Guest D. ESSERHANE Posted August 16, 2012 Partager Posted August 16, 2012 Le temps des colonies est révolu C'est officiel. «L'Equateur a décidé d'accorder l'asile politique à Julian Assange après la demande adressée au président», a déclaré jeudi le ministre des Affaires étrangères Ricardo Patino, lors d'une conférence de presse à Quito. Londres a immédiatement répliqué par la voix du ministère britannique des Affaires étrangères. «Nous sommes déçus de la déclaration du ministre équatorien des Affaires étrangères, annonçant que l'Equateur a offert l'asile politique à Julian Assange», a déclaré un porte-parole du Foreign Office. «En vertu de la loi du Royaume uni, M. Assange ayant épuisé tous les recours, les autorités britanniques sont dans l'obligation de l'extrader vers la Suède. Nous allons nous conformer à cette obligation», a-t-il ajouté. Mercredi, le ton était monté entre les deux pays. La Grande-Bretagne avait menacé – sur un ton diplomatique – de retirer le statut diplomatique de l’ambassade d’Equateur pour intervenir manu militari. Un porte-parole du Foreign Office avait même expliqué que dans ce cas une mise en demeure devait être donnée une semaine avant l'intervention. «Il est trop tôt pour dire quand et si la Grande-Bretagne annulera le statut diplomatique de l'ambassade d'Equateur», avait confirmé le ministère des Affaires étrangères, joint par téléphone par l'agence Reuters. «Accorder l'asile ne changera fondamentalement rien». Ce à quoi Quito a déjà répliqué vertement. «Nous souhaitons être très clairs, nous ne sommes pas une colonie britannique. Le temps des colonies est terminé», avait déclaré mercredi le ministre équatorien des Affaires étrangères, Ricardo Patino dans un communiqué après une entrevue avec le président Rafael Correa. «Si l'intervention mentionnée dans un communiqué officiel britannique se produit, elle sera considérée par l'Equateur comme un acte inamical, hostile et intolérable, ainsi que comme une agression contre notre souveraineté, ce qui nous obligerait à répliquer par les moyens diplomatiques les plus fermes.» Ce matin, des échauffourées se sont produits aux abords de l’ambassade entre des manifestants pro-WikiLeaks et les forces de l’ordre. Acculé après avoir épuisé tous les recours judiciaires pour éviter son extradition en Suède, où il est accusé d’agressions sexuelles, Julian Assange s’est réfugié à l’ambassade d'Equateur à Londres le 19 juin dernier. Le citoyen australien et résident britannique a immédiatement demandé l’asile politique au petit pays d’Amérique du Sud. L’informaticien, responsable de la plus grande fuites de documents secrets de l’histoire, risque d'être arrêté s'il sort de la mission diplomatique, pour avoir enfreint les clauses de sa liberté conditionnelle, avait annoncé en amont la police britannique. Une manœuvre américaine ? Retour le 20 août 2010. Deux femmes avaient fait une déposition devant la police suédoise, l'une accusant Assange de viol et l'autre d'agression sexuelle. Le site de Julian Assange connaissait alors une notoriété mondiale pour avoir divulgué la vidéo secrète d’une attaque américaine héliportée à Bagdad qui avait fait une douzaine de morts civils, puis des dizaines de milliers de notes internes de l’U.S. Army sur le conflit afghan, et s’apprêtait à en faire de même pour la guerre en Irak. Le soir même de son inculpation, le 21 août, il était mis hors de cause par la procureure. Pour ses nombreux soutiens de par le monde, il s’agissait de faire taire WikiLeaks. Fin novembre 2010, le site diffuse quelque 250 000 notes et dépêches émanant de la diplomatie américaine. Pendant ce temps, l’enquête suédoise continue et finalement conduit à un ordre d’arrestation le 18 novembre 2010, et l’émission d’un mandat d’arrêt européen. Placé en liberté conditionnelle le 16 décembre 2010, Julian Assange vivait depuis en résidence surveillée, dans des conditions très strictes, dans un manoir au nord-est de Londres. Dans une interview accordée à notre journaliste David Le Bailly en 2010, le «réfugié politique» confiait qu’il redoutait d’être la victime d’une chasse aux sorcières menée par les Etats-Unis. «Il y a un projet de mise en accusation contre moi aux Etats-Unis pour espionnage. Joe Biden – le vice-président américain – l’a confirmé. C’est quelque chose que je prends très au sérieux. Je suis protégé, jusqu’à un certain point, par ma célébrité. Mais je suis devenu la cible principale, car des organisations aussi puissantes ne peuvent pas perdre la face. Pour cela, elles doivent abattre le personnage central, c’est-à-dire moi.», expliquait-il, avant d’ajouter que «l’extradition pour espionnage est une mesure politique classique». Le «rédacteur en chef» de WikiLeaks et ses avocats ont alors lancé une intense bataille médiatique sur le fond de l’affaire – en niant les agressions – tout en menant une contre-offensive sur la forme, en faisant appel de son extradition devant toutes les juridictions britanniques. Les conseils du l’informaticien de 40 ans, ont notamment fait valoir qu’Assange risquait, une fois en Suède, d'être extradé vers les Etats-Unis où il pourrait encourir la peine de mort pour divulgation de secrets d'Etat. La Cour suprême britannique a rejeté le dernier appel qu'il pouvait interjeter et donné le feu vert à son départ vers la Suède. Après l’échec de tous les recours légaux, la fuite vers l’Equateur lui a semblé être son ultime planche de salut. Peut-être était-ce ainsi qu’il fallait comprendre la dernière phrase lancée par Rafael Correa, au terme d’une interview croisée avec Assange, sur la chaîne pro-Kremlin Russia Today, le 22 mai dernier : «Bienvenue au club des persécutés! Citer Link to post Share on other sites
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