Sissa 10 Posted June 17, 2013 Partager Posted June 17, 2013 De la musique avant toute chose, Et pour cela préfère l’Impair Plus vague et plus soluble dans l’air, Sans rien en lui qui pèse ou qui pose. Il faut aussi que tu n’ailles point Choisir tes mots sans quelque méprise : Rien de plus cher que la chanson grise Ou l’Indécis au Précis se joint. C’est de beaux yeux derrière des voiles, C’est le grand jour tremblant de midi ; C’est par un ciel d’automne attiédi, Le bleu fouillis des claires étoiles ! Car nous voulons la Nuance encor, Pas la couleur, rien que la Nuance ! Oh ! la nuance seule fiance Le rêve au rêve et la flûte au cor ! Fuis du plus loin la Pointe assassine, L’Esprit cruel et le Rire impur, Qui font pleurer les yeux de l’Azur, Et tout cet ail de basse cuisine ! Prend l’éloquence et tords-lui son cou ! Tu feras bien, en train d’énergie, De rendre un peu la Rime assagie. Si l’on y veille, elle ira jusqu’où ? Ô qui dira les torts de la Rime ! Quel enfant sourd ou quel nègre fou Nous a forgé ce bijou d’un sou Qui sonne creux et faux sous la lime ? De la musique encore et toujours ! Que ton vers soit la chose envolée Qu’on sent qui fuit d’une âme en allée Vers d’autres cieux à d’autres amours. Que ton vers soit la bonne aventure Éparse au vent crispé du matin Qui va fleurant la menthe et le thym… Et tout le reste est littérature. Paul Verlaine :nopity: :nopity: Citer Link to post Share on other sites
Eclektos 10 Posted June 17, 2013 Partager Posted June 17, 2013 Merci pour ce choix. Rien de plus cher que la chanson grise Ou l’Indécis au Précis se joint. C'est là où on se rend compte que l'absence d'un accent peut s'avérer... grave ! Cela dit, il est clair que ce poème de Verlaine a plus une valeur didactique qu'esthétique. Il fait écho, en quelque sorte, tout en s'y opposant, à un autre Art poétique, celui classique de Boileau (XVIIe s.), lui-même inspiré d'Horace. Verlaine se fait ici le porte-parole de son clan, les symbolistes et autres poètes maudits, en invitant à plus d'originalité et à un refus du dictat de la rime, de la déclamation, etc. Citer Link to post Share on other sites
HILAR 10 Posted June 17, 2013 Partager Posted June 17, 2013 Trahison fidèle-Victor Segalen Tu as écrit : " Me voici, fidèle à l'écho de ta voix, taciturne, inexprimé. " Je sais ton âme tendue juste au gré des soies chantantes de mon luth : C'est pour toi seul que je joue. Ecoute en abandon et le son et l'ombre du son dans la conque de la mer où tout plonge. Ne dis pas qu'il se pourrait qu'un jour tu entendisses moins délicatement ! Ne le dis pas. Car j'affirme alors, détourné de toi, chercher ailleurs qu'en toi-même le répons révélé par toi. Et j'irai, criant aux quatre espaces : Tu m'as entendu, tu m'as connu, je ne puis pas vivre dans le silence. Même auprès de cet autre que voici, c'est encore, C'est pour toi seul que je joue. Citer Link to post Share on other sites
HILAR 10 Posted June 17, 2013 Partager Posted June 17, 2013 Supplique - Victor Segalen ...;) Tu seras priée de sourires, de regards et de certains abandons, et d'offrandes que tu repousses par principe, jeune fille encore ; Tu seras implorée de dire quoi tu veux, ce dont tu as soif, les parures à ton gré, - rouges linges nuptiaux, poèmes, chants et sacrifices... * Cet homme indigne, - moi, - indigne de mendier, ne supplie de toi que l'apparence, la forme qui te hante, le geste où tu te poses, oiseau dansant. Ou bien ta voix non modulée, ou bien ce reflet, bleu dans tes cheveux. Mais ton âme, lourde dix mille fois aux yeux du Sage, Cache bien ton âme au fond d'elle, déconcertante, Belle jeune fille, tais-toi. Citer Link to post Share on other sites
HILAR 10 Posted June 17, 2013 Partager Posted June 17, 2013 Extase-Victor Segalen Extase Suis-je ici vraiment ? Suis-je parvenu si haut ? Paix grande et naïve et splendeur avant-dernière, Touchant au chaos où le Ciel qui plus n'espère Se referme et bat comme une ronde paupière. Comme le noyé affleurant l'autre surface Mon front nouveau-né vogue sur les horizons. Je pénètre et vois. Je participe aux raisons. Je tiens l'empyrée, et j'ai le Ciel pour maisons. Je jouis à plein bord. De tous mes esprits. J'irrite Mes sens élargis au-delà des sens, plus vite Que l'esprit, que l'air. Je me répands sans limites, J'étends les deux bras : je touche aux deux bouts du Temps. Citer Link to post Share on other sites
Sissa 10 Posted June 17, 2013 Author Partager Posted June 17, 2013 L’instant en sa présence A des allures d’éternité Passionnément intense On se doit de l’honorer Elle est la quintessence Sacrée des sens éclairés Intime du grand silence Elle sait le faire parler Stéphen Moysan Citer Link to post Share on other sites
HILAR 10 Posted June 17, 2013 Partager Posted June 17, 2013 Bonsoir sissa Très beau je le garde celui-ci vraiment beau ! Citer Link to post Share on other sites
Séphia 896 Posted June 17, 2013 Partager Posted June 17, 2013 c'est un bien joli poème dans lequel Verlaine réalise précisément ce qu'il attend de la poésie; moins une affaire de raison que de sensibilité... merci Sissa pour le partage... Citer Link to post Share on other sites
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