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La Production D'or Noir N'augmentera Plus Selon L'ex-n°2 Du Pétrole Saoudien


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La production d'or noir n'augmentera plus, selon l'ex-n°2 du pétrole saoudien

LEMONDE.FR Mis à jour le 17.11.07 | 08h00

 

 

Sadad Al-Husseini voit l'avenir de l'or noir en... noir. Retiré depuis 2004 de la vice-présidence de l'Aramco – la compagnie pétrolière nationale saoudienne, de loin la première du monde –, M. Husseini a donné, le 30 octobre, un pronostic sur l'avenir de la production pétrolière potentiellement catastrophique pour l'économie mondiale. Son verdict jette le trouble, alors que les pays de l'OPEP, réunis samedi 17 et dimanche 18 novembre à Riyad, cherchent au contraire à rassurer.

 

 

*********Un expert indépendant ?

 

*********Sadad Al-Husseini affirme qu'il n'a plus de contact professionnel avec l'Aramco depuis son départ de la compagnie en mars 2004. Il dit avoir quitté la compagnie pétrolière nationale saoudienne "en partie afin de pouvoir parler librement de l'industrie pétrolière". Ses critiques à l'égard des réserves pétrolières déclarées par les pays de l'OPEP n'en épargnent pas moins l'Arabie Saoudite. Il reconnaît que ses déclarations sont attentivement analysées, a posteriori précise-t-il, par le ministère du pétrole du royaume.

 

L'ancien responsable de l'exploration et de la production de l'Aramco a pu apparaître comme la voix "off" du premier producteur d'or noir de la planète. En 2004, le département américain de l'énergie estime que l'Arabie saoudite est capable d'atteindre une production de 22 mb/j d'ici à 2025, soit deux fois plus qu'aujourd'hui (10,8 mb/j). L'Aramco ne conteste pas officiellement ce pronostic très optimiste. Mais en novembre 2004, huit mois après avoir quitté la compagnie, Sadad Al-Husseini déclare à la presse britannique qu'il a "plus de chance de vivre un jour sur la Lune" que de voir se réaliser les espoirs de Washington. Quelques semaines plus tard, le département américain de l'énergie ramène sa projection à 16,3 mb/j.

Aujourd'hui, le Dr Husseini n'hésite pas à affirmer que ses prises de position ont pour but "de garder l'économie mondiale en vie, de prévenir des guerres absurdes, ainsi que des troubles économiques" **********

 

 

 

A Londres, devant un parterre de grands patrons du pétrole, réunis à l'occasion de la Oil & Money Conference, rendez-vous majeur de l'industrie pétrolière mondiale, Sadad Al-Husseini a lancé trois affirmations lourdes de conséquences : la production mondiale de pétrole et de gaz liquéfié va stagner jusqu'aux alentours de 2020, avant de décliner inexorablement ; les chiffres officiels "exagèrent" les réserves planétaires de 300 millards de barils, soit un quart du total encore exploitable ; la stagnation de la production implique une augmentation minimale du prix du baril de 12 dollars chaque année, à mesure que se creusera l'écart entre une offre stagnante et une demande toujours plus forte.

 

Sadad Al-Husseini, qui a obtenu son doctorat en géologie en 1973 à l'université américaine de Brown, et a été en charge de l'exploration et de la production de l'Aramco de 1992 à 2004, revient en détail sur ses assertions pour Le Monde.fr.

 

UNE STAGNATION DE LA PRODUCTION, SUIVIE D'UN DÉCLIN

La capacité mondiale de production atteint aujourd'hui 84 millions de barils par jour (mb/j). Selon l'Agence internationale de l'énergie (AIE), elle devra parvenir à 116 mb/j d'ici à 2030 afin de répondre à la demande de plus en plus forte des économies émergentes. Mais pour Sadad Al-Husseini les extractions mondiales plafonnent déjà parce que de nombreuses régions pétrolifères ont amorcé leur déclin. Ses propres projections font état d'un recul spectaculaire : il table sur une production pétrolière inférieure à 70 mb/j en 2030.

 

Il justifie : "Des pays de l'OPEP tels que l'Arabie saoudite, le Nigeria et l'Angola ont annoncé qu'ils ajouteront 10 mb/j de capacités nouvelles de production d'ici à 2014. Toutefois, tous les pays de l'OPEP ne sont pas capables de fournir le même effort. L'Indonésie, l'Iran et le Venezuela, par exemple, vont voir leur capacité de production décliner. D'autres, comme le Koweït, l'Irak et les Emirats arabes unis ne pourront faire mieux que maintenir leur production, dans le meilleur des cas. Donc au total, l'OPEP [qui dispose de 75 % des réserves planétaires] ne peut pas dégager de capacités de production supplémentaires au cours de la prochaine décennie."

 

Le Dr Husseini indique que les champs pétroliers géants du golfe Persique sont désormais à 41 % vides, en moyenne. Il explique encore : "La hausse des prix de l'énergie ne crée pas de nouvelles opportunités de production, parce que les nouvelles ressources en pétrole et en gaz naturel sont beaucoup plus difficiles à trouver et à développer."

 

DES RESERVES "EXAGÉRÉES"

Deuxième affirmation de M. Husseini : les réserves pétrolières sont "exagérées" de 300 milliards de barils. Coupables, selon lui, certaines "compagnies pétrolières [occidentales], l'Agence internationale de l'énergie et l'administration américaine (...) ont cyniquement exagéré les capacités de production de l'OPEP. Il s'agissait d'exercer une pression politique sur les pays de l'OPEP, afin de permettre aux compagnies internationales de s'implanter sur leur territoire".

 

L'ancien vice-président de l'Aramco pointe également du doigt certains des pays partenaires de l'Arabie saoudite au sein de l'OPEP, "qui ont laissé circuler des estimations spéculatives [de leurs réserves] ne reposant sur aucune analyse technique, et dont les déclarations sur leurs réserves prouvées répondent à des décrets politiques"."Nous savons cela, poursuit-il, parce que [ces pays] n'avaient pas de programme d'exploration ou de développement en cours mais déclaraient pourtant des réserves supplémentaires année après année."

 

Peut-on revenir à des évaluations plus "réalistes", selon sa propre expression, de la quantité de pétrole qui reste encore exploitable ? "Peu de pays de l'OPEP sont prêts à le faire, en particulier si cela revient à réduire le montant de leurs réserves de pétrole, au lieu de les augmenter !"

 

UNE AUGMENTATION INÉXORABLE DU PRIX DU BARIL

 

En conséquence, Sadad Al-Husseini juge que le prix du pétrole ne peut que continuer à monter. "La situation est analogue à celle d'un réservoir d'eau que l'on pomperait plus vite qu'il ne se remplit", résume-t-il. "Bien sûr, la spéculation est à l'origine de certaines augmentations des prix du pétrole", concède le Dr Husseini. "Cependant, l'escalade logique des prix depuis 2002 indique aussi que les extractions de pétrole sont fondamentalement limitées", tranche le pétrogéologue.

 

Les graphiques présentés par Sadad Al-Husseini font état d'un renchérissement futur des prix du brut de 12 dollars par an, au moins, chaque fois que l'écart entre offre et demande augmentera de 1 mb/j. En 2006, selon BP, l'offre pétrolière mondiale s'est établie à 81,6 mb/j, pour une demande supérieure de 2 mb/j, à 83,6 mb/j.

 

Sadad Al-Husseini conclut : "Plus vite nous réaliserons que les extractions de pétrole ne peuvent augmenter indéfiniment, plus vite nous rechercherons des options énergétiques alternatives et soutenables, et nous éviterons ainsi des folies tragiques telles que l'occupation de l'Irak, et d'autres mésaventures similaires."

 

Matthieu Auzanneau

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