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Architecte réaliste envers l'Algerie, son pays d'origine


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Pourquoi pas l’Algérie ? « À l’époque, cela n’était pas envisageable. Ma femme s’appelle Juliette, et mes enfants sont blonds. À Marrakech, ça ne pose pas de problème. » Outre ces raisons purement personnelles, travailler en Algérie lui semble difficile aujourd’hui. « L’architecture est un art profondément politique, on ne peut pas en faire sans être un minimum engagé. À Alger, on ne respecte pas l’espace public. On mange les trottoirs en plein centre de la capitale. On n’arrive pas à tenir un alignement sur un boulevard. Quand on ne défend pas l’espace public, c’est qu’on ne défend personne. En Algérie, il y a un véritable problème d’urbanisme qui est d’ordre politique. Seul l’État peut le gérer. Or nous avons un État faible, et le pays est dirigé par des vieux. C’est normal que rien ne bouge quand des gens de plus de 70 ans sont à la tête d’une nation. Il faut des dirigeants jeunes pour faire avancer un pays. Sinon que voulez-vous qu’ils aient envie de faire ? Moi, à leur âge, je serai à Bali en train de siroter un jus de coco », ironise-t-il. « De toute façon, l’Algérie a été livrée aux Chinois, et on a été les précurseurs en Afrique. Nous ne sommes plus capables de construire nous-mêmes », lance-t-il.

 

Comme tous ceux qui aiment leur pays mais ont été contraints de le quitter, Rahmouni porte sur celui-ci un regard extrêmement critique. « Aujourd’hui, le projet phare en matière d’architecture, c’est la mosquée d’Alger. C’est le symptôme même d’une société décadente. Ce dont l’Algérie a besoin à l’heure actuelle, c’est d’hôpitaux et d’universités… Vous savez combien d’universités on pourrait construire avec le budget de l’armée algérienne ? Grosso modo, cinq ! » déplore celui qui n’a pas renoncé à sa liberté de ton.

 

« Un électron libre » : c’est d’ailleurs la première image qui vient à l’esprit de Michael Malapert, un ancien collaborateur, quand il pense à Imaad Rahmouni. « Comme toutes les particules élémentaires, il se déplace librement et il est chargé en énergie. » Pour lui, ce qui fait la force d’Imaad, c’est sa capacité à « combiner une pensée de designer et une pensée d’architecte, de passer d’une échelle à une autre sans problème ».

 

Rahmouni n’a pas toujours su qu’il voulait être architecte. « J’étais plutôt du genre algérois nonchalant. Je voulais être marin », confie-t-il. C’est sa mère, professeure d’espagnol aujourd’hui à la retraite, qui l’a aidé à trouver sa vocation. « Elle est d’une grande sensibilité. Elle a su avant moi que j’allais devenir architecte. Quand j’ai eu mon bac, elle m’a dit : “Tu sais, mon fils, je t’ai inscrit à l’école d’architecture”. Et elle a eu raison, j’ai accroché tout de suite… » D’autres personnes qui auraient influé sur sa trajectoire ? « Un oncle, ami de Fernand Pouillon [architecte et urbaniste français qui a conçu des bâtiments publics en France, en Algérie et en Iran, NDLR] et puis Issiakhem, un peintre qui était amoureux du design. »

 

Aujourd’hui, outre construire en Algérie, le rêve d’Imaad Rahmouni est de se voir confier la conception de logements sociaux en France ou au Maroc. Et puis, bien entendu, de s’installer à Bali pour y couler des jours heureux.

 

Jeune Afrique

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