Guest asteroideB612 Posted December 11, 2010 Partager Posted December 11, 2010 JE LIS TON CORPS ET… ME CULTIVE Nizar KABBANI Le jour où s'est arrêté Le dialogue entre tes seins Dans l'eau prenant leur bain Et les tribus s'affrontant pour l'eau L'ère de la décadence a commencé, Alors la guerre de la pluie fut déclarée Par les nuages Pour une très longue durée, La grève des vols fut déclenchée Par la gente ailée, Les épis ont refusé De porter leurs semences Et la terre a pris la ressemblance D'une lampe à gaz. II Le jour où ils m'ont de la tribu chassé Parce qu'à l'entrée de la tente j'ai déposé Un poème L'heure de la déchéance a sonné. L'ère de la décadence N'est pas celle de l'ignorance Des règles grammaticales et de conjugaison, Mais celle de l'ignorance Des principes qui régissent le genre féminin, Celle de la rature des noms de toutes les femmes De la mémoire de la patrie. III O ma bien aimée, Qu'est-ce donc que cette patrie Qui se comporte avec l'Amour En agent de la circulation ? Cette patrie qui considère que la Rose Est un complot dirigé contre le régime, Que le Poème est un tract clandestin Rédigé contre le régime ? Qu'est-ce donc que ce pays Façonné sous forme de criquet pèlerin Sur son ventre rampant De l'Atlantique au Golfe Et du Golfe à l'Atlantique, Parlant le jour comme un saint Et qui, la nuit tombant, Est pris de tourbillon Autour d'un nombril féminin ? ...//... Citer Link to post Share on other sites
Zazou 10 Posted December 11, 2010 Partager Posted December 11, 2010 J’ai la nostalgie du pain de ma mère, Du café de ma mère, Des caresses de ma mère... Et l’enfance grandit en moi, Jour après jour, Et je chéris ma vie, car Si je mourais, J’aurais honte des larmes de ma mère ! mercredi 20 avril 2005. Fais de moi, si je rentre un jour, Une ombrelle pour tes paupières. Recouvre mes os de cette herbe Baptisée sous tes talons innocents. Attache-moi Avec une mèche de tes cheveux, Un fil qui pend à l’ourlet de ta robe... Et je serai, peut-être, un dieu, Peut-être un dieu, Si j’effleurais ton coeur ! Si je rentre, enfouis-moi, Bûche, dans ton âtre. Et suspends-moi, Corde à linge, sur le toit de ta maison. Je ne tiens pas debout Sans ta prière du jour. J’ai vieilli. Ramène les étoiles de l’enfance Et je partagerai avec les petits des oiseaux, Le chemin du retour... Au nid de ton attente ! Mahmoud DARWICH Citer Link to post Share on other sites
Guest asteroideB612 Posted December 11, 2010 Partager Posted December 11, 2010 ...//... IV Qu'est-ce donc cette patrie Qui exerce son infamie Contre tout nuage de pluie chargé, Qui ouvre une fiche secrète Pour chaque sein de femme, Qui établit un PV de police Contre chaque rose ? V O bien aimée Que faisons-nous encore dans cette patrie Qui craint de regarder Son corps dans un miroir Pour ne pas le désirer ? Qui craint d'entendre au téléphone Une vois féminine De peur de rompre ses ablutions ? Que faisons-nous dans cette patrie égarée Entre les œuvres de Chafi'i et de Lénine, Entre le matérialisme dialectique Et les photos pornos, Entre les exégèses coraniques Et les revues Play Boy, Entre le groupe mu'tazélite Et le groupe des Beattles, Entre Rabi'a-l-'Adaouya Et Emmanuelle ? VI O toi être étonnant Comme un jouet d'enfant Je me considère comme homme civilisé Parce que je suis ton Amant, Et je considère mes vers comme historiques Parce qu'ils sont tes contemporains. Toute époque avant tes yeux Ne peut être qu'hypothétique, Toute époque après tes yeux N'est que déchirement ; Ne demande donc pas pourquoi Je suis avec toi : Je veux sortir de mon sous-développement Pour vivre l'ère de l'Eau, Je veux fuir la République de la Soif Pour pénétrer dans celle du Magnolia, Je veux quitter mon état de Bédouin Pour m'asseoir à l'ombre des arbres, Je veux me laver dans l'eau des Sources Et apprendre les noms des Fleurs. Je veux que tu m'enseignes La lecture et l'écriture Car l'écriture sur ton corps Est le début de la connaissance S'y engager de la connaissance : S'y engager est s'engager Sur la voie de la civilisation. Ton corps n'est pas ennemi de la Culture, Mais la culture même. Celui qui ne sait pas faire la lecture De l'Alphabet de ton corps Restera analphabète sa vie durant Citer Link to post Share on other sites
Guest asteroideB612 Posted December 11, 2010 Partager Posted December 11, 2010 Et la mer et l'amour ont l'amer pour partage. Et la mer est amère, et l'amour est amer, L'on s'abîme en l'amour aussi bien qu'en la mer, Car la mer et l'amour ne sont point sans orage. Celui qui craint les eaux, qu'il demeure au rivage, Celui qui craint les maux qu'on souffre pour aimer, Qu'il ne se laisse pas à l'amour enflammer, Et tous deux ils seront sans hasard de naufrage. La mère de l'amour eut la mer pour berceau, Le feu sort de l'amour, sa mère sort de l'eau, Mais l'eau contre ce feu ne peut fournir des armes. Si l'eau pouvait éteindre un brasier amoureux, Ton amour qui me brûle est si fort douloureux, Que j'eusse éteint son feu de la mer de mes larmes. Pierre de Marbeuf Citer Link to post Share on other sites
Guest asteroideB612 Posted December 11, 2010 Partager Posted December 11, 2010 Déjeuner du matin Il a mis le café Dans la tasse Il a mis le lait Dans la tasse de café Il a mis le sucre Dans le café au lait Avec la petite cuiller Il a tourné Il a bu le café au lait Et il a reposé la tasse Sans me parler Il a allumé Une cigarette Il a fait des ronds Avec la fumée Il a mis les cendres Dans le cendrier Sans me parler Sans me regarder Il s'est levé Il a mis Son chapeau sur sa tête Il a mis son manteau de pluie Parce qu'il pleuvait Et il est parti Sous la pluie Sans une parole Sans me regarder Et moi j'ai pris Ma tête dans ma main Et j'ai pleuré Poème de Jacques Prévert (Paroles, 1946) Citer Link to post Share on other sites
Guest asteroideB612 Posted December 11, 2010 Partager Posted December 11, 2010 Les sans voix dire l’angoisse des minutes assassines qui régulent le silence crier dans la nuit fourbe l’immense vérité et se taire - se taire - la main sur la bouche de s’être rappelé que les cris se dissipent en échos sur les rocs chanter de peine les nuits d’attente et vivre au songe d’une danse de cygnes au ras de l’eau pleurer de joie aux retrouvailles - oh pleurer de joie... - et s’en aller toujours trop tôt - partir déjà - avant de pouvoir tout dire avant de ne rien dire Poète algérien, Soleïman Adel Guémar Citer Link to post Share on other sites
Guest asteroideB612 Posted December 11, 2010 Partager Posted December 11, 2010 Poème de prison La prison, c'est laid Tu la dessines, mon enfant Avec des traits noirs Des barreaux et des grilles Tu imagines que c'est un lieu sans lumière Qui fait peur aux petits Aussi pour l'indiquer Tu dis que c'est là-bas Et tu montres avec ton petit doigt Un point, un coin perdu Que tu ne vois pas Peut être la maîtresse t'a parlé De prison hideuse De maison de correction Où l'on met les méchants Qui volent les enfants Dans ta petite tête S'est alors posé une question Comment et pourquoi Moi qui suis pleine d'amour pour toi Et tous les autres enfants Suis-je là-bas ? Parce que je veux que demain La prison ne soit plus là. Saïda MENEBHI : professeur d'anglais, membre du mouvement révolutionnaire Ila Al-Amam (En avant), arrêtée le 16 janvier 1976 à Rabat. Elle subit des tortures physiques et particulièrement psychologiques. Elle est jugée au procès de Casablanca de janvier 1977, avec 138 autres inculpés pour atteint à la Sûreté de l'État ; elle dénoncera entre autres la situation d'oppression que subissent les femmes au Maroc, (la salle l'applaudit), Elle est condamnée a 5 ans de détention, plus deux ans pour injure à magistrat. Elle est morte le 11 décembre 1977 (après 34 jours de la grève de la faim) à 25 ans à l'hôpital d'Averroes. Citer Link to post Share on other sites
Guest asteroideB612 Posted December 11, 2010 Partager Posted December 11, 2010 FIN DE LA NUIT (1967) L’Impossible je meurs d’espoir d’embrasement je meurs Je meurs pendu égorgé je meurs mais je ne dis point : Notre amour est fini et mort Non notre amour est impérissable Mahmoud Darwich Citer Link to post Share on other sites
Guest asteroideB612 Posted December 11, 2010 Partager Posted December 11, 2010 JE PASSE PAR TON NOM Dans ma rêverie solitaire Au gré de mon souffle Je passe par ton nom Tel un promeneur Damascène Par l'Andalousie C'est ici que le citron A rendu incandescent Pour toi le sel de mon sang C'est là que de son cheval Un jour est tombé le vent Je passe par ton nom Nulle armée ne m'encercle Nul pays. Tel le dernier garde-frontières Ou encore un poète arpentant ses chimères Mahmoud Darwich Citer Link to post Share on other sites
Guest asteroideB612 Posted December 11, 2010 Partager Posted December 11, 2010 APPARITION Elle apparaît...et dans le champ éperdu court un frisson troublé les épis sont chargés de blé Sa démarche fait revivre Toute une harmonie le pas piaffant du cheval le pas élancé de l'autruche Le pas balancé du chameau Elle esquisse un geste Et le couchant vers elle chavire Les chevrettes égrènent leur béguètement Son regard furtif est un dard Ses paupières un frémissement Une chanson d'été Son corsage est cerise. Adonis Citer Link to post Share on other sites
Guest asteroideB612 Posted December 11, 2010 Partager Posted December 11, 2010 AIME-MOI Aime-moi Celles que j'ai aimé Avant toi Ne m'aimaient pas. Et toi? Peut-être est-ce de la pitié? Je ne puis pardonner Dieu, Si c'est de lui que vient la misércorde et non l'amour Qui m'a fait boire des coupes de paradis. Ah, apporte-moi l'amour, Désaltère-moi Dors sur ma poitrine Laisse-moi dormir sur tes seins. Ah, ces brûlures qui m'ont avalé le coeur Puis dévoré les veines Aime-moi Celles que j'ai aimé Avant toi Ne m'aimaient pas. Badr Chaker AS-Sayyab Citer Link to post Share on other sites
Guest asteroideB612 Posted December 11, 2010 Partager Posted December 11, 2010 PAREIL A L'EAU Le coeur est pareil à l'eau, les passions flottent à sa surface, goutes d'eau dans l'eau. La parole, comme les créatures, est mélange de beau et de mauvais, les gens, comme le temps, sont de lumière et d'obscurité. Le jour éclaire puis vient la nuit, une étoile s'évanouit, une autre apparaît. Comme ont disparu nos ancêtres, nous disparaîtrons, seul le temps demeure, tel que tu le vois. Etrangers dans leur pays sont ceux qui font le bien, même leurs proches les abandonnent, s'en éloignent. Si tu as scellé une amitié aux jours de misère, ne l'oublie pas aux jours de prospérité AL MAARRI (973-1059) AL MAARRI (973-1059). Né à Maaeeat près d'Alep (Syrie) Aveugle à 4 ans. Surnommé le double prisonnier (des sensations visuelles et de la pauvreté volontaire). Connu pour sa révolte permanente contre le pouvoir, les institutions religieuses et la lâcheté de son temps. Réputé pour sa mémoire légendaire. Tantôt perçu comme impie, tantôt comme musulman fidèle ou philosophe sceptique. Il exerce une une influence incontestable sur la "Divine Comédie" de Dante. Son recueil "Nécessité de ce qui n'est pas nécessaire" illustre sa vision du destin tragique de l'homme. Citer Link to post Share on other sites
Guest asteroideB612 Posted December 11, 2010 Partager Posted December 11, 2010 Je venais de baiser la Pierre noire Quand d'avenantes femmes vers moi se pressèrent. Elles venaient accomplir les tournées rituelles En se couvrant la face d'un voile Elles se découvrirent Elles, pareilles aux rais des soleils "Retiens-toi!" me dirent-elle Car l'âme se perd dans les oeillades. Mon coeur est devenu capable D'accueillir toute forme. Il est pâturage pour gazelles Et abbaye pour moines Il est temple pour idoles Et la Kaaba pour qui en fait le tour, Il est les Tables de la Thora Et aussi les feuillets du Coran! Je crois en la religion de l'Amour, Où que se dirigent ses caravanes Car l'amour est ma religion et ma foi. IBN ARABI Citer Link to post Share on other sites
Muay Thai 14 Posted December 11, 2010 Partager Posted December 11, 2010 La Courbe de tes yeux La courbe de tes yeux fait le tour de mon coeur, Un rond de danse et de douceur, Auréole du temps, berceau nocturne et sûr, Et si je ne sais plus tout ce que j'ai vécu C'est que tes yeux ne m'ont pas toujours vu. Feuilles de jour et mousse de rosée, Roseaux du vent, sourires parfumés, Ailes couvrant le monde de lumière, Bateaux chargés du ciel et de la mer, Chasseurs des bruits et sources des couleurs, Parfums éclos d'une couvée d'aurores Qui gît toujours sur la paille des astres, Comme le jour dépend de l'innocence Le monde entier dépend de tes yeux purs Et tout mon sang coule dans leurs regards. Paul ELUARD, Capitale de la douleur Citer Link to post Share on other sites
Guest asteroideB612 Posted December 11, 2010 Partager Posted December 11, 2010 Victor Hugo Oh ! n'insultez jamais une femme qui tombe ! Oh ! n'insultez jamais une femme qui tombe ! Qui sait sous quel fardeau la pauvre âme succombe ! Qui sait combien de jours sa faim a combattu ! Quand le vent du malheur ébranlait leur vertu, Qui de nous n'a pas vu de ces femmes brisées S'y cramponner longtemps de leurs mains épuisées ! Comme au bout d'une branche on voit étinceler Une goutte de pluie où le ciel vient briller, Qu'on secoue avec l'arbre et qui tremble et qui lutte, Perle avant de tomber et fange après sa chute ! La faute en est à nous ; à toi, riche ! à ton or ! Cette fange d'ailleurs contient l'eau pure encor. Pour que la goutte d'eau sorte de la poussière, Et redevienne perle en sa splendeur première, Il suffit, c'est ainsi que tout remonte au jour, D'un rayon de soleil ou d'un rayon d'amour ! Citer Link to post Share on other sites
Guest asteroideB612 Posted December 11, 2010 Partager Posted December 11, 2010 Se voir le plus possible et s'aimer seulement, Sans ruse et sans détours, sans honte ni mensonge, Sans qu'un désir nous trompe, ou qu'un remords nous ronge, Vivre à deux et donner son coeur à tout moment ; Respecter sa pensée aussi loin qu'on y plonge, Faire de son amour un jour au lieu d'un songe, Et dans cette clarté respirer librement - Ainsi respirait Laure et chantait son amant. Vous dont chaque pas touche à la grâce suprême, Cest vous, la tête en fleurs, qu'on croirait sans souci, C'est vous qui me disiez qu'il faut aimer ainsi. Et c'est moi, vieil enfant du doute et du blasphème, Qui vous écoute, et pense, et vous réponds ceci : Oui, l'on vit autrement, mais c'est ainsi qu'on aime. Alfred de Musset. Citer Link to post Share on other sites
Guest asteroideB612 Posted December 11, 2010 Partager Posted December 11, 2010 Premier jour Des draps blancs dans une armoire Des draps rouges dans un lit Un enfant dans sa mère Sa mère dans les douleurs Le père dans le couloir Le couloir dans la maison La maison dans la ville La ville dans la nuit La mort dans un cri Et l'enfant dans la vie. Prévert Citer Link to post Share on other sites
Guest asteroideB612 Posted December 11, 2010 Partager Posted December 11, 2010 Dors-tu ? Marceline Desbordes-Valmore "Et toi ! dors-tu quand la nuit est si belle, Quand l'eau me cherche et me fuit comme toi ; Quand je te donne un coeur longtemps rebelle ? Dors-tu, ma vie ! ou rêves-tu de moi ? Démêles-tu, dans ton âme confuse, Les doux secrets qui brûlent entre nous ? Ces longs secrets dont l'amour nous accuse, Viens-tu les rompre en songe à mes genoux ? As-tu livré ta voix tendre et hardie Aux fraîches voix qui font trembler les fleurs ? Non ! c'est du soir la vague mélodie ; Ton souffle encor n'a pas séché mes pleurs ! Garde toujours ce douloureux empire Sur notre amour qui cherche à nous trahir : Mais garde aussi son mal dont je soupire ; Son mal est doux, bien qu'il fasse mourir !" Citer Link to post Share on other sites
Guest asteroideB612 Posted December 11, 2010 Partager Posted December 11, 2010 Chut, et silence ! de Philistin Panger Le bruit a gagné le combat Et le silence doit se taire. Nombreux sont ici bas Qui le vacarme préfèrent. Quelle peut être cette crainte qu’il nous faut trahir, cette solitude feinte et par des sons se mentir ? Le silence, c’est l’écoute, l’entente de son pareil. Le bruit sans aucun doute torture nos oreilles. Il faut donc des morts pour qu’on s’accorde une minute et hurler nos remords avant l’ultime chute ? Pourtant les rêves des hommes sont fait de poésies dans lesquelles raisonnent bien plus de silence que de bruit. Et la beauté se contemple dans un absolu silence. Elle devient bien plus ample et beaucoup plus intense. Lorsqu’elles sont immenses Les joies sont des cris. Mais c’est bien dans le silence que le bonheur s’apprécie. Les bruits ont bien souvent tord et qu’importe l’offense, je le dis haut et fort Chut, et Silence. Citer Link to post Share on other sites
Guest asteroideB612 Posted December 11, 2010 Partager Posted December 11, 2010 Mon silence Peuchy "Votre silence s'impose et affaiblit mon âme De mon regard d'enfant ne jaillissent plus de flammes C'est le fracas des vagues qui me parle le plus Que ce bout de falaise, il ne me reste plus. Malgré moi je vous aime, et vous admire tant D'une preuve d'amour, vous en coûte-t'il tant ? Et je parle en silence, me surprends à chanter Fais vibrer de mes larmes ces mots inespérés L'horizon est lointain, ma vie entre vos mains Et de vous supplier, je clame mon chagrin. Mes dessins s'assombrissent mais ne vous parlent pas Mes poèmes sont tristes, ils sont tout comme moi L'ivresse des nuages est ma seule gaieté Elle fige mon sourire quand je suis allongé En haut de la falaise, et les bras repliés Telle une mise en terre, sans caveau ni curé. Qu'ai-je donc à souffrir, je ne manque de rien De l'amour qu'on me donne, on me le donne en biens Une simple caresse, deux mots dit de tout près M'aideraient tout de même à me sentir aimé. Mais le mensonge est là, il crucifie mon être Telle une religion qui m'oblige à paraître Et qui sournoisement se déguise en comptine Mais qui embrase en moi ces souffrances enfantines. Alors, plutôt que de céder à l'attrait de la mort Je me tais à jamais et ne mens plus à tort Je vous laisse corrompre la joie et l'innocence Je me terre à regret au fond de mon silence." Citer Link to post Share on other sites
Guest asteroideB612 Posted December 11, 2010 Partager Posted December 11, 2010 A ma mère je me languis du pain de ma mère du café de ma mère des caresses de ma mère jour après jour l'enfance grandit en moi j'aime mon âge car si je meurs j'aurai honte des larmes de ma mère si un jour je reviens fais de moi un pendentif à tes cils recouvre mes os avec de l'herbe qui se sera purifiée à l'eau bénite de tes chevilles attache -moi avec une natte de tes cheveux avec un fil de la traîne de ta robe peut-être deviendrai-je un dieu oui un dieu si je parviens à toucher le fond de ton cœur si je reviens mets-moi ainsi qu'une brassée de bois dans ton four fais de moi une corde à linge sur la terrasse de ta maison car je ne peux plus me lever quand tu ne fais pas ta prière du jour j'ai vieilli rends-moi la constellation de l'enfance que je puisse emprunter avec les petits oiseaux la voie du retour au nid de ton attente Mahmoud Darwich Citer Link to post Share on other sites
Guest asteroideB612 Posted December 11, 2010 Partager Posted December 11, 2010 ENIVREZ-VOUS Il faut être toujours ivre, tout est là ; c'est l'unique question. Pour ne pas sentir l'horrible fardeau du temps qui brise vos épaules et vous penche vers la terre, il faut vous enivrer sans trêve. Mais de quoi? De vin, de poésie, ou de vertu à votre guise, mais enivrez-vous! Et si quelquefois, sur les marches d'un palais, sur l'herbe verte d'un fossé, vous vous réveillez, l'ivresse déjà diminuée ou disparue, demandez au vent, à la vague, à l'étoile, à l'oiseau, à l'horloge; à tout ce qui fuit, à tout ce qui gémit, à tout ce qui roule, à tout ce qui chante, à tout ce qui parle, demandez quelle heure il est. Et le vent, la vague, l'étoile, l'oiseau, l'horloge, vous répondront, il est l'heure de s'enivrer ; pour ne pas être les esclaves martyrisés du temps, enivrez-vous, enivrez-vous sans cesse de vin, de poésie, de vertu, à votre guise. Charles Baudelaire Citer Link to post Share on other sites
Guest asteroideB612 Posted December 11, 2010 Partager Posted December 11, 2010 Madrigal Pierre de Ronsard "Si c'est aimer, Madame, et de jour, et de nuit Rêver, songer, penser le moyen de vous plaire, Oublier toute chose, et ne vouloir rien faire Qu'adorer et servir la beauté qui me nuit : Si c'est aimer que de suivre un bonheur qui me fuit, De me perdre moi même et d'être solitaire, Souffrir beaucoup de mal, beaucoup craindre et me taire, Pleurer, crier merci, et m'en voir éconduit : Si c'est aimer que de vivre en vous plus qu'en moi même, Cacher d'un front joyeux, une langueur extrême, Sentir au fond de l'âme un combat inégal, Chaud, froid, comme la fièvre amoureuse me traite : Honteux, parlant à vous de confesser mon mal ! Si cela est aimer : furieux je vous aime : Je vous aime et sait bien que mon mal est fatal : Le coeur le dit assez, mais la langue est muette." Citer Link to post Share on other sites
Guest asteroideB612 Posted December 11, 2010 Partager Posted December 11, 2010 L'amoureuse Elle est debout sur mes paupières Et ses cheveux sont dans les miens, Elle a la forme de mes mains, Elle a la couleur de mes yeux, Elle s'engloutit dans mon ombre Comme une pierre sur le ciel. Elle a toujours les yeux ouverts Et ne me laisse pas dormir. Ses rêves en pleine lumière Font s'évaporer les soleils, Me font rire, pleurer et rire, Parler sans avoir rien à dire. Ecrit en 1921 par Paul Eluard Citer Link to post Share on other sites
Guest asteroideB612 Posted December 11, 2010 Partager Posted December 11, 2010 QUE SERAIS-JE SANS TOI Aragon "Que serais-je sans toi qui vins à ma rencontre Que serais-je sans toi qu'un coeur au bois dormant Que cette heure arrêtée au cadran de la montre Que serais-je sans toi que ce balbutiement. J'ai tout appris de toi sur les choses humaines Et j'ai vu désormais le monde à ta façon J'ai tout appris de toi comme on boit aux fontaines Comme on lit dans le ciel les étoiles lointaines Comme au passant qui chante on reprend sa chanson J'ai tout appris de toi jusqu'au sens du frisson. Que serais-je sans toi qui vins à ma rencontre Que serais-je sans toi qu'un coeur au bois dormant Que cette heure arrêtée au cadran de la montre Que serais-je sans toi que ce balbutiement. J'ai tout appris de toi pour ce qui me concerne Qu'il fait jour à midi, qu'un ciel peut être bleu Que le bonheur n'est pas un quinquet de taverne Tu m'as pris par la main dans cet enfer moderne Où l'homme ne sait plus ce que c'est qu'être deux Tu m'as pris par la main comme un amant heureux. Que serais-je sans toi qui vins à ma rencontre Que serais-je sans toi qu'un coeur au bois dormant Que cette heure arrêtée au cadran de la montre Que serais-je sans toi que ce balbutiement. Qui parle de bonheur a souvent les yeux tristes N'est-ce pas un sanglot que la déconvenue Une corde brisée aux doigts du guitariste Et pourtant je vous dis que le bonheur existe Ailleurs que dans le rêve, ailleurs que dans les nues. Terre, terre, voici ses rades inconnues. Que serais-je sans toi qui vins à ma rencontre Que serais-je sans toi qu'un coeur au bois dormant Que cette heure arrêtée au cadran de la montre Que serais-je sans toi que ce balbutiement. " [V]http://www.youtube.com/watch?v=ihNgbmTNtMI?fs=1&hl=fr_FR[/V] Citer Link to post Share on other sites
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