Les JO et la Coupe du monde menacent Rio et ses habitants

[Thanatos 10]

(De Rio de Janeiro) Pas de doute, Rio de Janeiro va bientôt connaître une grosse relance de son économie avec le double enjeu sportif de la décennie : les Jeux olympiques 2016 et la Coupe du monde de football 2014. Mais ses habitants et son patrimoine culturel ne vont pas forcément en profiter.

Ce n'est pas la première fois que ce dilemme se pose. Pour ne citer qu'eux, les JO de Pékin ou encore la Coupe du monde de football en Afrique du Sud avaient, chacun en leur temps, soulevé la polémique sur la destruction en faveur du sport.

 

Le prix de la modernisation

Les travaux de Rio englobent une amélioration des routes, des transports, des infrastructures et de la sécurité. Et cela requiert, bien entendu, une phase de démolition inévitable.

 

Et on sait où cela mène… Déplacements de population, voire expulsions, qui pourraient, selon Raquel Rolnik, rapporteur spécial de l'ONU sur le droit au logement adéquat, « constituer des violations des droits de l'homme ».

 

Entre expropriations et indemnités dérisoires, les plaintes déferlent contre les municipalités. Un jardinier qui vit dans la banlieue de Rio explique à l'AFP que selon lui, sa demeure vaudrait 22 000 euros, alors que la mairie lui propose de

la racheter à… 3 800 euros :

 

« Ils veulent que je leur fasse cadeau de ma maison. »

 

Et depuis le mois de février, les favelas de la ville sont plongées dans un état qu'on pourrait qualifier de « post apocalyptique » : « On dirait l'Irak ou la Libye. Je n'ai plus de voisins. C'est une ville fantôme » explique au Guardian, Eomar Freitas, un des habitants de la favela do Metrô.

 

Pour les activistes brésiliens qui militent contre ces destructions, ce n'est que le début, explique Julio Cesar Condaque, l'un de ces militants :

 

« Entre aujourd'hui et 2014, 1,5 million de familles devront quitter leur maison à travers tout le pays. »

 

Amnesty International au Brésil, présidé par Patrick Wilcken, demande « aux autorités à tous les niveaux que ce développement ne soit pas effectué au prix des droits de l'homme. »

 

Mr. Wilcken soutient qu'héberger la coupe du monde et les JO sont de grandes opportunités pour Rio, et pour toutes les grandes villes du pays, mais que cela devrait être une réjouissance pour tous les Brésiliens, riches ou pauvres.

 

Un patrimoine en danger ?

Rio de Janeiro vient tout juste de poser sa candidature pour être reconnu comme patrimoine mondial de l'Unesco, entre autre pour son Christ rédempteur, son mont du Pain de Sucre ou encore sa fameuse plage de Copacabana.

 

Mais les travaux gigantesques que va connaître la ville afin d'accueillir événements sportifs et tourisme de masse risquent de compromettre cette candidature.

 

Washington Fajardo, le sous-secrétaire du patrimoine culturel de Rio l'a reconnu :

 

« Il y a un certain manque de contrôle dans les nouvelles constructions et certaines d'entre elles défigurent le paysage. »

 

Ces travaux vont coûter, selon le gouvernement et les industriels, plus de 16 milliards d'euros, pour les deux événements sportifs réunis. Et cet argent investi pour les constructions passe avant la restauration de ce patrimoine historique.

 

Rio est riche en églises baroques, maisons coloniales ou vieilles rues pavées. Mais celles-ci auraient besoin d'un coup de pouce pour être préservées. Pour le moment, seule une promesse de la mairie de s'attaquer à des travaux de restauration est censée rassurer ceux qui souhaitent conserver le patrimoine de la « cité merveilleuse ».

 

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