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Sauver la peau par le drapeau


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par Kamel Daoud

Le Quotidien d’Oran

 

« Tous derrière le peuple puisque le peuple n’est pas derrière nous». C’est le slogan du régime et de ses petits-fils en ces jours de doute et de peur pour la peau et pas pour le drapeau.

 

Le programme «tous unis, même si tous on n’est pas tous riches» vient d’être lancé pour éviter l’effet contagion du cas libyen. La recette ? Ancienne comme les fossiles : expliquer que l’Algérie est visée par un complot. Deux, appeler à la mobilisation contre un ennemie moyen, et crier au terrorisme dans le Sahel ; et trois, expliquer que le pétrole va être volé par des étrangers. Avec quel haut-parleur ? L’habituel Sidi Saïd qui vient de lancer l’idée d’un remake du CNSA (Comité national de sauvegarde de l’Algérie). Le CNSA avait servi à stopper la montée programmée du FIS durant les années 90 et peut servir aujourd’hui à rappeler ce souvenir. La ruse est habile : il s’agit de réactiver le traumatisme des années 90 en parlant du cas libyen et de présenter le régime comme seule barrage possible, comme à cette époque. Pour le sous-titrage, Sidi Saïd ne va pas chercher loin, là aussi, en terme de créativité : la métaphore est celle déjà usée par Boumediene, avocat de la souveraineté nationale par les hydrocarbures.

 

Que dit Sidi ? «Le pétrole qui est imbibé du sang des martyrs de la guerre de libération nationale et du sang de ceux qui ont défendu l’Algérie contre le terrorisme et que personne ni aucune génération ne peut trahir». Le paradoxe est le même depuis Boumediene : si le pétrole est le sang du martyrs, comment peut-on le vendre dans des barils ? Le Régime n’est-il pas coupable de la plus haute trahison, vendre le sang des martyrs, et nous de la plus haute infamie, en manger chaque jour ? Bien sûr, on n’a pas été consultés quand il s’agissait des grands contrats pétroliers et des grandes concessions, on n’est pas autorisés à se promener près des puits ni dans les comptes de Sonatrach, on ne nous dit rien de ce qu’a fait Chakib Khellil ou pas, mais quand il s’agit de défendre le pétrole, on nous rameute comme un bouclier humain.

 

Ensuite ? Ensuite Sidi Saïd si peu élu, depuis si longtemps subi, qui n’a rien dit sur rien depuis des mois, ose des définitions de la politique, appelant les Algériens à «se dresser contre toutes velléités d’exportation vers notre pays d’une démocratie définie dans des laboratoires étrangers». La raison ? «On n’en veut pas ! L’Algérie a des traditions ancestrales dans ce domaine, elle les défendra jusqu’au bout !» Quelles traditions ? La fraude, le bourrage d’urnes, l’usage du syndicat comme caisse noire et comme berger électoral, le filtrage des candidatures à la source, le verrouillage de l’ENTV et la matraque et le téléphone en guise de Justice. Faisant dans la poésie, Sidi expliquera à la fin, sans pensée pour les milliers de travailleurs algériens du textile réduit à coudre des souvenirs, que «c’est déjà beaucoup qu’ils nous exportent leur friperie, nous ne voulons pas de leur démocratie !» Que faut-il penser de cette préhistoire qui veut faire l’histoire ?

 

Ce que vous pensez déjà : on nous prend encore pour des moutons. Il y a, comme dit plus haut, un usage ridicule du bouclier humain pour éviter les bombardements ciblés. Le régime essaye de nous rassembler autour de lui pour se faire passer pour nous. La seule différence est donc dans les habits. Vue du ciel, on peut reconnaître le peuple habillé de friperie et le régime habillé d’une fausse démocratie. Facile à cibler donc. Pour le reste, il ne faut même s’étonner de voir Sidi Saïd ne rien dire sur souveraineté habillée de friperie, 50 ans après l’indépendance et beaucoup dire sur la démocratie qu’il veut combattre.

 

Le Quotidien d'Algérie Sauver la peau par le drapeau

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par Kamel Daoud

Le Quotidien d’Oran

 

« Tous derrière le peuple puisque le peuple n’est pas derrière nous». C’est le slogan du régime et de ses petits-fils en ces jours de doute et de peur pour la peau et pas pour le drapeau.

 

Le programme «tous unis, même si tous on n’est pas tous riches» vient d’être lancé pour éviter l’effet contagion du cas libyen. La recette ? Ancienne comme les fossiles : expliquer que l’Algérie est visée par un complot. Deux, appeler à la mobilisation contre un ennemie moyen, et crier au terrorisme dans le Sahel ; et trois, expliquer que le pétrole va être volé par des étrangers. Avec quel haut-parleur ? L’habituel Sidi Saïd qui vient de lancer l’idée d’un remake du CNSA (Comité national de sauvegarde de l’Algérie). Le CNSA avait servi à stopper la montée programmée du FIS durant les années 90 et peut servir aujourd’hui à rappeler ce souvenir. La ruse est habile : il s’agit de réactiver le traumatisme des années 90 en parlant du cas libyen et de présenter le régime comme seule barrage possible, comme à cette époque. Pour le sous-titrage, Sidi Saïd ne va pas chercher loin, là aussi, en terme de créativité : la métaphore est celle déjà usée par Boumediene, avocat de la souveraineté nationale par les hydrocarbures.

 

Que dit Sidi ? «Le pétrole qui est imbibé du sang des martyrs de la guerre de libération nationale et du sang de ceux qui ont défendu l’Algérie contre le terrorisme et que personne ni aucune génération ne peut trahir». Le paradoxe est le même depuis Boumediene : si le pétrole est le sang du martyrs, comment peut-on le vendre dans des barils ? Le Régime n’est-il pas coupable de la plus haute trahison, vendre le sang des martyrs, et nous de la plus haute infamie, en manger chaque jour ? Bien sûr, on n’a pas été consultés quand il s’agissait des grands contrats pétroliers et des grandes concessions, on n’est pas autorisés à se promener près des puits ni dans les comptes de Sonatrach, on ne nous dit rien de ce qu’a fait Chakib Khellil ou pas, mais quand il s’agit de défendre le pétrole, on nous rameute comme un bouclier humain.

 

Ensuite ? Ensuite Sidi Saïd si peu élu, depuis si longtemps subi, qui n’a rien dit sur rien depuis des mois, ose des définitions de la politique, appelant les Algériens à «se dresser contre toutes velléités d’exportation vers notre pays d’une démocratie définie dans des laboratoires étrangers». La raison ? «On n’en veut pas ! L’Algérie a des traditions ancestrales dans ce domaine, elle les défendra jusqu’au bout !» Quelles traditions ? La fraude, le bourrage d’urnes, l’usage du syndicat comme caisse noire et comme berger électoral, le filtrage des candidatures à la source, le verrouillage de l’ENTV et la matraque et le téléphone en guise de Justice. Faisant dans la poésie, Sidi expliquera à la fin, sans pensée pour les milliers de travailleurs algériens du textile réduit à coudre des souvenirs, que «c’est déjà beaucoup qu’ils nous exportent leur friperie, nous ne voulons pas de leur démocratie !» Que faut-il penser de cette préhistoire qui veut faire l’histoire ?

 

Ce que vous pensez déjà : on nous prend encore pour des moutons. Il y a, comme dit plus haut, un usage ridicule du bouclier humain pour éviter les bombardements ciblés. Le régime essaye de nous rassembler autour de lui pour se faire passer pour nous. La seule différence est donc dans les habits. Vue du ciel, on peut reconnaître le peuple habillé de friperie et le régime habillé d’une fausse démocratie. Facile à cibler donc. Pour le reste, il ne faut même s’étonner de voir Sidi Saïd ne rien dire sur souveraineté habillée de friperie, 50 ans après l’indépendance et beaucoup dire sur la démocratie qu’il veut combattre.

 

Le Quotidien d'Algérie Sauver la peau par le drapeau

Beaucoup

.... de gens

.... pas tous, malheureusement,

.... ont compris qu'un drapeau

.... c'est tout juste un morceau

.... de chiffon colore

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Beaucoup

.... de gens

.... pas tous, malheureusement,

.... ont compris qu'un drapeau

.... c'est tout juste un morceau

.... de chiffon colore

 

Actuellement, c'est plus que l'usage du drapeau. C'est carrément un nationalisme réinventé selon lequel toute manifestation (ou opposition) serait "anti-algérienne".

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Actuellement, c'est plus que l'usage du drapeau. C'est carrément un nationalisme réinventé selon lequel toute manifestation (ou opposition) serait "anti-algérienne".

C'est le moment

... d'exister en tant que peuple

... ou courber l'echine devant

... les nouveaux colonisateurs

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Actuellement, c'est plus que l'usage du drapeau. C'est carrément un nationalisme réinventé selon lequel toute manifestation (ou opposition) serait "anti-algérienne".

 

 

Ce n'est pas du tout ça c'est sur la récupération politique de toute contestation sociale et sur la propagande du régime, l'auteur a visé juste c'est très pertinent

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Ce n'est pas du tout ça c'est sur la récupération politique de toute contestation sociale et sur la propagande du régime, l'auteur a visé juste c'est très pertinent

 

Je parlais de la phrase de Zombretto. La question du nationalisme reste un fond de commerce pour le régime, même si une grande part de la population s'en rend compte.

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Je parlais de la phrase de Zombretto. La question du nationalisme reste un fond de commerce pour le régime, même si une grande part de la population s'en rend compte.

 

 

 

Au temps pour moi.

 

Ca va plus loin que le nationalisme qui n'est pas une mauvaise chose en soi quand il est utilisé à bon escient, mais pour discréditer toute contestation ce sont toujours les mêmes arguments : la main de l'étranger, les sionistes, l'Otan, le Maroc, le Mak, ... et ... comme si les algériens ne pouvaient pas se bouger tout seuls et seraient téléguidés comme des pantins. Ce genre d'arguments est paradoxalement de l'anti nationalisme

 

Beaucoup de membres ici ressortent ces mêmes salades apprises par coeur d'ailleurs

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Au temps pour moi.

 

Ca va plus loin que le nationalisme qui n'est pas une mauvaise chose en soi quand il est utilisé à bon escient, mais pour discréditer toute contestation ce sont toujours les mêmes arguments : la main de l'étranger, les sionistes, l'Otan, le Maroc, le Mak, ... et ...

 

Beaucoup de membres ici ressortent les mêmes salades apprises par coeur d'ailleurs

 

C'est de ce type de nationalisme que je voulais parler. Celui selon lequel tu serais un traître au moment même où tu désires prendre part à la contestation, celui selon lequel il faut accréditer la version officielle pour être le "plus" algérien.

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En même temps, le cas libyen a eu le mérite de prouver, une fois pour toute, que l'Occident (et les sionistes, BHL en tête), sont aux aguets et saisissent la moindre occasion pour, effectivement, s'infiltrer et faire comme chez eux.

 

Alors oui, la main de l'étranger, les francistes, les sionistes, etc. existent bel et bien et le font savoir, par des bombardement parfois.

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En même temps, le cas libyen a eu le mérite de prouver, une fois pour toute, que l'Occident (et les sionistes, BHL en tête), sont aux aguets et saisissent la moindre occasion pour, effectivement, s'infiltrer et faire comme chez eux.

 

Alors oui, la main de l'étranger, les francistes, les sionistes, etc. existent bel et bien et le font savoir, par des bombardement parfois.

 

Ils ont des intérêts, c'est sûr. Mais il ne faut pas aussi oublier que nous n'avons pas besoin de subir une intervention étrangère pour être spoliés.

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C'est de ce type de nationalisme que je voulais parler. Celui selon lequel tu serais un traître au moment même où tu désires prendre part à la contestation, celui selon lequel il faut accréditer la version officielle pour être le "plus" algérien.

 

C'est pour cela que toute contestation doit être transparente sur ses objectifs, ses responsables et son processus.

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Guest samirovsky

Il suffit au pouvoir d’allumer le feu de la révolte en Kabylie, avec son effet repoussoir sur le reste du pays, pour que ce même pouvoir sauve sa peau pour encore une dizaine d’années.

La multiplication de bavures dans cette région en est la preuve.

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Il suffit au pouvoir d’allumer le feu de la révolte en Kabylie, avec son effet repoussoir sur le reste du pays, pour que ce même pouvoir sauve sa peau pour encore une dizaine d’années.

La multiplication de bavures dans cette région en est la preuve.

 

Je ne pense pas que ce soit le cas pour être franche. Même si c'est le message qu'ils veulent faire passer.

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