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La Libye, la Palestine, les Arabes et les autres


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La Libye, la Palestine, les Arabes et les autres

par M'hammedi Bouzina Med: De Bruxelles, le quotidien d'oran 19/04/2011

 

 

Se battre pour libérer la Palestine de l'occupation sioniste exclut-il le

devoir d'aider la Libye d'être libre et démocratique ? Faut-il se taire sur la

responsabilité des régimes arabes dans l'enfer que vivent les Palestiniens

depuis 63 ans ?

 

Les bombardements de l'Otan contre les forces armées loyalistes au

colonel Kadhafi soulèvent, chez une partie de l'opinion publique arabe, des

interrogations quant au but réel de ces attaques. Interrogations légitimes,

tant les exemples irakien et afghan ne plaident pas, dix ans après

l'intervention des coalisés et de l'Otan, en faveur de la paix et de la

démocratie. Circonstances aggravantes pour les Occidentaux: l'enfer vécu par

les Palestiniens, notamment ceux de Ghaza, depuis 63 ans. Pourquoi les

Occidentaux n'appliquent pas le même traitement à l'Etat d'Israël qui occupe,

tue, assassine et bombarde les civils palestiniens depuis des lustres ?

Pourquoi la «Communauté internationale» ne force-t-elle pas la mise en

application des résolutions du Conseil de sécurité de l'Onu condamnant Israël ?

De 1967 à nos jours, pas moins de 17 résolutions du Conseil de sécurité et des

dizaines de condamnations (plus de 110 depuis 1948) demeurent lettre morte !

 

C'est donc à raison que l'opinion arabe et internationale s'interroge

pour le cas libyen et conclut qu'il y a deux poids et deux mesures dans

l'application de la justice et du droit international. Cela confirme le travail

et le poids des lobbies sionistes dans les instances internationales, en

particulier dans celles de l'Onu. La complicité du pouvoir politique américain

avec celui d'Israël est du domaine public.

 

Malheureusement ce ne sont pas les seules raisons à l'impunité d'Israël

dans sa colonisation de la Palestine et l'oppression des Palestiniens. Il y a

aussi les lâchetés des pays arabes, surtout ceux voisins d'Israël, qui

s'apparentent à de la complicité.

 

Lorsque des voisins immédiats de l'Etat hébreu, tels l'Egypte et la

Jordanie signent des accords de paix dans les conditions que l'on sait avec

Israël, ils se condamnent à ne pas réagir face aux agressions israéliennes en

Palestine. Lorsque les riches monarchies du Golfe se classent loin derrière

l'Europe dans l'aide financière aux Palestiniens, elles ne peuvent peser dans

les instances internationales pour appliquer la justice en Palestine. Et quand

bien d'autres Etats arabes comme le Maroc, le Qatar ou le Koweït entretiennent

des relations cordiales avec l'Etat hébreu, on ne peut parler de l'unité arabe.

Faut-il rappeler que lors des bombardements meurtriers contre Ghaza l'hiver

2008-2009, l'Egypte de Moubarak avait fermé sa frontière avec Ghaza et repoussé

sous les obus israéliens les civils palestiniens qui fuyaient ? Que l'Egypte

avait entrepris la construction sur sa frontière d'un «mur» en acier et béton ?

Faut-il rappeler septembre noir de l'année 1970 et le massacre des Palestiniens

par l'armée jordanienne ? Et l'autre septembre, celui de l'année 1982, à Sabra

et Chatila par les milices chrétiennes libanaises aidées de l'armée israélienne?

 

Les faits qui démontrent de l'abandon de la question palestinienne par

les régimes politiques arabes sont, hélas, nombreux. La genèse du conflit

israélo-palestinien nous donne une leçon capitale: ce n'est pas Israël qui est

très fort, mais ce sont les régimes politiques arabes qui sont faibles. C'est

une grosse différence. Et cela continue puisque les Palestiniens, eux-mêmes,

sont divisés entre deux clans ennemis: le Hamas à Ghaza et l'Autorité

palestinienne en Cisjordanie.

 

 

 

Quant au cas libyen, n'oublions pas qu'à l'exception de l'Algérie et de

la Syrie, les Etats de la Ligue arabe ont voté l'intervention militaire dans le

ciel libyen. Le colonel Kadhafi crie à la trahison arabe, lui qui ne voulait

pas d'un Etat palestinien et proposait un seul Etat nommé «Isratine» (Confer.

ses discours devant la Ligue arabe). Etrange rappel de l'histoire au colonel

Kadhafi. Aujourd'hui la Libye est en danger de survie en tant que nation

unifiée. Pourtant l'évidence s'impose d'elle-même: Kadhafi est condamné à

abandonner le pouvoir s'il veut sauver l'unité de la nation libyenne et lui

éviter d'autres massacres. Le Tunisien Ben Ali et l'Egyptien Moubarak l'ont

fait. Kadhafi sait qu'il est partant et continue à bombarder «son» peuple.

 

Dans ces circonstances, faut-il continuer à dénoncer les attaques de

l'Otan et faire le parallèle avec la question palestinienne ? Bien sûr, pour

rappeler justement la politique des deux poids, deux mesures de la communauté

internationale. En revanche, dénoncer les attaques de l'Otan et se taire sur

les massacres perpétrés par Kadhafi contre son peuple en raison de l'impunité

d'Israël en Palestine est une deuxième injustice. On ne justifie pas une

injustice par une autre. Oui, il faut dénoncer et plus, se battre sur les plans

politiques, diplomatiques et sur le terrain s'il le faut pour amener l'Etat d'Israël

à se conformer aux résolutions du Conseil de sécurité. Mais il faut aussi, au

nom de la justice, dénoncer le régime tyrannique de Kadhafi. Ce dernier joue le

sentiment sincère des peuples arabes pour la cause palestinienne pour

apparaître comme l'autre victime du sionisme et de l'Occident.

 

 

 

S'il y a lieu à une comparaison entre la question palestinienne et celle

libyenne, elle porte sur l'état dans lequel se trouvent et vivent les

populations des deux pays. Aux Palestiniens la violence et l'oppression de

l'Etat raciste d'Israël ; aux Libyens la tyrannie et la violence du régime

politique de Kadhafi. Plus vite la liberté et la démocratie s'installeront en

Libye, en Egypte, en Tunisie, en Syrie, en Jordanie et dans le reste du monde

arabe, plus vite les chances de l'édification d'un Etat palestinien libre et

démocratique sont grandes. Le Conseil de sécurité et l'Otan n'auront plus de

raisons à évoquer pour «libérer» des peuples libres, vivant dans des Etats où

la justice et la dignité ne sont pas des chimères.

 

Dans le monde d'aujourd'hui, la ligne de partage entre les amis et les

adversaires et ennemis, entre le bien et le mal n'est pas l'appartenance à la

même ethnie, famille ou religion ; la ligne de partage est la capacité et la

volonté sincère d'adopter et de faire respecter les droits humains qui

englobent le droit à la liberté d'opinion, à l'égalité des sexes, à une justice

égale pour tous, au travail, au respect, à la protection sociale, à la dignité,

au bonheur. En somme, tout ce qu'a conquis l'homme dans sa longue marche vers

la sa libération. C'est le sens de la civilisation humaine.

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