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Réformes politiques, services de sécurité et corruption sont au cœur du « printemps arabe »… et de la crise algérienne.

 

 

Pédagogie militante.

La pédagogie militante de Mr Abdel-hamid Mehri qui lui fait dire (et redire) que réformer un système autoritaire n’a de chances d’aboutir que si on commence par rompre avec les pratiques de l’autoritarisme, aurait eu des chances de convaincre les dirigeants du pays dans tout autre système… qu’un système autoritaire.

 

Faut-il en conclure que Mr Mehri a décidé de parler dans le désert ? Ou faut-il plutôt y entendre une sonnette d’alarme devant l’ampleur des dégâts occasionnés, à la société et à l’Etat, par ce système de pouvoir qui nous a projetés dans ce que Mehri nomme un contexte de « désertification politique ». Et qu’à ce titre toute parole se trouve en permanence menacée (sinon frappée) d’inanité. Dans ce cas, on a vite fait le tour des possibilités qui restent.

 

Quand une situation de blocage politique ne peut pas être dépassée par le dialogue, le vrai, le sérieux, celui qui dénoue les crispations là où se trouve le nœud du problème, il ne reste alors d’issue que violente. Cette perspective n’est même plus tributaire d’un choix. Mais d’un déni du choix. En fermant la porte au dialogue sérieux, le pouvoir ferme la seule option politique en course. Le reste ne relève plus de la politique. Le reste est simple ajournement d’une confrontation à l’état brut.

 

Confrontation brutale.

C’est ce que l’on voit à l’œuvre dans des pays comme la Libye, la Syrie, le Yémen, le Bahreïn…La différence entre une protestation de rue en contexte de crise dans un pays arabe et son homologue dans un pays européen est que la première est gérée par la seule violence tandis que la deuxième fait bouger tout ce que le Monde compte comme institutions politiques et économiques.

 

Réforme et avenir de la Révolution.

Même dans les cas tunisien ou égyptien, deux exemples dans lesquels la révolte populaire a débouché sur le départ du tyran, la question du changement de régime reste entièrement posée… en termes de réforme du système.

L’analyse par Toufik Aclimandos de la réforme des services de sécurité égyptiens montre l’ampleur de la tâche, la complexité des rouages, la détérioration des liens institutionnels. Toutes choses qui rendent la démarche réformatrice au sein des services de sécurité particulièrement sensible et la relient étroitement à la réforme de l’ensemble du système.

 

Selon Aclimandos : « … il n’est pas possible de réformer un régime ou des institutions en leur demandant de se suicider ou même en donnant cette impression. Ce n’est pas seulement par la réforme de ces appareils que leurs relations entre eux, avec la société et avec d’autres institutions d’Etat seront modifiées… Desserrer l’étau de ces institutions implique le développement d’autres institutions capables d’effectuer les mêmes devoirs, rationaliser la performance de l’appareil d’Etat en entier, mettre en place un système d’enseignement efficace, travailler patiemment à changer les systèmes répandus de représentation, etc. »

 

Que l’on se place en aval d’un soulèvement populaire comme en Egypte, ou que l’on s’inscrive dans sa possible survenue dans une situation de crise institutionnelle comme en Algérie, le rôle des différents services de sécurité apparait central dans des pays où les régimes ont constamment combattu le développement politique des sociétés.

 

Intervenant à Barcelone Chaffik Mesbah plaide pour une solution qui prenne l’entière mesure du rôle central que joue l’armée dans le pays: « L’état de sous-développement politique et social de l’Algérie ne semble pas, pour autant, devoir s’accommoder, pour le moment d’une solution de sortie de crise conçue sans l’adhésion de l’institution militaire, surtout, si à fortiori, elle est dirigée contre elle. Quelle est, autrement, la force politique organisée qui, aujourd’hui, pourrait garantir, sérieusement, le succès d’une transition démocratique à venir ? »

 

C’est, paradoxalement, en refusant d’opter pour une démarche de réforme politique sérieuse que le pouvoir algérien fait la démonstration de ce qui le rapproche le plus de ce « printemps arabe ». La persistance des maux engendrés par le système autoritaire, bien après la chute « des têtes » de ce système, le caractère à la fois incontournable et périlleux de toute entreprise de réforme en Egypte par exemple, pointent du doigt cette contradiction dans les termes qui veut que l’avenir de la révolution soit dans la réforme. La double nécessité de prévenir le chaos et d’opérer un changement en profondeur met au jour les éléments du statu- quo.

 

La corruption comme mode de gouvernement.

Dans le numéro de Juin de la revue française Esprit consacré au « printemps arabe », le politologue algérien Mohammed Hachmaoui s’attèle à faire la démonstration du lien entre autoritarisme et corruption. Derrière l’approche universitaire qui se veut novatrice, l’auteur de l’étude dresse un tableau sans complaisance du système de pouvoir algérien : « Les institutions sont les règles du jeu dans une société. Dans la politique algérienne les institutions établies par la constitution du pays ne traduisent cependant pas les règles du jeu. En se focalisant sur l’idéologie, l’économie ou le cadre constitutionnel, les spécialistes de la politique algérienne manquent le plus souvent l’essentiel : l’intelligence d’un système de gouvernement qui, à l’ombre du « Parti-Etat », de la « guerre civile » et de la « transition » a, dès ses fondations, consacré la corruption comme mécanisme central… Les règles du jeu politique, permanentes depuis l’indépendance derrière des formules changeantes, se déclinent, pour l’essentiel, suivant deux principes : autoritarisme prétorien et corruption politique. »

La crise algérienne a souvent été présentée sous l’angle du conflit entre le politique et le militaire, il semble bien qu’un troisième acteur, la corruption, ait de tout temps accompagné, voire encouragé, la fracture entre les deux seules forces capables à la fois de doter un pays d’un projet national et un Etat des moyens de le défendre.

 

Salima GHEZALI

 

La troisième clé.

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