Images amateur : l’armée pakistanaise pratique la loi du Talion contre les Taliban

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Exécutions sommaires, tortures, humiliations : plusieurs vidéos diffusées récemment sur Internet donnent à voir la face sombre de l’armée pakistanaise dans sa lutte contre les Taliban.

Ces vidéos auraient été filmées lors de l’assaut, lancé il y a un peu moins d’un an, contre les Taliban de la vallée de Swat. L'une d’elles (ci-dessous) montre notamment l’exécution d’un groupe de six jeunes hommes. Les prisonniers, les mains liées et les yeux bandés, sont alignés puis fusillés par des militaires pakistanais. Après avoir affirmé que ces images étaient bidonnées, l’armée pakistanaise a finalement reconnu à la fin du mois de septembre qu’il s’agissait bien d’images amateur de l’armée pakistanaise et que les coupables allaient être recherchés et punis.

 

ATTENTION, CES IMAGES PEUVENT CHOQUER

 

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Une autre vidéo (ci-dessous) qui, selon des sources citées par le "New York Times", aurait été filmée en mai dernier au nord de Mingora, montre un prisonnier ligoté, traîné au sol et fouetté par des hommes portant l’uniforme de l’armée pakistanaise. Le prisonnier est interrogé sur ses liens présumés avec les Taliban.

 

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Plusieurs autres vidéos du même type, non datées, sont apparues sur Internet récemment, comme par exemple ici et ici.

 

Après la diffusion de ces documents, les États-Unis ont annoncé la coupure de leurs aides financières à différentes unités militaires pakistanaises, au motif que ces dernières avaient gravement porté atteintes aux droits de l’Homme au cours de leurs opérations dans la vallée de Swat.

 

 

L’organisation Human Rights Watch (HRW) a par ailleurs rapporté au département d’État américain qu’elle avait la preuve de plus de 200 exécutions extrajudiciaires perpétrées par l’armée pakistanaise sur des personnes suspectées d’être proches des Taliban.

 

 

L’offensive de l'armée pakistanaise contre le mouvement insurrectionnel avait été lancée le 26 avril 2009 dans trois districts voisins contrôlés par les Taliban : Lower Dir, Buner et Swat. Plusieurs millions de personnes ont été déplacées au cours de ces opérations. Le 30 mai 2009, l’armée a annoncé avoir tué 1 217 Taliban, tout en expliquant avoir tout mis en œuvre pour minimiser les pertes civiles.

 

"C’est comme ça que les choses se règlent, aujourd’hui, dans ces zones de non-droit"

 

 

Tahir Mian Imran travaille dans la communication à Londres.

 

Il faut remettre toutes ces images dans leur contexte. Au Pakistan, le pouvoir judiciaire est très faible et les affaires de terrorisme peuvent mettre des années à être traitées. Les responsables de la tentative d’assassinat contre Pervez Musharraf ont, par exemple, attendu deux ans et demi avant d'être jugés. Et quand le système judiciaire est désastreux, voire non-existant, les sanctions extrajudiciaires deviennent la norme. C’est pour ça que l’armée préfère régler les choses sans passer par la justice, et le gouvernement ferme les yeux. Une autre raison, selon moi, c’est que l’armée craint que, une fois devant les juges, les Taliban ne révèlent leurs liens avec certains officiers.

 

Le fait est que nous sommes en guerre, l’armée est fatiguée de cette situation et les militaires en viennent à avoir un comportement discutable. Bien sûr que c’est condamnable, personne ne devrait avoir le droit de faire de telles choses, mais les militaires pensent qu’ils n’ont plus le choix. Depuis que les Taliban sont installés dans la vallée, c’est une région de non-droit.

 

J’ai parlé avec des gens sur place et, très honnêtement, au moment de l’offensive sur la vallée de Swat, ils étaient contents que l’armée vienne rétablir l’ordre. Avant l’arrivée des Taliban, les habitants menaient une vie heureuse. La vallée de Swat était un endroit touristique où les gens venaient passer leur lune de miel. Et beaucoup d’habitants disent que les Taliban sont devenus une mafia qui leur extorque de l’argent et menace leurs affaires.

 

Sur place, ceux à qui j’ai montré ces vidéos m’ont dit que ce que les Taliban leur avaient fait était bien pire que ce qu’on voit sur ces images. Pour eux, c’est œil pour œil, dent pour dent.

 

"Les militaires vont s’arranger, à l’avenir, pour que personne ne filme leurs exactions"

 

Je pense que, à la suite, du scandale généré par ces vidéos, les militaires vont s’arranger pour que personne ne filme leurs exactions. Mais ces violences risquent de se perpétuer, c’est comme ça que les choses se règlent aujourd’hui dans ces zones de non-droit. Quand on parle aux soldats, ils vous répondent que c’est la guerre. Un général a dit que sa responsabilité, c’est d’en finir avec cette guerre, par tous les moyens."

 

France24