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Le retour des diamants de la honte


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En autorisant le pays à commercialiser ses gemmes, le processus de Kimberley, qui vise à empêcher que les pierres précieuses financent les guerres et les guérillas, s'est décrédibilisé. Au grand dam des ONG, mais aussi des industriels du secteur.

 

Les diamants de la guerre (ou de sang, en anglais) ont commencé à attirer l'attention à la fin des années 1990. Des groupes humanitaires avaient démontré que les scintillants diamants que De Beers [la compagnie sud-africaine contrôle entre 60 % et 70 % de la production mondiale de diamants bruts] et consorts vantaient en Occident comme le symbole de l'amour éternel servaient à financer des exactions sanguinaires en Angola, au Liberia, en république démocratique du Congo (RDC) et en Sierra Leone. Les groupes rebelles dans ces pays s'appropriaient les diamants et les écoulaient sur le marché international pour financer leur opération de déstabilisation. Le processus de Kimberley a été créé en 2003 pour s'attaquer à ce phénomène.

 

Le processus de Kimberley met autour de la même table 74 pays impliqués dans le commerce du diamant (dont le Canada), l'industrie (regroupée au sein du Conseil mondial du diamant) et la société civile. Chaque pays doit mettre en place un système de contrôle interne vérifiable éliminant l'infiltration de diamants de la guerre dans les lots officiels. Il interdit l'importation de diamants bruts provenant d'un pays n'ayant pas mis en place un tel système. Chaque lot de diamants bruts doit porter son certificat Kimberley. Le processus se vantait de bien fonctionner et d'avoir fait passer la part des diamants de la guerre de 15 % à moins de 1 % du marché mondial. C'était jusqu'à ce que le Zimbabwe découvre le pactole.

 

En 2006, le Zimbabwe récupère les droits sur le site de Marange, une source de diamants de surface si abondante qu'elle pourrait, au cours des prochaines années, représenter 15 à 20 % de tous les diamants extraits dans le monde. En 2008, le pays vit une crise économique sans précédent, le taux d'inflation atteignant 11 000 000 %. Dès lors, médecins, fonctionnaires et autres travailleurs quittent leur emploi et se ruent sur les champs diamantifères. Le gouvernement a recours à la violence pour faire fuir les mineurs "illégaux". Au moins deux hélicoptères militaires ont été utilisés en décembre 2008 pour tuer 200 civils. [Ces actes de violence commis par les autorités contre des civils ont conduit, en 2009, à l'interdiction de l'exportation des diamants, dans le cadre du processus de Kimberley.]

 

Après de longues discussions internationales, le processus de Kimberley, sous la présidence de la RDC, a tranché le 23 juin dernier à Kinshasa : les diamants de Marange se qualifient à la certification au prétexte que les violences rapportées sont le fruit d'un gouvernement légitime et non d'un groupe rebelle tentant d'usurper le pouvoir. Le consensus requis n'était pas au rendez-vous, mais le président [Mathieu Yamba] est quand même allé de l'avant. [Avec le soutien, entre autres, de la Chine, de l'Inde et de pays africains.]

 

"Le Canada refuse d'endosser le plan de certification des diamants du Zimbabwe", a déclaré le ministre des Affaires étrangères canadien, John Baird. "Cet avis a été émis en contravention des règles et procédures du processus de Kimberley." Les Etats-Unis, l'Australie, l'Union européenne et Israël, notamment, ont adopté la même position.

 

Pour l'instant, le Canada ne se retire pas du processus, explique le ministère des Affaires étrangères, parce qu'il estime qu'il est "mieux placé pour influencer le processus de Kimberley et en corriger les défauts en continuant d'en faire partie".

 

De son côté, la société civile a claqué la porte le 23 juin. "Nous représentons des communautés qui ont souffert des violences alimentées par les diamants, des communautés qui espèrent pouvoir bénéficier de la richesse qu'apportent les diamants. Nous ne pouvons plus regarder ces gens dans les yeux et leur dire que le mécanisme protège leurs intérêts alors qu'il ne les protège pas", a déclaré dans un communiqué de presse Aminata Kelly-Lamin du Network Movement for Justice and Development, un groupe de la Sierra Leone. La société civile est essentielle au processus, car c'est elle qui en assure la surveillance.

 

Le problème, c'est que l'Afrique du Sud et l'émirat de Dubaï ont indiqué qu'ils accepteraient désormais les diamants provenant du Zimbabwe. Ceux-ci infiltreront leur chaîne d'approvisionnement et la "contamineront". "Il est extrêmement difficile de discerner les diamants, qui sont souvent mélangés d'un lot à l'autre", explique Alan Martin de Partenariat Afrique Canada, un des groupes ayant contribué à la naissance du processus. Il note que certaines bijouteries ont cessé de vendre des diamants africains. "Les pays africains se tirent dans le pied en prenant cette décision, car l'Occident va cesser d'acheter leurs produits."

 

D'ailleurs, l'industrie elle-même s'inquiète. Le Conseil mondial du diamant a exhorté ses membres à ne pas négocier de diamants bruts de Marange. "La rencontre de Kinshasa ne s'est pas conclue sur la décision que nous espérions", a noté le président, Eli Ishakoff.

 

[YOUTUBE]4QeWtD67VxU&feature=player_embedded[/YOUTUBE]

 

Alan Martin, qui s'est rendu au Zimbabwe pour observer la situation, indique que les richesses découlant des diamants sont détournées par certains éléments des forces armées au détriment des citoyens.

 

D'après lui, la décision du 23 juin marquera probablement la fin du processus de Kimberley, qui n'a pas su évoluer au rythme du changement de la nature des conflits dans les pays diamantifères. Il pointe d'autres mécanismes qui voient le jour un peu partout sur la planète et qu'il juge plus efficaces.

 

Washington vient par exemple de célébrer le premier anniversaire de l'adoption de la loi Dodd-Frank, qui oblige toutes les entreprises cotées en Bourse à certifier la provenance de l'or, du coltan, de la cassitérite et du wolfram contenus dans leurs produits électroniques. Si ces métaux proviennent de la RDC ou des pays limitrophes, l'entreprise doit rédiger un rapport expliquant les moyens pris pour s'assurer qu'ils ne contribuent pas aux violences, en particulier sexuelles, dans ce pays. "A notre avis, c'est en ce moment la meilleure arme qui existe", conclut M. Martin.

 

DROITS DE L'HOMME ? Le retour des diamants de la honte | Courrier international

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Guest jagellon

Le processus de Kimberley n'est rien d'autre que la main-mise de la WFDB et d'Anvers sur le marché des diamants.Ce qui rend triste c'est que les zimbabwéens ne verront pas la couleur de l'argent brassé quelque soit celui qui contrôle le bizness de Mugabé et de ses sbires ou de la WFDB.La situation sociale est l'une des pires que j'ai vues de ma vie.Le pays est en pleine guerre civile latente entre Bantous-Shonas et Bélés avec de véritables tontons macoutes au milieu.

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Le processus de Kimberley n'est rien d'autre que la main-mise de la WFDB et d'Anvers sur le marché des diamants.Ce qui rend triste c'est que les zimbabwéens ne verront pas la couleur de l'argent brassé quelque soit celui qui contrôle le bizness de Mugabé et de ses sbires ou de la WFDB.La situation sociale est l'une des pires que j'ai vues de ma vie.Le pays est en pleine guerre civile latente entre Bantous-Shonas et Bélés avec de véritables tontons macoutes au milieu.

 

Du moment qu'on ne s'attaque pas à l'origine des problèmes, j'imagine qu'il ne restera qu'à réparer indéfiniment les dégâts.

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