Guest Nimos Posted April 16, 2011 Partager Posted April 16, 2011 http://www.lesoirdalgerie.com/articles/2011/04/16/article.php?sid=115819&cid=2 Il a cru, un instant, nous épater en révélant son admiration pour le régime présidentiel à l’américaine, une façon sans doute de s’inspirer de son mentor Bouteflika qui se dit émule de Jefferson. Mais Abdelaziz Belkhadem aurait dû commencer par s’instruire sur l’histoire de la démocratie américaine. Il aurait découvert la formule d’Abraham Lincoln : «Aucun homme n'a assez de mémoire pour réussir dans le mensonge.» C’est cela, l’ennui avec les girouettes. Elles manquent de mémoire. De mémoire et, plus fâcheux encore, de selfcontrol. Elles passent si brutalement de l’arrogance à l’anxiété que, dans les deux postures, elles finissent toujours par trahir des secrets de famille. Dans le bateau incertain qu’est devenu le pouvoir algérien, où petits et grands arrivistes s’angoissent de la nouvelle direction du vent, Belkhadem a prouvé, mercredi soir, qu’il manquait du talent majeur pour une bonne girouette, celui de savoir maîtriser son anxiété de girouette. Cette duplicité qui manque à ses cordes, indispensable à tout serviteur d’Etat ambitieux, consiste à savoir se protéger contre sa propre angoisse et, ainsi, protéger le régime contre sa propre incohérence. Sur ce registre, Ahmed Ouyahia s’en sort, incontestablement, avec plus de bonheur, lui qui a l’avantage sur Belkhadem de savoir s’appuyer sur l’aphorisme d’Edgar Faure et de rappeler que «ce n’est pas la girouette qui tourne, c’est le vent». Dominé par son anxiété de girouette, Abdelaziz Belkhadem s’est laissé aller, mercredi soir à l’émission «Hiwar Essaâ», à de terribles aveux sur les troubles qui agitent le sommet de l’Etat, laissant entrevoir un régime inquiet et affolé devant les révolutions arabes et les mouvements de protestation en Algérie, mais aussi déchiré sur la nature de la réponse à donner à la crise. Le secrétaire général du Front de libération nationale, parlant au nom de Bouteflika, lors de l’émission «Débats de l’heure» diffusée par la Télévision nationale, a paru inquiet et acculé à l’hypocrisie et au mensonge. Premier aveu : les révoltes arabes ont détruit les plans de Bouteflika C’est l’une des principales informations qu’on retient du passage à table de Belkhadem : Bouteflika a été contrarié dans ses plans de pouvoir à vie par la rue arabe. A quoi le comprend-on ? A la façon qu’a une girouette politique de passer de l’euphorie à l’accablement. Il y a à peine un peu plus de 3 mois, à la clôture de la session du comité central du FLN, Belkhadem, le verbe haut et l’accent méprisant, affirmait que la présidentielle 2014 «était jouée», que sa «position est claire» et que son candidat à cette prochaine échéance sera Abdelaziz Bouteflika «si Dieu le veut». Mais pourquoi maintenant ? avait demandé un journaliste. Belkhadem, dédaigneux, le doigt pointé sur l’assistance, eut cette réplique sardonique : «C’est parce qu’il y a des esprits qui s’agitent et qu’il faut calmer. Il faut faire comprendre aux gens que notre candidat est déjà choisi et que les jeux sont faits. Comme ça, les gens seront calmés et ceux qui ont fait sortir les chevaux avant la course vont éviter aux bêtes qu’ils ne transpirent pas d’avance». Puis, pour le coup de grâce, il avait affirmé que «son parti sera encore au pouvoir en 2030». C’était il y a trois mois et demi. L’époque où Belkhadem donnait raison à l’écrivain polonais Stanislaw Jerzy Lec : «Quand aucun vent ne souffle, même les girouettes ont du caractère.» Mercredi soir, l’époque avait changé. Oubliant qu’«aucun homme n'a assez de mémoire pour réussir dans le mensonge », soudainement devenu modeste, le chef du FLN affirme humblement que «la question de la présidentielle est prématurée, nous ne sommes qu'à la deuxième année du troisième mandat de Bouteflika». C’est qu’entre-temps, il y a eu les révoltes arabes, les dictateurs déchus… Comment s’aventurer à parler d’une candidature de Bouteflika pour 2014 ? Deuxième aveu : Bouteflika craint le syndrome Moubarak Du temps où «il faisait beau» pour lui, du temps de son arrogance, Belkhadem estimait à propos des émeutes qui ont secoué le pays, en janvier dernier, qu’elles étaient «un phénomène normal et habituel». Et d’ajouter, hautain : «Seule l’opposition a donné un caractère politique à ces contestations. » Changement de discours, mercredi soir : «Les mouvements de protestation de rue qui secouent le pays peuvent avoir des retombées politiques. » C’est évident : Bouteflika craint le syndrome Moubarak. Abdelaziz Belkhadem ne le cache plus, parlant de ce qui se passe dans les pays arabes : «Nous ne sommes pas à l’abri.» Et le voilà, lui si arrogant, en appeler à la solidarité interne et affirmer que «seuls le renforcement du front interne, l'unité et la cohésion nationale peuvent nous prémunir contre cela». Aussi apprend-on de la bouche de Belkhadem que Bouteflika est disposé à tout donner pour calmer le front social. Dans sa nouvelle humilité, le chef du FLN a plaidé pour «la prise en considération de ces revendications, ne serait-ce que par le débat dans certains cas» car «tant que ces mouvements restent dans le cadre pacifique, il est possible de traiter les revendications qu'ils véhiculent». Belkhadem va jusqu’à promettre promettre un prochain scrutin «honnête et transparent avec une surveillance nationale et étrangère», ce qui sous-entend que les scrutins précédents ne l’ont pas été. Troisième aveu : Bouteflika veut renforcer son pouvoir et réduire les contre-pouvoirs Alors, face à la grogne, des réformes ? «Non», disait, il y a trois mois, Belkhadem. «Oui», dit-il maintenant. Mercredi soir, il a plaidé pour des réformes politiques pour se prémunir contre «les retombées politiques » de ces mouvements sociaux. Mais, ajoute-t-il, «sous la direction du chef de l'Etat» et «à l'intérieur des institutions ». Tiens, tiens… Il y aurait donc été question de réformes sous une autre direction que «la direction du chef de l'Etat» ? Le pouvoir est donc bien déchiré sur la nature de la réponse à donner à la crise. «Conduites par le chef de l’Etat», signifie «selon la seule vision du clan Bouteflika», c'est-à-dire un «sur place» magnifique, «l’intérieur des institutions». C’est pourquoi Belkhadem fait part de ses réserves quant à l’idée d’un «partenariat» avec les deux autres partis de l’Alliance présidentielle, proposée par le président du Mouvement de la société pour la paix. Pour ceux qui n’auraient pas saisi, Belkhadem souligne que «ce travail se fera dans le cadre des institutions de la République et en concertation avec toutes les forces politiques du pays, c'est-à-dire le Parlement et l'exécutif». Oui, Coluche avait bien raison, c'est pas compliqué, en politique, il suffit d'avoir une bonne conscience, et pour ça il faut avoir une mauvaise mémoire ! Citer Link to post Share on other sites
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