arrêta brusquement. C'est à ce moment que je t'apperçu; mon coeur fit une embardée. Et lentement, très lentement, si lentement que c'en était un délice, tu levas la tête jusqu'à moi, tes yeux cherchèrent les miens pendant un temps et tu me souris. Mon coeur était heureux; mon esprit l'était aussi.

 

Ce ne fut pas beaucoup plus tard que nos routes se croisèrent à nouveau. Tes paroles étaient si douces à entendre, les miennes si simples à prononcer. Tout était clair et limpide. Comment aurait-il pu en être autrement ? Cela ne devait pas s'arrêter; sans doute l'avais-tu senti.

 

Et c'est ainsi que tout s'accéléra. Comme c'était naturel...

[Guest Idée]

Au pays de Dali

 

bagdadcafé, tu nous offres de belles lignes délicatement illustrées d'images et de sons.

Je me fais un plaisir de déposer ici mon merci!:40: