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Cannes 2011 : L'hommage raté à la révolution égyptienne


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Pour la première fois de son histoire, le Festival de Cannes a désigné un pays invité de sa 64e édition. Le 18 mai, le cinéma égyptien sera ainsi mis à l'honneur, à travers notamment la projection du film collectif 18 Jours, qui évoque la récente révolution dans le pays. Mais le choix des cinéastes conviés fait débat en Egypte, raconte Al-Ahram Online.

 

17.05.2011 | Menna Taher | Ahram Online

 

CANNES 2011

ette année, la 64e édition du Festival de Cannes accueille l'Egypte comme invitée d'honneur et salue ainsi le renversement de l'ancien président Hosni Moubarak. C'est la première initiative du genre dans l'histoire de cette prestigieuse compétition, qui s'achève le dimanche 22 mai. Pour rendre hommage aux Egyptiens, un film rassemblant dix courts-métrages sera projeté le 18 mai. Intitulé 18 Jours, cette œuvre collective évoque la révolution, depuis ses balbutiements, le 25 janvier 2011, jusqu'au départ de Moubarak, le 11 février. Les dix courts-métrages sont signés Yousry Nasrallah, Marwan Hamed, Sherif Arafa, Sherif El-Bendary, Kamla Abou Zikry, Mariam Abou Ouf, Mohamed Ali, Ahmed Alaa, Ahmad Abdallah et Khaled Marei. Par ailleurs, Sarkhet Namla (Le Cri d'une fourmi), un long-métrage (2011) de Sameh Abdel Aziz sera projeté en plein air au Cinéma de la Plage. Et Al Bostagui (Le Facteur, 1968), de Hussein Kamal, fait partie de la section Cannes Classics.

 

Cependant, la présence de Sherif Arafa et de Marwan Hamed dans le cadre d'un hommage aux 18 jours qu'a duré la révolution égyptienne suscite l'indignation chez les Egyptiens, notamment dans les milieux du cinéma. En effet, Arafa comme Hamed ont été des collaborateurs actifs du régime corrompu de Moubarak, allant jusqu'à réaliser des clips de campagne pour la campagne présidentielle du raïs en 2005, ainsi que pour sa formation le Parti national démocratique (PND), aujourd'hui dissous. Certains Egyptiens vivant en France voient également d'un mauvais œil la participation, au dîner officiel qui suivra la projection de 18 Jours, de l'ambassadeur d'Egypte à Paris, qui s'était opposé aux manifestations pour la démocratie.

 

Une pétition circule en ligne pour exiger que la révolution ne soit pas représentée à Cannes par des réalisateurs qui travaillaient avec le régime renversé. Certains montrent aussi du doigt des acteurs à l'instar de la comédienne star Youssra, qui s'est exprimée par téléphone à la télévision durant la révolte anti-Moubarak pour inciter le public à s'opposer aux manifestants. Pour l'heure, la pétition a réuni environ 180 signatures, essentiellement de réalisateurs et d'autres représentants du monde des arts.

 

Les artistes se demandent notamment si le voyage des réalisateurs invités à Cannes est financé par le ministre de la Culture égyptien, mais aussi si les organisateurs du festival ont pu voir les films définitifs, qui étaient toujours en production quand l'annonce de leur programmation à Cannes a été décidée.

 

Pour le scénariste et réalisateur Mohamed Hassane, ce sont les cinéastes harcelés et blessés qui méritent plus que tous les autres un hommage. "Le ministère de la Culture n'a pas changé d'un iota, ajoute-t-il. Les mêmes sont toujours en poste. C'est comme si la révolution n'avait pas eu lieu." "Je voyage à mes frais", confirme Sherif El Bendary, l'un des réalisateurs de 18 Jours. "Nous sommes invités à Cannes." Répondant aux critiques qui déplorent que les organisateurs cannois n'aient pas vu les films, El-Bendary précise que, s'ils n'ont pas vu l'intégralité du film collectif, ils l'ont vu à plusieurs étapes de sa production. Et 18 Jours ne fait pas partie de la sélection officielle, mais fait l'objet d'une projection spéciale en parallèle du festival.

 

"Tout festival a besoin d'arguments pour faire venir des médias du monde entier, et une révolution, c'est une attraction efficace et en vogue", analyse le critique de cinéma Sherif Awad. La réalisatrice et productrice Hala Galal, partisane de la réconciliation, n'est pas opposée à la participation de ces réalisateurs, mais elle s'indigne de les voir salués pour la révolution égyptienne et non pour leurs réalisations artistiques. Pour elle, comme pour nombre d'Egyptiens, Hamed, Arafa ou l'actrice Youssra ne représentent en rien la révolution anti-Moubarak. "Ce n'est pas qu'un débat entre réalisateurs", poursuit-elle, "cela concerne tous les Egyptiens."

 

Hala Galal dit n'avoir aucun grief personnel contre eux et assure souhaiter une réconciliation pour peu qu'ils reconnaissent leurs erreurs et présentent leurs excuses pour leurs liens avec l'appareil de propagande de l'ancien régime. "Pour moi, ils [Arafa et Hamed] font partie de ces artistes qui ont retourné leur veste après la révolution, histoire de devenir des anti-Moubarak et de pouvoir continuer à travailler dans cette nouvelle ère", estime Sherif Awad. "Je respecte en revanche ces acteurs qui, comme Talaat Zakaria, ne reviennent aujourd'hui sur aucun de leurs propos d'avant la révolution."

 

El-Bendary, lui, défend 18 Jours : "Je réprouve leur participation à des publicités pour le régime Moubarak, mais je ne crois pas pour autant qu'ils méritent d'être inscrits sur une liste noire." Au lendemain de la révolution, juge-t-il, les gens doivent être plus tolérants et plus indulgents. "Nous avons tous bénéficié d'une façon ou d'une autre de ce régime, directement ou indirectement." "Beaucoup nous critiquent également parce que nous réalisons des longs-métrages sur une révolution qui, en réalité, est toujours en cours", poursuit El-Bendary. "J'en suis conscient, mais mon film ne contient ni message politique ni propagande. Je n'ai fait que prendre un instantané, d'un point de vue humain." Son court-métrage, Couvre-feu, intégré à 18 Jours, suit un vieil homme et son petit-fils se perdant dans les rues de Suez en essayant de rentrer chez eux malgré le couvre-feu.

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