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Les derniers berbères d'Egypte


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"Oui nous parlons le tamazight, oui nous mangeons le couscous, mais nous sommes Égyptiens à 100%". Ainsi se caractérisent les habitants de Siwa, une oasis située à 560 km à l'ouest du Caire et à proximité avec les frontières égypto-libyennes, en plein désert.

 

En quittant la côte Nord de l'Egypte et s'enfonçant dans la route goudronnée dans le désert aride, personne n'a l'impression qu'il va découvrir un trésor de beauté. Puis l'on se retrouve subitement devant une étonnante forteresse qui surplombe une colline. Autour, des maisons faites de "karshif", un mélange de terre et du sel. Le "vieux" Siwa a été à moitié réduit à néant par des pluies diluviennes. La nuit tombée, on se croirait dans la maison de Dracula comme l’on voit au cinéma. Le matin, on ouvre les yeux sur une immense palmeraie.

 

 

Une verdure qui cache le désert derrière

 

On pourrait se croire dans les régions berbères du sud du Maroc et en Algérie. Siwa, qui compte 25 000 habitants, est le point le plus oriental de peuplement berbère (amazigh) et le seul en Égypte, ce qui confère au lieu une singularité toute particulière. Siwa, la berbère Les premiers habitants de Siwa sont venus d'Afrique du Nord il y a 12 000 ans. Ils appartenaient à la tribu "Zanatha". On y trouve aussi des Takrours, originaires des berbères noires comme les Touaregs de Mali et du Niger. Leur premier chantier fût à l’époque la construction de la forteresse de Shali, au centre de l'oasis, pour se protéger des attaques des nomades. Puis ils ont construit le village d'Aghurmi, situé autour du temple d'Oracle, où Alexandre le Grand aurait eu la confirmation qu'il était bien un descendant direct du Dieu Amon. L'oasis était alors coupée du reste du monde. Elle n'avait aucun lien avec l'Egypte pharaonique. Siwa était surtout connu pour être un point de repos des hommes qui, à dos de chameau, convoyaient les marchandises entre l'Afrique du Nord et l'Orient. En l'an 708, les Siwis doivent affronter les Musulmans venant de la péninsule arabe pour conquérir l'Egypte. Il faudra attendre le 12eme siècle pour les voir se convertir à l'Islam. De cette époque date l'apparition des premières tribus arabes autour de l'oasis. En 1926, l'oasis a commencé à s'étendre au-delà de Shali. Suite aux pluies diluviennes de cette année là, les habitants ont commencé à réhabiliter de deux anciens villages et à construire leurs villages actuelles. Jusqu'à 1975, Siwa était totalement isolée, aucun service n'était disponible. Lors de la visite de l'ex-président égyptien Anwar el-Sadate à Siwa cette année là, les Siwis ont demandé la construction d'une route qui les lie à la ville la plus proche, Marsa Matrouh, sur la côte Nord. Cette route a été achevée dix ans plus tard. 57858604_p.pngA partir de ce moment, la vie des Siwis a changé. "Un hôpital, un bureau de poste et d’autres services gouvernementaux ont vu le jour, se souvient Medhat Hweitti, directeur de l’Office de Tourisme à Siwa, cela a amélioré la qualité de la vie des habitants". Cette route a également aidé l'oasis à être plus accessible pour les touristes malgré tout de même 10 heures de route… Puisqu'ils vivent au milieu du désert, on pourrait penser que les Siwis sont des nomades, mais c'est en fait une société agricole de premier degré. L'agriculture est l'activité principale de l'oasis. Les habitants y cultivent des dattes, des olives, des fruits. Les Siwis n'ont jamais été de grands aventuriers du désert. Ils en ont toujours plutôt eu peur. Le Sahara, ils l'ont découvert récemment avec la venue des touristes. "Je l’ai découvert peu à peu il y a dix ans avec mon cousin quand il a acheté son 4X4 et a débuté ses excursions dans le désert qui nous entoure", se souvient Mahmoud Qenawy, un des guides touristiques de Siwa.

 

 

Siwa

 

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Une société tribale

La société siwie a toujours eu sa propre façon de gouverner, bien loin des lois égyptiennes. De façon générale, les habitants se moquent de savoir quand auront lieu les prochaines élections législatives et présidentielles dans leur pays. A Siwa, chaque tribu a un leader, appelé "Cheikh". Celui-ci doit être sage et riche. C’est lui qui gouverne le clan. Un conseil des Sages, formé d’au moins 10 personnes représentant les différentes familles de la tribu, aide le cheikh. Au dessus des cheikhs des tribus, il existait le Conseil des Sages de Siwa (majless al-Ajwad) qui était formé d’un leader et de 40 sages pour gouverner l’oasis. Après l’arrivée des organes gouvernementaux, celui-ci a disparu. Mais, les chefs des tribus ont gardé énormément du poids dans la société siwie, surtout dans le règlement des conflits entre les habitants, grâce au grand respect que leur porte la population. "Maintenant, les verdicts prennent majoritairement la formes d’amandes qui sont, dans la plupart des cas, distribuées aux pauvres de la tribu", note Cheikh Omar Rageh, 43 ans, chef du clan des Awlad Moussa (fils de Moussa). Le cheikh représente sa tribu devant le gouvernement et le juge de première instance lors de conflits commerciaux entre les habitants. La décision du cheikh est définitive. Mais selon cheikh Omar, ce fonctionnement est en train de changer : "Maintenant, en raison de l’éducation, certains ne respectent plus le verdict du cheikh et recourent à la justice civile qui applique la loi sans comprendre la société", regrette-t-il. "Celui qui le fait perd le respect de la tribu". 57858645_p.pngLa société siwie a pu contenir, jusqu'ici, les différentes cultures qui l'ont envahies comme les Romains dans le passé et les bédouins arabes maintenant. Les Siwis ont tellement influencé les bédouins que ces derniers, qui vivent dans l'oasis, parlent le tsiwit (un dialecte tamazight qui comprend des mots arabes du dialecte égyptien) et ont presque les mêmes traditions que les berbères. Ils en ont pratiquement adopté le mode de vie siwi. La famille de Saïd en est l'exemple parfait. La mère est siwie, le père est bédouin, leurs enfants maîtrisent les deux langues, et toute la famille ( 35 personnes !) vit dans une maison typiquement siwie sur deux étages, construite à base d'argile. "Mes enfants et mes petits-enfants ont le visage rude des bédouins avec les yeux verts des berbères", s'amuse le patriarche de 72 ans. Les siwis ont plusieurs points communs avec les berbères, outre la langue et le couscous. L'architecture de leurs anciennes maisons ainsi que les habits traditionnels de la femme ont beaucoup de points communs. Mais ils se considèrent complètement différents des berbères d'Afrique du Nord. Pour eux, ces derniers sont "racistes" vis-à-vis aux Arabes, "alors que les Siwis sont tolérants et peuvent coexister avec l'autre", comme le dit Mahmoud.

 

Suite ici

 

Article écrit par Ahmed Hassan Sami pour la revue Le Courrier de l'Atlas (octobre 2010). Témoignages des femmes : Marion Touboul, Photos : Pauline Beugnies

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Guest jazairia

Époustouflant! surtout le couscous, j'aurais jamais cru que notre coucous se trouve en Egypte et je me demande si le Tsiwit est le même Tamazigtht de chez nous et du Rif Marocain.Merci Admino .

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