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Le Pakistan & La Dérive


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Jean-Claude Kiefer

Le Pakistan à la dérive

 

C'est dans la discrétion que le Pakistan - l'autre grand État issu du sanglant partage de l'Empire britannique des Indes - célèbre ses soixante ans d'indépendance. Non pas tant à cause du passé fait de trois guerres avec son voisin, de l'interminable conflit du Cachemire ou de la sécession du Bangladesh en 1971, mais par peur de l'avenir.

Au grand désarroi de Washington qui avait cru trouver en lui un allié sûr dans la lutte contre le terrorisme, le général-président Pervez Musharraf, déjà cible de deux attentats ratés, est à bout de souffle. La petite et authentique opposition démocratique ne l'inquiète guère mais la prise, le mois dernier, de la Mosquée rouge d'Islamabad par les fondamentalistes montre que les islamistes deviennent maîtres du pays.

Certes, depuis des années les attentats terroristes sont courants au Pakistan et on n'ignore pas l'influence des religieux extrémistes sur la majorité de la population. Toutefois, par commodité politique, les Etats-Unis et les Occidentaux engagés dans l'Afghanistan voisin feignaient de croire que l'armée contrôlait le pays, à l'exception des zones tribales du Wazaristan. Apparemment, il n'en est rien. Des troubles secouent aussi le Nord, et la grande province du Baloutchistan, voisine de l'Iran et de l'Afghanistan, n'est pas sûre non plus.

Puissance nucléaire, le Pakistan vit dans un extrême dénuement sous des structures rigides qui lui interdisent d'accéder au rang de « pays émergent ». Son Produit intérieur brut par habitant - indice de richesse - est, avec 736 $ voisin de celui de la Mauritanie. Des familles féodales et une riche bourgeoisie accaparent la propriété foncière qui n'a jamais été redistribuée. L'institution militaire domine la vie politique et sociale : le budget de la défense est presque le triple de celui de l'éducation...

Cette armée si favorisée est-elle fiable pour autant ? Après la troupe, le fondamentalisme gagnerait le corps des officiers et les puissants services secrets militaires sont réputés ambigus. Ils auraient « fabriqué » les talibans afghans dans les années 1990 et ces derniers gardent appuis et bases arrières dans les zones tribales qui abriteraient aussi les djihadistes d'al-Qaida. A moins que le double jeu ne soit une constante, ce que soupçonne Washington : le pouvoir, pour se maintenir, donne le change aux Américains et aux tribus, combat des islamistes dans telle région de la frontière afghane en tolérant ou en encourageant d'autres groupes qui opèrent un peu plus loin...

Le Pakistan, le deuxième pays musulman du monde, peut à tout moment basculer dans l'islamisme. Ce serait une vraie catastrophe avec des répercussions que personne n'ose encore envisager.

 

Édition du Mer 15 août 2007

DNA

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