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Algérie : le drame des mères célibataires


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Algérie : le drame des mères célibataires

 

 

 

 

 

files.php?file=algerie-femmes-celibataire_722685913.jpg Un reportage de Dalila Soltani (lemague.net)

Le thème des mères célibataires au sein de notre société régit par le diktat du silence est un sujet d’une importance capitale qui prend notamment une ampleur considérable. Evoquer le sujet en toute ouverture en touchant aux angles les plus négligés, n’est-il pas tenter de mieux le cerner pour mieux lui trouver des solutions radicales ?

 

Au sein de l’établissement Diar Errahma de Bir Khadem, dans une chambre assez spacieuse du pavillon réservé aux mères célibataires et qui compte 24 chambres dont la capacité d’accueil de chacune est de 3 à 4 personnes, quatre jeunes femmes étaient en train de vaquer à leurs occupations journalières. L’esprit tourmenté par le poids de la souffrance, ces femmes avaient pour trait commun la même détresse, une détresse profonde et insupportable dans un contexte rigoriste. En effet, les quatre femmes étaient toutes des mères célibataires qui trimballaient avec elles chacune une histoire et une souffrance terrible. Livrées à elles-mêmes, contraintes d’affronter et d’assumer une réalité des plus dures, ces jeunes femmes se sont retrouvées hébergées dans ce centre d’accueil étatique qui leur offre une prise en charge pluridisciplinaire à compter du 7e mois de la grossesse.

Elles consultent régulièrement le service de psychologie, nourries, logées, suivies par un gynécologue, cadrées par des éducateurs qui leur assurent des formations en couture et autres. Elles attendent aussi la délivrance qui n’en est pas une, puisqu’une fois le bébé mis au monde, une longue et interminable lutte contre toute une société s’impose. Pourquoi me suis-je rendue dans ce centre ? L’idée de faire un travail plus approfondi sur le vécu troublant des mères célibataires au sein de notre contexte social me caressait l’esprit depuis longtemps. Certes, cette frange de la société largement marginalisée, est victime d’une sévère condamnation sociale qui lui vaut une condition d’existence misérable. Son statut est flou au sein de notre communauté, ce qui nécessite réellement que l’on se tourne vers la question par l’analyse minutieuse.

 

Le motif de ma visite au centre était en réalité le placement d’une jeune mère-fille âgée de 25 ans enceinte de 8 mois. En relation depuis 7 ans avec un homme qui lui a promis monts et merveilles, Nadia s’est retrouvée seule face à une grande responsabilité. Délaissée par un géniteur qui a fui lâchement sa responsabilité, épaulée par ses fidèles copines qui n’ont pas hésité à lui porter assistance, elle a décidé d’achever le dernier mois de sa grossesse dans un centre d’hébergement pour éviter un scandale que lui a évité jusqu’alors sa grossesse imperceptible.

 

Nadia se trouve actuellement, comme de nombreuse jeunes femmes algériennes, envahie d’incertitudes, confrontée à une situation ardue empreinte de confusion. Comment réagir lorsqu’on se retrouve enceinte, dans un contexte intolérant, contrainte d’endosser la responsabilité d’être précocement mère et devoir de surcroît trouver un moyen pour se tirer d’embarras avec un minimum de dégâts. Quel avenir nous réserve le destin ? Comment affronter les autres ? Qu’adviendra-t-il de l’enfant ? Comment supporter la fuite abjecte de l’amant qui promettait tant de bonheur auparavant ? Comment assumer sa responsabilité ? Le thème des mères célibataires au sein de notre société régit par les diktats du silence est un sujet d’une importance capitale qui prend notamment une ampleur considérable.

 

Evoquer le sujet en toute ouverture en touchant aux angles les plus négligés, n’est-il pas tenter de mieux le cerner pour mieux lui trouver des solutions radicales ?

 

Les avis divergent sur le thème entre la société qui condamne, les associations féministes qui luttent pour faire reconnaître la part de responsabilité importante du père et qui appellent à l’urgence de l’instauration de lois qui défendent les droits de la maman ainsi que du gosse né sous le statut de X et des victimes qui souffrent en silence. En matière de statistique, en 2007, le ministre de l’Emploi et de la Solidarité nationale a révélé que quelque 3000 enfants « illégitimes » naissent chaque année en Algérie. Il a également annoncé que la moyenne d’âge des mères célibataires est de 18 ans. Elles sont accueillies principalement dans les centres spécialisés de Diar Errahma, alors que 19 pouponnières accueillent les enfants abandonnés âgés de 0 à 6 ans. Ces chiffres, encore une fois, loin de refléter la vraie gravité du problème passée sous silence témoigne de l’ampleur de la situation. La responsabilité du géniteur.

 

Lorsque en 2006 un député s’est adressé au ministre de l’Emploi et de la Solidarité nationale en attaquant les mères célibataires et en appelant à leur flagellation en guise de punition du délit de l’entretien des relations sexuelles extra-conjugales, faisant preuve d’un radicalisme religieux, l’élu du peuple a omis de citer la part du géniteur, car scientifiquement parlant et jusqu’à preuve du contraire, la conception d’un bébé est l’œuvre de deux acteurs, l’homme et la femme. Cependant, dans notre société tous les regards sont braqués sur la femme alors qu’à aucun moment l’homme, autant responsable que la fille, n’est cité. Pourquoi cette injustice flagrante ?

 

Le même député, qui prétendait ne parler qu’au non de la chari’a semble oublier que l’islam préconise la même punition pour le même délit quel que soit le sexe de l’auteur. Qu’est-ce qui explique alors cet arbitraire outrancier ? N’est-ce pas là une preuve de machisme déclaré ? Ne faut-il pas au lieu de juger si sévèrement une mère célibataire, l’aider à affronter sa condition en la protégeant contre l’injustice sociale ? Et puis, n’est-il pas indispensable de rediscuter le statut de l’homme, responsable à son tour ?

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L’abandon de l’enfant, une décision pénible.

 

L’abandon de l’enfant n’est point une décision facile à prendre dans le cas d’une mère célibataire, mais dans une grande partie de cas cette perspective s’impose à la mère même si au départ elle s’entête à vouloir garder son rejeton. En effet, être seule et avoir à sa charge un enfant issue d’une relation clandestine n’est guère une sinécure au sein de notre contexte, ce qui rend la vie difficile à la mère. Si dans certains cas, des mères célibataires ont pu regagner la demeure familiale après avoir accouché, leur réinsertion s’est faite au prix de l’abandon du bébé, témoin d’un grave délit.

 

 

Le cas de Souad, une jeune fille originaire d’Alger, âgée de 22 ans est un exemple on ne peut plus illustrateur. Cette jeune personne qui, après avoir découvert tardivement sa grossesse, a recouru aux soins de sa mère, laquelle n’a pas tardé à mettre au courant son fils. D’un tempérament calme et raisonnable, le frère faisant preuve de maturité face à la dure réalité se renseigna sur les centres pour mères célibataires afin de placer sa sœur et éviter le scandale. L’abandon du bébé était la condition sine qua non, avant de retourner à la maison. Peu de temps après, l’enfant fut adopté et la mère fille fut mariée à un homme qui ignorait tout de son passé.

 

 

Mlle F. Salmi, sociologue, affirme que la perspective de l’abandon de l’enfant, douloureuse épreuve pour la mère et frustrante étape pour le bébé, est souvent l’unique échappatoire, car il est impossible pour une femme seule de lutter contre un contexte social répressif qui lui ôte tout droit à une existence digne. Reconnue coupable, elle ne peut que se plier à la volonté des siens. « Nous, dans notre tâche d’accompagnement social, déclare la sociologue, préférons que la mère fasse le bon choix et au vu des difficultés que peut rencontrer une mère fille, nous préférons assurer une vie décente au gosse au sein d’une famille d’accueil puisque la majorité des enfants finissent par être adoptés. La femme se libère ainsi d’une lourde charge. Seulement, il existe, faut-il préciser, des cas où la maman parvient à récupérer son gosse, le faire reconnaître par le père ou dans quelques cas, quitter le domicile familial et prendre seule la responsabilité de son bébé. Nous intervenons toujours selon le contexte et la spécificité de chaque cas, mais notre objectif est de respecter et l’intérêt de la mère et celui du gosse. »

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Mères célibataires, l’urgence d’une loi

Mme Maaskri Nouria, avocate près la cour d’Alger, n’a pas hésité à évoquer l’absence de lois qui protège la mère célibataire ou lui accorde un quelconque droit. « Aucune loi n’évoque le statut de la mère célibataire ni dans le code de la famille, encore moins dans la constitution. Cela est dû entre autre à la honte qui entoure le tabou ainsi que l’application de la Charia qui ne donne aucun droit aux enfants nés sous X, ni aux mères filles.

 

Concernant la reconnaissance paternelle par l’accomplissement du test d’ADN, notre interlocutrice, s’appuyant sur l’article 40 du code de la famille, ajoute que « le test d’ADN n’est appliqué que dans l’unique cas ou le couple marié voudrait confirmer la paternité de l’enfant. Le cas échéant, c’est-à-dire en l’absence de contrat de mariage ou de la Fatiha et en se référant à la chari’a, la maman n’a aucun droit pour emmener le père illégitime à reconnaître le gosse. »

 

Les mères célibataires, selon notre interlocutrice, continuent à être stigmatisées par la société, leur enfants, nés sous X, n’ont aucun droit et parfois, même pas de noms et ceci à cause de l’injustice qui apparaît déjà clairement dans le code de la famille qui institutionnalise une sous-citoyenneté des femmes. « Traiter radicalement ce fait sociétal passe, d’abord, par l’initiation de larges campagnes de sensibilisation visant à faire dissiper les préjugés sur ces victimes, à instaurer une communication familiale notamment, à appeler à une éducation sexuelle et inciter à une révision du code de la famille dans lequel des lois claires qui protègent la mère fille ainsi que son enfant doivent être adoptées », poursuit Mme Maaskri Nouria.

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Les centres d’accueil, un refuge

Le centre Darna est l’un des rares centres d’hébergement de filles mères en Algérie. Ce centre de prise en charge de femmes victimes de violence et du code de la famille apporte une aide sociale, psychologique et juridique aux victimes.

 

 

Mme F. Salmi, sociologue chargée des fonctions d’assistance sociale et d’écoute au niveau du centre Darna, estime que le sujet des mères célibataires n’est pas nouveau au sein de notre société, mais son ampleur est dû à la culture du silence qui régit les rapports sociaux ainsi qu’à la défaillance de la communication au niveau de la cellule familiale. « Le changement qui s’est opéré au niveau de la société, la libération des mœurs, la précocité des rapports sexuels, le manque criant d’éducation sexuelle, sont entre autres facteurs qui favorisent la propagation de ce fait social face auquel il est urgent de réagir par l’adoption de solutions efficaces, comme l’instauration d’une loi qui protège la maman et son rejeton. La famille, aujourd’hui démissionnaire, est appelée à remplir son rôle dans l’accompagnement de sa progéniture et d’entretenir un terrain de communication susceptible de protéger les enfants de tous les dangers. »

Les mères célibataires continuent à être stigmatisées et condamnées dans notre société, leurs enfants nés sous X sont encore moins à l’abri. Face à un problème sociétal pareil, il devient urgent de réfléchir à l’adoption de lois pour la protection de cette frange marginalisée et de bannir tous les préjugés qui retardent toutes formes d’évolution au sein de notre société.

 

 

Lematindz

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Certes, le sujet est quelque peu tabou, néanmoins certaines organisations défendent le cas de ces pauvres femmes. Ainsi, une organisation réclame une rente de 10 000 dinars mensuels pour ces mères célibataires souvent à la suite d'un viol.

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KABYLIE

 

Mourir ou disparaître dans la nature

 

Ils sont rares les cas de mères célibataires qui réussissent à vivre «normalement».

 

Récemment, une jeune fille de 19 ans et sa mère se sont retrouvées en prison à la suite d’un avortement clandestin. Leur famille subit, depuis, la honte. Il y a quelques années, une autre jeune fille, tombée enceinte à la suite d’une relation hors mariage, a été assassinée par ses parents. Ce meurtre, que tout le monde sait, est déguisé en suicide tout juste pour échapper aux poursuites judiciaires. Etre mère célibataire en Kabylie suppose des risques quant à mener une vie au sein de la communauté ; cela relève tout simplement de l’impossible.

 

Le poids des traditions et coutumes est tel en Kabylie qu’il n’y a point de place aux victimes, comprendre par victime la fille (mère), car l’homme, celui qui est à l’origine de la grossesse, n’est jamais inquiété, seule la fille subit les conséquences. Et quelles conséquences lorsqu’on sait qu’il ne peut s’agir que de mort ou répudiation.

 

En Kabylie, ils sont rares les cas de mères célibataires qui réussissent à vivre normalement s’il en existe, cela ne peut être qu’en ville là où vivent des communautés cosmopolites sans relation familiale en dehors de celle du voisinage. Dans les villages, une sorte d’entente tacite naît dès qu’un cas pareil se produit ; les parents réagissent pour faire subir à leur fille la mort ou la répudiation sans que les autres membres du village ne réagissent. C’est la loi du silence sur fond d’une complicité qui ne dit pas son nom.

 

Que reproche-t-on au juste à ces jeunes filles qu’on «assassine» où qu’on chasse à tout jamais? C’est d’avoir fait l’erreur qu’il ne fallait pas. Une faute impardonnable dans la société kabyle. Une grossesse hors mariage c’est la pire des hontes à faire subir à sa famille. Voilà comment est perçue la chose en Kabylie. La peur du qu’en-dira-t-on pousse les parents des filles concernées à agir en allant parfois jusqu’à commettre un meurtre pour laver l’affront. C’est comme ça que ça se passe en Kabylie depuis la nuit des temps et ça le restera encore longtemps dans certaines localités tant que les mentalités n’évolueront pas.

 

Si une fille tombe enceinte hors mariage son sort est vite scellé. La mort ou la répudiation. Sachant ce qui leur est réservé, elles sont nombreuses les filles qui font leur valise pour aller sous d’autres cieux, mais quels cieux si ce n’est d’aller grossir les rangs de la prostitution pendant que l’enfant, si la grossesse est menée à terme, est cédé aux institutions de l’Etat. Mais très souvent, heureusement d’ailleurs, ces cas de figure aboutissent à un mariage si toutefois le père reconnaît son acte. Un mariage est contracté sur-le-champ. Une sortie d’honneur pour tout le monde qui laisse la vie sauve à la victime et permet à l’enfant qui naîtra d’avoir un foyer, bref, une vie de famille. C’est en soi une évolution à noter dans la société. Mais la redjla continue à sévir en dépit d’une loi assez sévère à l’égard de ceux qui se rendent coupables d’un meurtre, quelle qu’en soit la raison. La fille mère reste la seule à subir les conséquences.

 

Une injustice de plus dans une société pourtant à l’avant-garde des luttes pour les libertés individuelles et collectives, mais qui, en réalité, cache un conservatisme des plus meurtriers. Entre les paroles et l’acte, il y a un grand fossé, devons-nous conclure sur la situation des moeurs en région de Kabylie

 

Source : L’Expression, 14 mai 2006

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Désacraliser la virginité, permettre l'union libre fera hurler les islamistes

mais nous n'aurions plus tous ces problèmes.

 

En France, la majorité des enfants naissent hors mariage et ils sont reconnus.

Personne ne se fait traiter de bâtard.

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