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Etre psychiatre en Algérie.


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Article intéressant.

Le psychiatre raconte qu'il a soigné un routier qui faisait le sud et qui avait vécu un faux barrage. Il raconte qu'en entendant le routier lui raconter ses propres mains tremblaient.

Les terroristes ont incendié les camions.

Ils nous ont ligoté et allongé au sol.

Ils ont commencé a égorger le premier chauffeur.

Puis le deuxième.

J'étais le troisième.

J'entendais tout ce qui se passait dit-il.

Puis l'armée est intervenue.

Il a été sauvé.

Aujourd'hui, il arrive à reconduire, mais quand il est à proximité d'où c'est passé le faux barrage il est pris d'une immense terreur.

 

Autre témoignage: Une femme de policier qui a vu son mari la poitrine déchiquetée par un tir de "ma3choucha" (fusil au canon scié).

 

Après plusieurs années, elle est va mieux. Elle est entrée dans la police et s'est remariée avec un policier.

 

Le propre médecin raconte que son frère faisait son service national il a été menacé de mort. Nous recevions des coups de tél: personne ne parlait, mais c'était des chants religieux...

 

Il raconte, ça va mieux chez mes patients. Mais il manque des psychiatres. 400 psychiatres algériens exercent en France.

Psychiatre en Algérie

LE MONDE | 26.02.2013 à 14h05 Par Isabelle Mandraud - Alger envoyée spéciale

 

Farid Bouchène, le 29 janvier.

 

 

Les lunettes en équilibre au bout du nez, Farid Bouchène, 58 ans, farfouille dans ses dossiers. Il cite une étude réalisée en 2005 qui comparait la santé de la population d'un quartier d'Alger, Cheraga, avec d'autres, à Marseille notamment. "Les résultats étaient effarants, avec un nombre incroyablement plus élevé ici de troubles, de phobies, de TOC [trouble obsessionnel compulsif], de dépressions à velléités suicidaires - ce qui, soit dit en passant, n'est pas conforme à notre culture - et de syndromes post-traumatiques." Il referme brusquement son tiroir, sans donner de chiffres. Regrette-t-il d'en avoir trop dit ? Le sujet est sensible.

 

Un mois et demi après l'attentat du 16 janvier sur le site gazier de Tigantourine, près d'In Amenas, dans le Sud algérien, qui a coûté la vie à 38 otages de plusieurs nationalités, il est trop tôt pour que ce psychiatre algérien mesure l'impact du drame. Mais nul doute, à ses yeux, que cela réveille un écho douloureux, "une méfiance, une suspicion", dans une population marquée par plus de dix ans de guerre civile entre l'armée et les islamistes. Elle a fait, selon les estimations, entre 150 000 et 200 000 morts dans les années 1990-2000. "Nous ne faisons que subir des événements traumatiques", soupire-t-il.

 

 

Le docteur Bouchène habite au premier étage d'un vilain immeuble à Douera, une banlieue déshéritée au sud-ouest d'Alger. Dans ce quartier "connu pour ses dealers", le praticien a fait la paix avec ses voisins. "Au début, ils pensaient que j'aurais la main légère pour délivrer des psychotropes, ensuite ils ont compris. J'en ai soigné trois ou quatre pour une dépendance à la drogue." Son modeste cabinet comporte une salle d'attente pour les femmes et une pour les hommes, séparées par un couloir. Il y a une table d'auscultation fatiguée. Des dessins d'enfants sur les murs. Et un défibrillateur neuf dans un coin.

 

"IL N'Y A PAS FOULE AU PORTILLON POUR CE MÉTIER"

 

Le praticien kabyle aux yeux clairs a d'abord exercé pendant vingt ans à Ghardaïa, où il a ouvert le premier et le seul cabinet de psychiatrie. Ironie du sort, le djihadiste commanditaire de l'assaut de Tigantourine, Mokhtar Belmokhtar, est originaire de cette ville, située aux portes du désert, à 600 kilomètres au sud d'Alger. Le docteur Bouchène, issu de la classe moyenne supérieure algéroise, est revenu s'installer dans la capitale en 2007.

 

"Nous ne sommes que 800 sur l'ensemble du territoire algérien, tout confondu, milieux hospitalier et privé, il n'y a pas foule au portillon pour ce métier", constate le médecin, président de l'Association algérienne des psychiatres d'exercice privé. Par comparaison, observe-t-il, 400 psys algériens exercent en France. "Jusque récemment, les gens préféraient aller voir le marabout, mais les choses évoluent, poursuit-il. La psychiatrie s'est vulgarisée avec le service civil." Ce système contesté, créé dans les années 1970, oblige les médecins spécialistes à passer deux ans dans les zones enclavées du pays.

 

Comment se prépare-t-on à soigner le traumatisme d'une nation quand on a soi-même eu peur ? Le docteur écarte les bras, en signe de fatalité. Son propre frère, qui achevait son service militaire dans les années 1990, a dû s'enfuir à l'étranger après avoir reçu des menaces de mort. Au domicile de la famille, le téléphone sonnait sans cesse, au grand désespoir de la mère, pour ne laisser entendre qu'un chant religieux, "une sorte de glas".

 

Le docteur Bouchène, diplômé de la faculté de médecine d'Alger, avoue avoir eu les mains qui tremblaient en écoutant le récit de l'un de ses patients. "Il était chauffeur routier et faisait le trajet entre le Nord et le Sud, d'Alger à Laghouat et retour. Un jour, il a été pris avec d'autres à un faux barrage. Les "terros" - les barbus - ont brûlé les camions et ligoté les routiers en les allongeant par terre. Ils ont commencé à égorger le premier, puis le deuxième. Mon patient entendait tout. Il était le troisième, quand l'armée est intervenue..."

 

HUIS CLOS SANGLANT

 

Il y a eu aussi cette femme qui a vu la poitrine de son mari policier exploser sous le tir d'une "mahchoucha" (un fusil à canon scié souvent utilisé par les islamistes dans les années 1990). "Je l'ai suivie pendant dix ans." Et d'autres victimes, encore, de cette terrible tragédie algérienne qui s'est déroulée "dans un climat de psychose, une tension indescriptible", étouffée par les autorités. Témoins de ce huis clos sanglant, pris eux-mêmes parfois à partie, les praticiens restés sur place ont pansé les plaies, en silence. Comme cet autre médecin, rencontré il y a quelques mois, dont la fille a fait partie des otages de l'Airbus d'Air France en 1994.

 

Des années à ressasser l'horreur, à tenter d'apaiser avec force tranquillisants des hommes et des femmes frappés de stress post-traumatique, connu par les victimes d'agressions physiques violentes ou d'attentats, sous son acronyme anglo-saxon, le PTSD (post-traumatic stress disorder). "Je n'ai pas le souvenir d'un barbu souffrant d'un PTSD à cause de ce qu'il a vécu", glisse au passage le psychiatre. Des années à gérer tant bien que mal le refoulé, avec son lot de "réactions d'évitement", avec tous ces non-dits étouffés lors de la réconciliation nationale imposée par le président Abdelaziz Bouteflika.

 

C'est à ce moment que des militants du Front islamique du salut (FIS, aujourd'hui dissous) puis des maquis sont revenus dans leur quartier d'origine. "Cette proximité avec les barbus a été mal vécue par des familles, mais cela s'estompe un peu", constate Farid Bouchène. "Nos barbus, ajoute pensivement le médecin, ne sont plus aussi virulents. Il faut peut-être vivre tous ensemble, respecter les modes d'existence différents. Je connais maintenant des salafistes tout à fait inoffensifs..."

 

L'ANXIÉTÉ S'EST ESTOMPÉE

 

A quelques signes, le psychiatre avait enregistré, ces derniers temps, un léger mieux parmi sa clientèle. Certes, le routier ne conduit plus. Chaque fois qu'il doit passer par la région où il était tombé sur le faux barrage, il est pris de panique. "Mais, comparé à son état au début, il va mieux", assure le docteur Bouchène. Tout comme la veuve du policier qui, raconte-t-il, est devenue elle-même officier de police. Ses enfants ont grandi. "Aux dernières nouvelles, elle s'est remariée avec un collègue de son défunt mari."

 

L'anxiété persiste dans la population, mais elle s'est estompée. "Jusqu'en 2003-2004, la proportion de mes patients directement concernés par le terrorisme atteignait plus de 10 %, aujourd'hui je l'estime à 1 %", dit le praticien, davantage préoccupé désormais par la toxicomanie chez les jeunes, consommateurs de cannabis ou de neuroleptiques. "La cocaïne commence en Algérie, mais c'est comme chez vous, elle est plutôt réservée à une classe sociale aisée." La tragédie algérienne n'a pas épargné non plus, il est vrai, les 15-20 ans, qui ont vécu les premières années de leur vie cloîtrés au domicile familial.

 

Son plus grand réconfort, le docteur Bouchène dit l'avoir trouvé auprès de deux patients originaires de Bentalha, une ville martyre située à 15 kilomètres d'Alger, cible d'un massacre en 1997 attribué aux islamistes, sans que l'armée intervienne. "L'un d'eux était tout fier de me dire que le prix du mètre carré était passé à 40 000, 50 000 dinars [entre 380 et 480 euros], comme ailleurs. Pour lui, cela signifiait que Benthala renaissait de ses cendres."

 

L'expérience du docteur Bouchène l'a aussi conduit à constater que, dans le Sud, les nomades semblent avoir mieux résisté à la "décennie noire". "D'abord, ceux qui vivent au gré des pâturages ont été moins touchés que les citadins par le terrorisme, leur traumatisme est moins intense. Et puis un nomade ne dira jamais qu'il est anxieux." Sur un ton plus personnel, il observe : "Les gens s'en fichent, de ce qui se passe en Egypte, ou ailleurs. Les Algériens ont le sentiment d'avoir vécu tout ça. Et, à part la Tunisie ou la Syrie, tous les autres pays avaient fermé leurs frontières à l'époque où nous subissions le terrorisme."

 

UNE POPULATION RÉSIGNÉE

 

La résurgence des traumatismes d'un passé récent expliquerait ainsi, selon lui, la relative passivité des Algériens face au "printemps arabe", vite éteint ici. Une passivité feinte, en réalité, mais qui a évolué depuis vers une colère contre les Occidentaux et "la France de Nicolas Sarkozy" en particulier, accusés d'avoir soutenu sans conditions les rebelles libyens contre le régime de Mouammar Kadhafi, permettant aux armes de se répandre dans toute la région.

 

Résignée, la population ne s'est pas étonnée outre mesure du mutisme complet observé par le chef de l'Etat, Abdelaziz Bouteflika, lors des événements de Tigantourine. La présidence avait en revanche diffusé un message d'encouragement à l'équipe nationale de football engagée dans la Coupe d'Afrique des nations... Comme si, en Algérie, on comptait toujours sur le foot pour exercer la meilleure des catharsis.

 

Il faudra attendre le 18 février, jour de la célébration du chahid ("martyr") en l'honneur des victimes de la guerre d'indépendance, un mois après la sanglante prise d'otages sur le site gazier, pour que le président sorte pour la première fois de son silence. Dans un message lu par un conseiller, il a rendu hommage à la "grande bataille" d'In Amenas, menée par l'armée "contre les forces du mal et de la destruction". Point. Pas de compassion pour les victimes. Comme, avant lui, il n'y avait pas eu de mots pour parler de la guerre civile.

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Psychiatre en Algérie

 

Les lunettes en équilibre au bout du nez, Farid Bouchène, 58 ans, farfouille dans ses dossiers. Il cite une étude réalisée en 2005 qui comparait la santé de la population d'un quartier d'Alger, Cheraga, avec d'autres, à Marseille notamment. "Les résultats étaient effarants, avec un nombre incroyablement plus élevé ici de troubles, de phobies, de TOC [trouble obsessionnel compulsif], de dépressions à velléités suicidaires - ce qui, soit dit en passant, n'est pas conforme à notre culture - et de syndromes post-traumatiques." Il referme brusquement son tiroir, sans donner de chiffres. Regrette-t-il d'en avoir trop dit ? Le sujet est sensible.

 

Un mois et demi après l'attentat du 16 janvier sur le site gazier de Tigantourine, près d'In Amenas, dans le Sud algérien, qui a coûté la vie à 38 otages de plusieurs nationalités, il est trop tôt pour que ce psychiatre algérien mesure l'impact du drame. Mais nul doute, à ses yeux, que cela réveille un écho douloureux, "une méfiance, une suspicion", dans une population marquée par plus de dix ans de guerre civile entre l'armée et les islamistes. Elle a fait, selon les estimations, entre 150 000 et 200 000 morts dans les années 1990-2000. "Nous ne faisons que subir des événements traumatiques", soupire-t-il.

 

 

Le docteur Bouchène habite au premier étage d'un vilain immeuble à Douera, une banlieue déshéritée au sud-ouest d'Alger. Dans ce quartier "connu pour ses dealers", le praticien a fait la paix avec ses voisins. "Au début, ils pensaient que j'aurais la main légère pour délivrer des psychotropes, ensuite ils ont compris. J'en ai soigné trois ou quatre pour une dépendance à la drogue." Son modeste cabinet comporte une salle d'attente pour les femmes et une pour les hommes, séparées par un couloir. Il y a une table d'auscultation fatiguée. Des dessins d'enfants sur les murs. Et un défibrillateur neuf dans un coin.

 

"IL N'Y A PAS FOULE AU PORTILLON POUR CE MÉTIER"

 

Le praticien kabyle aux yeux clairs a d'abord exercé pendant vingt ans à Ghardaïa, où il a ouvert le premier et le seul cabinet de psychiatrie. Ironie du sort, le djihadiste commanditaire de l'assaut de Tigantourine, Mokhtar Belmokhtar, est originaire de cette ville, située aux portes du désert, à 600 kilomètres au sud d'Alger. Le docteur Bouchène, issu de la classe moyenne supérieure algéroise, est revenu s'installer dans la capitale en 2007.

 

"Nous ne sommes que 800 sur l'ensemble du territoire algérien, tout confondu, milieux hospitalier et privé, il n'y a pas foule au portillon pour ce métier", constate le médecin, président de l'Association algérienne des psychiatres d'exercice privé. Par comparaison, observe-t-il, 400 psys algériens exercent en France. "Jusque récemment, les gens préféraient aller voir le marabout, mais les choses évoluent, poursuit-il. La psychiatrie s'est vulgarisée avec le service civil." Ce système contesté, créé dans les années 1970, oblige les médecins spécialistes à passer deux ans dans les zones enclavées du pays.

 

Comment se prépare-t-on à soigner le traumatisme d'une nation quand on a soi-même eu peur ? Le docteur écarte les bras, en signe de fatalité. Son propre frère, qui achevait son service militaire dans les années 1990, a dû s'enfuir à l'étranger après avoir reçu des menaces de mort. Au domicile de la famille, le téléphone sonnait sans cesse, au grand désespoir de la mère, pour ne laisser entendre qu'un chant religieux, "une sorte de glas".

 

Le docteur Bouchène, diplômé de la faculté de médecine d'Alger, avoue avoir eu les mains qui tremblaient en écoutant le récit de l'un de ses patients. "Il était chauffeur routier et faisait le trajet entre le Nord et le Sud, d'Alger à Laghouat et retour. Un jour, il a été pris avec d'autres à un faux barrage. Les "terros" - les barbus - ont brûlé les camions et ligoté les routiers en les allongeant par terre. Ils ont commencé à égorger le premier, puis le deuxième. Mon patient entendait tout. Il était le troisième, quand l'armée est intervenue..."

 

HUIS CLOS SANGLANT

Il y a eu aussi cette femme qui a vu la poitrine de son mari policier exploser sous le tir d'une "mahchoucha" (un fusil à canon scié souvent utilisé par les islamistes dans les années 1990). "Je l'ai suivie pendant dix ans." Et d'autres victimes, encore, de cette terrible tragédie algérienne qui s'est déroulée "dans un climat de psychose, une tension indescriptible", étouffée par les autorités. Témoins de ce huis clos sanglant, pris eux-mêmes parfois à partie, les praticiens restés sur place ont pansé les plaies, en silence. Comme cet autre médecin, rencontré il y a quelques mois, dont la fille a fait partie des otages de l'Airbus d'Air France en 1994.

 

Des années à ressasser l'horreur, à tenter d'apaiser avec force tranquillisants des hommes et des femmes frappés de stress post-traumatique, connu par les victimes d'agressions physiques violentes ou d'attentats, sous son acronyme anglo-saxon, le PTSD (post-traumatic stress disorder). "Je n'ai pas le souvenir d'un barbu souffrant d'un PTSD à cause de ce qu'il a vécu", glisse au passage le psychiatre. Des années à gérer tant bien que mal le refoulé, avec son lot de "réactions d'évitement", avec tous ces non-dits étouffés lors de la réconciliation nationale imposée par le président Abdelaziz Bouteflika.

 

C'est à ce moment que des militants du Front islamique du salut (FIS, aujourd'hui dissous) puis des maquis sont revenus dans leur quartier d'origine. "Cette proximité avec les barbus a été mal vécue par des familles, mais cela s'estompe un peu", constate Farid Bouchène. "Nos barbus, ajoute pensivement le médecin, ne sont plus aussi virulents. Il faut peut-être vivre tous ensemble, respecter les modes d'existence différents. Je connais maintenant des salafistes tout à fait inoffensifs..."

 

L'ANXIÉTÉ S'EST ESTOMPÉE

 

A quelques signes, le psychiatre avait enregistré, ces derniers temps, un léger mieux parmi sa clientèle. Certes, le routier ne conduit plus. Chaque fois qu'il doit passer par la région où il était tombé sur le faux barrage, il est pris de panique. "Mais, comparé à son état au début, il va mieux", assure le docteur Bouchène. Tout comme la veuve du policier qui, raconte-t-il, est devenue elle-même officier de police. Ses enfants ont grandi. "Aux dernières nouvelles, elle s'est remariée avec un collègue de son défunt mari."

 

L'anxiété persiste dans la population, mais elle s'est estompée. "Jusqu'en 2003-2004, la proportion de mes patients directement concernés par le terrorisme atteignait plus de 10 %, aujourd'hui je l'estime à 1 %", dit le praticien, davantage préoccupé désormais par la toxicomanie chez les jeunes, consommateurs de cannabis ou de neuroleptiques. "La cocaïne commence en Algérie, mais c'est comme chez vous, elle est plutôt réservée à une classe sociale aisée." La tragédie algérienne n'a pas épargné non plus, il est vrai, les 15-20 ans, qui ont vécu les premières années de leur vie cloîtrés au domicile familial.

 

Son plus grand réconfort, le docteur Bouchène dit l'avoir trouvé auprès de deux patients originaires de Bentalha, une ville martyre située à 15 kilomètres d'Alger, cible d'un massacre en 1997 attribué aux islamistes, sans que l'armée intervienne. "L'un d'eux était tout fier de me dire que le prix du mètre carré était passé à 40 000, 50 000 dinars [entre 380 et 480 euros], comme ailleurs. Pour lui, cela signifiait que Benthala renaissait de ses cendres."

 

L'expérience du docteur Bouchène l'a aussi conduit à constater que, dans le Sud, les nomades semblent avoir mieux résisté à la "décennie noire". "D'abord, ceux qui vivent au gré des pâturages ont été moins touchés que les citadins par le terrorisme, leur traumatisme est moins intense. Et puis un nomade ne dira jamais qu'il est anxieux." Sur un ton plus personnel, il observe : "Les gens s'en fichent, de ce qui se passe en Egypte, ou ailleurs. Les Algériens ont le sentiment d'avoir vécu tout ça. Et, à part la Tunisie ou la Syrie, tous les autres pays avaient fermé leurs frontières à l'époque où nous subissions le terrorisme."

 

UNE POPULATION RÉSIGNÉE

 

La résurgence des traumatismes d'un passé récent expliquerait ainsi, selon lui, la relative passivité des Algériens face au "printemps arabe", vite éteint ici. Une passivité feinte, en réalité, mais qui a évolué depuis vers une colère contre les Occidentaux et "la France de Nicolas Sarkozy" en particulier, accusés d'avoir soutenu sans conditions les rebelles libyens contre le régime de Mouammar Kadhafi, permettant aux armes de se répandre dans toute la région.

 

Résignée, la population ne s'est pas étonnée outre mesure du mutisme complet observé par le chef de l'Etat, Abdelaziz Bouteflika, lors des événements de Tigantourine. La présidence avait en revanche diffusé un message d'encouragement à l'équipe nationale de football engagée dans la Coupe d'Afrique des nations... Comme si, en Algérie, on comptait toujours sur le foot pour exercer la meilleure des catharsis.

 

Il faudra attendre le 18 février, jour de la célébration du chahid ("martyr") en l'honneur des victimes de la guerre d'indépendance, un mois après la sanglante prise d'otages sur le site gazier, pour que le président sorte pour la première fois de son silence. Dans un message lu par un conseiller, il a rendu hommage à la "grande bataille" d'In Amenas, menée par l'armée "contre les forces du mal et de la destruction". Point. Pas de compassion pour les victimes. Comme, avant lui, il n'y avait pas eu de mots pour parler de la guerre civile.

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.......................Espère que tous les psys Algériens ne se trompent pas de .................peuple !!! :gun_bandana::gun_bandana:

 

Et qu'ils ne forcent pas la dose à certains aliénés. Suivez le regard. :rolleyes:

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