Ladoz 11 Posted November 2, 2010 Partager Posted November 2, 2010 Les stratégies successives pour relancer l’économie algérienne se sont avérées inopérantes jusqu’à présent. Quelles sont les raisons qui empêchent l’Algérie d’émerger ? Par Mourad SAOULI Au moment où la crise financière internationale atteignait son apogée, certains observateurs locaux assuraient que l’économie algérienne était à l’abri de tout impact. Le fait que le système bancaire algérien soit peu connecté aux réseaux financiers internationaux suffisait, selon eux, à étayer leur analyse. Hormis la naïveté de leur affirmation, les auteurs de cette thèse ont omis de prendre en considération les prolongements de la crise financière mondiale aux plans économique et social. Si l’Algérie n’a pas été secouée directement par la crise financière elle-même, elle a néanmoins subi les conséquences de la crise économique qui a suivi, en raison d’une chute de plus de 70 % des cours pétroliers. Comment pouvait-il en être autrement pour un pays mono���exportateur ? À cela près, ces mêmes analystes ont également occulté le fait qu’en réalité, l’économie algérienne est en crise depuis plusieurs décennies et qu’elle ne doit ses rares rémissions qu’à la fluctuation positive des cours du pétrole. Prix du baril. Certes, l’Algérie a profité des hausses exceptionnelles du prix du baril au cours de la dernière décennie – avec un pic de 132,5 dollars en juillet 2008 – pour recouvrer sa souveraineté financière. En effet, sans cette manne, elle n’aurait pas eu la possibilité de rembourser sa dette, de réaliser ses programmes sociaux, de renouveler son arsenal militaire et encore moins de lancer les grands projets d’infrastructures. À elle seule, la construction de l’autoroute est ���ouest a coûté plus de 11 milliards de dollars. Autrement dit, la croissance réalisée au cours de cette même période a été tirée vers le haut par la dépense publique, dans la mesure où l’ensemble des investissements réalisés ont été assumés par les caisses de l’État. Par conséquent, les indicateurs macroéconomiques sont à interpréter avec prudence et discernement. Si elle permet de pallier certaines urgences lorsque les cours sont à la hausse, la trop grande dépendance vis���à���vis des hydrocarbures plombe l’économie algérienne. Elle souligne toute sa fragilité. La croissance économique, la capacité d’épargne de l’État, le budget, la sécurité alimentaire, les ressources en devises et même les salaires sont finalement tributaires des recettes pétrolières, qui représentent plus de 96 % du total des exportations. Parallèlement, l’Algérie doit faire face à des dépenses incompressibles en hausse constante. La rigueur mise en place par l’actuel gouvernement pour équilibrer la balance commerciale a certes permis de mettre fin à certaines dépenses farfelues. Néanmoins, elle se heurte malgré tout à la nécessité de faire face à l’importation de certains produits stratégiques tels que les matières premières, les équipements destinés à l’industrie ou encore les biens alimentaires. Concernant ce dernier volet, l’Algérie n’a pas encore trouvé le moyen d’assurer sa sécurité au plan alimentaire, malgré les efforts consentis pour moderniser le secteur agricole et stimuler l’industrie agroalimentaire. Alors qu’elle a atteint un niveau exceptionnel en 2009, la production de céréales a amorcé un net recul, passant de 61 millions de quintaux à seulement 45 millions. Pour répondre aux besoins du marché, l’Algérie – qui dispose d’un stock de sécurité de deux ans – a importé pas moins de 168 millions de tonnes de céréales entre janvier et août 2010. Les céréales, très prisées par le consommateur algérien, figurent toujours au hit���parade des produits alimentaires de base importés. Au même titre que le lait, le sucre et les huiles. À eux seuls, ces quatre produits représentent 70 % de la facture alimentaire, laquelle s’élève à 3 milliards de dollars pour le premier semestre 2010. Parmi les autres produits essentiels, les médicaments figurent en bonne place. (1/3) Citer Link to post Share on other sites
Ladoz 11 Posted November 2, 2010 Author Partager Posted November 2, 2010 (2/3) L’Algérie importe 70 % de ses besoins en produits pharmaceutiques – essentiellement d’Europe –, soit une facture de près de 1 milliard d’euros par an. Voilà qui fait d’elle le premier importateur de médicaments du continent africain. En l’absence d’accords sur le transfert de technologie, la mise en place d’une industrie algérienne du médicament peine à voir le jour. Dans une intervention récente, le ministre de la Santé, Djamel ould Abbès, a exhorté les laboratoires étrangers désireux de vendre en Algérie aussi bien des médicaments que des équipements médicaux à s’y installer. « Il n’est plus question d’importer des médicaments ou des équipements médicaux, mais plutôt l’installation d’usines en Algérie », a-t-il ainsi déclaré en mettant l’accent sur l’importance du transfert de technologie. Seulement, les attentes du gouvernement ne sont pas partagées par la majorité des laboratoires étrangers, qui préfèrent se limiter à la commercialisation de leurs produits au lieu de s’engager dans des projets d’investissements, plus lourds à gérer. Tant qu’un compromis n’aura pas été trouvé, l’objectif d’inverser la tendance, et donc de produire localement 70 % des besoins en médicaments à l’horizon 2014, relèvera du vœu pieux. Par ailleurs, l’Algérie perd quelque 500 millions par an lors de ses échanges commerciaux avec l’étranger en raison de la parité euro-dollar. En effet, l’Algérie vend ses hydrocarbures en dollars alors qu’elle règle l’essentiel de ses importations en euros. Si la situation était plus ou moins acceptable à la création de l’euro, elle est devenue inquiétante à la suite des dévaluations successives du dollar, qui a atteint un taux de change extrêmement pénalisant en juillet 2008 (1 euro = 1,6038 dollar). Ces quelques exemples illustrent la double dépendance de l’économie algérienne, d’une part à l’importation de certains produits stratégiques qu’elle ne produit pas et d’autre part à la fluctuation de prix du pétrole et du gaz, seuls produits qu’elle exporte. Autre constat accablant : l’Algérie, malgré tous les moyens humains et financiers dont elle dispose, continue d’importer à coups de devises des produits de grande consommation : lait, huiles, sucre… Autant de produits dont la production ne nécessite pourtant pas des technologies de pointe. Pourquoi rogner encore plus sur le pouvoir d’achat de l’Algérien en lui proposant des produits importés et donc, forcément plus chers ? Et qu’adviendra-t-il le jour où les recettes baisseront de façon plus substantielle ? Ce scénario pourrait être plus proche qu’on ne le pense, car les prémices d’une nouvelle récession mondiale sont bien là avec le retour sournois des bulles spéculatives (or, immobilier…). Et si l’industrie pétrolière a bien été affectée en peu de temps lors de la première crise, elle risque de l’être à nouveau, et peut���être même de manière encore plus sévère. Un simple calcul arithmétique permet de se rendre compte de la menace qui pèse sur l’économie algérienne. En théorie, l’Algérie produit environ 1,4 million de barils de pétrole par jour. Si le prix du baril devait chuter de seulement un dollar, l’Algérie enregistrerait aussitôt une perte sèche de 1,4 million de dollars. Choc pétrolier. Ce manque à gagner pourrait être encore plus important si un effondrement durable des prix venait à se produire. Dans ce cas, les 150 milliards de dollars de réserves de change et les 40 milliards du Fonds de régulation des recettes, dont dispose aujourd’hui l’Algérie, pourraient rapidement s’évaporer. Toutes proportions gardées, c’est le même scénario qui s’était produit lors du choc pétrolier de 1986. La chute simultanée des prix des hydrocarbures et du dollar avaient alors engendré une crise économique sans précédent. Au bord de la banqueroute, l’Algérie avait été obligée d’accepter un ajustement structurel imposé par le Fonds monétaire international (FMI), qui a entraîné la paupérisation de pans entiers de la population et le dépérissement de la classe moyenne. Par la suite, la déstabilisation économique aidant, le pays a plongé dans une guerre civile dont les séquelles sont encore vivaces aujourd’hui. Et il aura fallu attendre le début des années 2000 pour que le secteur des hydrocarbures connaisse une reprise significative et que les revenus pétroliers atteignent à nouveau un niveau appréciable. De ce point de vue, les hausses successives des cours pétroliers durant cette période ont constitué une véritable aubaine pour l’Algérie. Cette dernière s’est empressée de payer les arriérés de sa dette et a lancé dans la foulée des plans de développement à coups de milliards de dollars financés sur les fonds publics. (2/3) Citer Link to post Share on other sites
Ladoz 11 Posted November 2, 2010 Author Partager Posted November 2, 2010 (3/3) L’objectif était justement de diversifier l’économie pour sortir l’Algérie de son statut de pays rentier mono���exportateur. Malheureusement, ni la politique de privatisation, ni la mise à niveau des entreprises publiques, ni l’encouragement du secteur privé n’ont permis l’émergence d’un secteur industriel digne de ce nom. Toutefois, malgré les erreurs commises, il serait injuste d’imputer cet échec aux seuls pouvoirs publics. En plus de remettre sur les rails un pays sorti exsangue de dix années de guerre civile, il fallait parallèlement répondre aux besoins sociaux de la population et lutter contre des phénomènes de société qui tendaient à se généraliser : corruption, évasion fiscale, banditisme, marché parallèle… Autant de fléaux qui ont miné toute perspective d’un redressement efficace de l’économie. À la fin de l’année 2008, lorsque l’actuel gouvernement prit une série de décisions – matérialisée par la Loi de finances complémentaire de 2009 – pour remettre de l’ordre dans les affaires économiques du pays, ce fut au tour des partenaires étrangers de manifester leur mécontentement. Partenaires étrangers. Des pressions furent ainsi exercées sur le gouvernement pour l’obliger à revenir sur les nouvelles dispositions, jugées trop restrictives. En réalité, ces partenaires étrangers n’avaient cure des difficultés que pouvait rencontrer l’Algérie. Ils ne voulaient tout simplement pas d’une loi qui les oblige à investir, se satisfaisant pleinement d’un grand bazar où ils pourraient écouler leurs produits. Le gouvernement leur a pourtant tenu tête en fixant définitivement les règles du jeu. L’État a ainsi aménagé – mais pas suffisamment – certaines mesures jugées trop contraignantes pour les entreprises algériennes. Un nouveau Plan quinquennal, doté de 286 milliards de dollars, a été mis en place pour la période 2010���2014, avec pour principaux objectifs de parachever les grands projets déjà entrepris et d’en lancer de nouveaux. Pratiquement tous les secteurs sont concernés et la concurrence sera ouverte aux sociétés étrangères qui accepteront de se conformer aux lois qui régissent le partenariat. Si l’initiative de ce Plan est généralement bien accueillie, certains émettent toutefois des réserves sur la nature des projets. L’Algérie saura-t-elle relever le défi du développement au moment où le climat des affaires est plutôt inquiétant ? Saura-t-elle enfin s’émanciper du statut de pays mono���exportateur ? Si la volonté politique existe, tout devient possible. in : arabies.com Citer Link to post Share on other sites
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