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L’amour, avec Vargas Llosa


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Prix Nobel de littérature 2011

 

Alors que je désapprouve le fait que des Kant, Schopenhauer, Nietzsche, Baudelaire, Simone de Beauvoir et tutti quanti puissent nous instruire au sujet de l’amour, du fait de leurs pauvre et misérable expériences en son jeu, Mario Vargas Llosa s’est manifesté virtuellement pour me contredire.

 

Habituellement, puisqu’il est toujours vivant, je ne devrais pas l’entendre, mais, depuis le décès d’Octavio Paz, avec lequel j’ai eu des échanges houleux au moment de la publication de son livre Lueur de l’Inde sur l’érotisme dans la Bhagavad-gita, Llosa, depuis ce temps-là, fait exception à la règle. En plusieurs occasions -et en ces moments-là seulement- il est intervenu. Cela fait longtemps, à vrai dire, que je ne l’entendais plus, ni ne pensais à lui. Mais comme le prix Nobel de littérature vient de lui être décerné, il a été l’occasion de vives discussions avec mes amis. N’ayant pas lu ses livres, à part un ou deux essais, du moins de ce que je me souviens, j’évite de m’adresser à lui directement, surtout que j’apprécie ce qu’il écrit lorsque je le rencontre ici et là, furtivement. Faut croire que je suis plus à l’aise avec les écrivains décédés.

 

Le soir de cette singulière expérience, j’étais donc en pleine discussion avec mes invités à propos d’un documentaire québécois vu ensemble, sur le fléau du sexe.* Je m’étais rendu dans une chambre à la recherche d’un de mes textes sur le sujet. J’étais en train de lire ces lignes d’un poème écrit il y a déjà longtemps :

 

Moi, je suis un homme !

Un homme qui aime les prostitués

Mais les vraies

Celles qui comblent la terre

Qui adorent l’amour

Dansent au rythme de la musique

Hument les parfums partout

Et fument fièrement

 

J’entendis alors sa voix de Vargas Llosa : «Miss Trak, interjeta-t-il gentiment, avait donné une fortune à un organisme de bienfaisance qui récompensait chaque année le plus beau roman d’amour. Cette femme, si l’on t’écoute, ne connaissait rien à l’amour. Or sa vie témoigne de l’invraisemblance de tes propos.»

 

Aie! Je n’aime pas être pris à défaut. Car il suffit d’un grain de sable pour ruiner toute la mécanique. Je vous ai collé la photo de Mr. Llosa pour bien faire, parce que dans la réalité je ne le vois pas, j’entends seulement sa voix. Je savais cependant, sans l’ombre d’un doute, que c’était lui. Son accent ne trompe pas. En ces instants, je ne fais aucune différence entre intérieur et extérieur de mon être. Je suis en catharsis.

 

«Devant la somme colossale offerte par une parfaite inconnue, un malaise s’était emparé des doctes savants de la littérature. En effet, parmi eux personne ne pouvait identifier la généreuse donatrice qui écrivit quelques romans d’amours, plus jeune. Ils se dépêchèrent de combler cette indélicate lacune. Malgré les recherches intensives qu’ils entreprirent chez les libraires et les bibliothèques, ils ne trouvèrent aucune trace de Miss Trak et les éditeurs ne la connaissaient même pas. Très prisée en son temps de gloire, elle était devenu un fantôme.»

 

Dérogeant à mon principe de ne pas lui adresse la parole, je lui fis remarquer que c’était pour les écrivains de finir par se dissoudre avec le passage des ans. Il en va de même pour les artistes et les politiciens. «Non, non, rétorqua-t-il avec flegme, les intellectuels de l’académie ne sont pas des ignorants. Le peuple peut oublier, mais pas eux. Non, la raison est différente. Cette dame écrivait des romans d’amour qui se vendaient comme des petits pains. Un jour, s’apercevant que les mœurs évoluaient à l’envers de ses livres -nous étions à l’époque charnière des hippies et des punks-, elle arrêta complètement d’écrire et se retira au fond d’un village, dans la plus grande tranquillité.» Je lui exprimais ma satisfaction : «C’est le signe d’une personne intelligente. Elle a de la noblesse d’esprit et ses actes révèlent sa grandeur d’âme. C’est un comportement qui devrait être plus souvent suivi, mais il passe pour extraordinaire. Si nous avions plus de modèles de ce genre, on pourrait encore changer le cours de l’histoire. .

- Assez spécial, en effet, répondit-il, les experts lancés sur ses traces se rendirent compte qu’elle ne s’était jamais mariée, qu’elle n’avait jamais connu l’amour, qu’elle était célibataire et vierge!» J’en resté éberlué. «Tu te rends compte, continua-t-il? Quand tu affirmes que Schopenhauer ou Nietzsche ne sont pas qualifiés pour prodiguer leurs réalisations sur l’amour … à cause de leurs déceptions, je suppose, tu t’octrois une bonne opportunité de bâillonner la discussion, et cela, à ton avantage… pour mettre tes idées de l’avant. Cette femme avait consacré sa vie à lire et à écrire sur l’amour.»

 

Je refermais son livre, Le langage de la passion, pris machinalement, pour aller rejoindre mes amis. Quand l’exemple est positif, pensai-je, à l’instar de celui de Miss Trak, il y a moins à redire. Et surtout quand l’amour est naïf et sain.

 

* Je placerai les images plus tard.

Ce texte se prend bien avec le poè de Ibn Arabi sur l'amour, dans la même section.

 

(Ma vidéo sur le sexe à partir d’un livre d’Onfray).

 

[YOUTUBE]6JtFc9blvgE[/YOUTUBE]

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