jazy 10 Posted April 8, 2014 Partager Posted April 8, 2014 Voici un bel article (tronqué) plein de bon sens que je voulais partager... Retrouvez le lien en bas de page pour le lire en entier. Ecrit sous la potence du quatrième mandat Par Mohamed Chebila, moudjahid. Petit matin de gueule de bois. L’homme rempile. Je tourne en rond dans ma chambre, rompu comme si j’avais couru le marathon. Sur le guéridon, des journaux pêle-mêle. Panorama d’une semaine particulière. Un titre les résume tous : «Il a osé !» (......) La villa Boumaaraf (....) Que puis-je répondre à ceux qui m’interrogent et qui s’indignent des allégeances impudiques démontrées le jour de la rotonde.(3) Par les séniles, les repentis, les sans-honte, les insatiables de la prébende, les petits seigneurs de la haute ville qui, au premier rang, réduit à la piètre hauteur de l’estrade, eux qui ont connu d’autres altitudes, applaudissaient à la criée des saltimbanques. Abus de faiblesse ? Non abus de largesses! (....) Le zéro et l’infini Ils croient là-bas, à Souk Ahras, à Ouenza, à Annaba, à Tébessa que, parce que je vis à Alger, je suis forcément dans les secrets des dieux. Leurs indignations sont inénarrables. Le quatrième mandat que veut s’arroger un président, définitivement malade, les assomme. Ils ragent. Ils imaginent des colères divines qui viendraient rendre justice à leur pays. Je ne sais quoi dire à ceux qui pensent encore que l’armée est celle-là qu’ils ont créée. Des interrogations éperdues fusent, refus têtu d’admettre l’impensable : «Pourquoi Gaïd Salah tolère-t-il un tel acte contre nature ?». «Pourquoi les jeunes sont-ils indifférents ?» «Pourquoi les généraux insultés se taisent ?» «Tu nous as, à chaque fois, dit que le général Toufik défendra toujours l’Algérie. Où est-il ?». «Mnin khrej hadha Amara Benyounes ?». La tristesse de ces vieux compagnons passe en moi, tristesse épaisse et lourde qui fait soudain sentir le poids de l’immonde et impudique loi du plus fort. Les généraux !... Certaines épaulettes renforcent la carrure et fond croire à la bonne étoile. Bouteflika a pris son temps pour les ternir. Nezzar ne parle plus. Il a sous-traité son silence à un engrenage patient et précis. L’horloge suisse marque l’heure de la revanche. Bouteflika n’y est pour rien, bien sûr.Lamari a été trahi. Il en est mort. Tewfik se débat, impuissant, dans une toile de l’araignée cousue main, dans l’ombre, avec une extraordinaire patience par Fra Diavolo(4). (....)La quête éperdue du quatrième mandat sonne comme cette supplication pathétique qui a traversé les siècles : «encore une minute, monsieur le bourreau». Hier, fringant et maniant élégamment le verbe, l’homme avait bénéficié de l’immense naïveté des «décideurs», qui — monsieur de Buffon consulté(5) — avaient vu en lui le spécimen «le moins mauvais» de l’espèce politique algérienne. Quinze ans plus tard, rivé à un fauteuil roulant, le visage ravagé par l’acharnement thérapeutique, les yeux hagards, il est imposé par la volonté d’un seul général. ANP, chère à nos cœurs, tu es innocente du passé outre insensé que Gaïd Salah entérine en ton nom. (....) Le dernier des généraux Il nous restait un dernier espoir. Un général. Un ancien. Celui qui a croisé le fer avec les tueurs et qui les a réduits. Celui qui était revenu en 1993 de son exil volontaire, dire à ses anciens camarades qui affrontaient la barbarie terroriste : «Pourvu que vous m’acceptiez, je reprends le treillis. Je désire me mettre au service de mon pays, à n’importe quel échelon.» Ils firent de lui ce que nous savons. Il est venu. Il a vu. Il est reparti avant d’avoir totalement vaincu. Mars 2014… On attendait de lui un mot, un seul, celui que lance le soldat placé au carrefour : «halte là !» et rien d’autre. On attendait de Liamine Zeroual un cri du cœur : «halte au quatrième mandat de la honte, halte à une présidence par procuration, halte à la corruption, halte à la dictature de la famille». Il n’a pas su dire ces quelques mots. (....) Le jour de gloire de monsieur Yo Yo En boucle, sur l’Unique, le préposé aux dithyrambes, les sourcils épilés et redessinés au khol, «litanise» les vertus du grand stabilisateur sans lequel le ciel nous tomberait sur la tête. La nouvelle tombe. C’est le scoop de la semaine. Ouyahia ressuscite. Bel et bien vivant, frais, dispos, il a sauté à pieds joints dans la galère. Il a accepté un étrange rôle. Connaissant les us et coutumes de la fratrie, et convaincu que le salut est dans la retraite, il était parti sur la pointe des pieds, et chacun de nous lui a trouvé du mérite. A quel signal a-t-il obtempéré ? A un mouvement saccadé de l’index incurvé en crochet ou à un petit coup de sifflet? Vous venez de faire la preuve, Si Ahmed, que dans les ermitages forcés ne pousse pas la fleur de sagesse mais le calice du fiel. Qu’est-ce qui vous a fait revenir ? L’ardent désir de prendre une revanche sur la meute qui, au signal, avait tailladé vos mollets ou bien la perspective d’être demain, par la grâce de Buridan l’ancien, le maître de la carotte magique, l’ombre de l’ombre de lui-même ? Les deux sans doute. J’ai fait un rêve. J’ai vu dans cet état de veille inconsciente, qu’on dit être le sommeil, un autre Ahmed Ouyahia, l’ancien énarque qui avait donné un maître coup de pied dans les containers de «l’argent sale qui gouverne», le chef de gouvernement «qui a mal à (son) pays», le fusible récalcitrant qui a eu le courage de dire «l’échec est collectif», le vigile qui a communiqué au DRS les pistes qui lui ont permis d’aller droit à Chakib Khelil, l’homme politique avisé qui a conclu «que le quatrième mandat ne servira pas l’Algérie». J’ai vu, dans mon rêve, cet homme les épaules recouvertes par un burnous blanc tissé par sa grand-mère, la moustache hérissée, à l’avant plan des crêtes du Djurdjura, asséner en direct sur la TV Ennahar : «Ils m’ont proposé de revenir uniquement pour les aider à passer le gué. Je ne suis pas dupe. Ils veulent obtenir un sursis pour continuer à faire ce qu’ils ont fait depuis le début. Je ne mange pas de ce pain. Je maintiens ce que j’ai dit : l’argent sale gouverne le pays. Je ne veux pas être complice. Je retourne chez moi. Algériens réveillez-vous, refusez ce quatrième mandat du cynisme, de l’arrogance et du mépris!». Ah Si Ahmed, quel coup mortel vous auriez donné à ceux qui pensent que tout le monde est «achetable» et qu’il suffit d’y mettre le prix. Ainsi, dédaigneux de leur procédé, vous auriez mis un point final, à vous tout seul, à leurs contorsions. Je fais quelquefois dans l’anecdote quand elle a un côté épique. Certaines occurrences, de temps à autre, offrent à un homme son jour de gloire. Elles fixent l’instant fugitif de sa vie par leur densité et lui confèrent la seule dimension qui vaille, celle de la grandeur. Les humeurs du sérail avaient fait de vous un homme- yoyo. Vous connaissez, bien sûr, le jeu de la figurine au bout du fil que le garnement fait redescendre d’un mouvement brutal de la dextre dès qu’elle monte un peu. Votre prestation sur Ennahar a cassé le fil. Vous êtes à jamais par terre. Vous ne perdiez, jadis, que pour un temps, le hall monumental du palais du gouvernement, vous venez de rater pour toujours la montée des marches du palais. Vous n’aurez pas l’oscar. Vous ne serez jamais président, Si Ahmed. Vous avez manqué le podium où trônent les grands Kabyles qui, l’aura de la Soummam pour seul viatique, ont conduit l’Algérie à la table d’Evian.(......) Au passage, une pensée à Yazid Zerhouni qui a, le premier, dénoncé la loi Chakib sur les hydrocarbures. Il avait mis sa démission dans la balance. J’ai eu une copie de sa lettre sous les yeux. Il parlait de gravissime trahison. Il n’est revenu sur sa décision qu’une fois assuré que la loi sera abrogée. Une pensée aussi au moudjahid Daho Ould Kablia, plein d’usages et de raison, qui a montré que la loyauté avait ses limites et qui a fait savoir qu’il ne serait pas partie prenante dans la partie du quatrième mandat qui montrait le bout du nez. Il est rentré chez lui la tête haute et l’âme en paix. Si Ahmed, quel est donc ce bout touchant sur votre tempe qui vous a conduit à un aussi incompréhensible reniement, qui vous a conduit à rejoindre avec armes et bagages le camp de ceux que vous dénonciez hier ? A quel prix avez-vous accepté de revêtir la soutane du bon apôtre du quatrième mandat ? Sans doute le secret espoir de devenir vice-président. Attendez que cesse de souffler pour eux le septentrion et vous verrez les «vices» qu’ils vous réservent. Ouvrez donc les yeux. La place est déjà occupée. Le titulaire de droit divin, le Bien Heureux, (traduisez, Si Ahmed, vous êtes un parfait bilingue), s’y vautre depuis le premier jour. Ecoutez le batteur émérite, (Amar-El Gafsi eli tabal ouidansi) quand il assure qu’«un train en cache un autre». Il n’y a pas de place pour deux dans le diwan. Larbi Belkheir l’a appris, jadis, à ses dépens. Depuis que les anathèmes de Saâdani sont restés impunis, nous savons qu’il n’y a plus de deus ex-machina qui viendrait, comme au théâtre, installer, subrepticement, un fauteuil dans le décor. Lorsque, pressé comme un citron, vous n’aurez plus rien à donner, ils vous feront partir sans autre forme de procès et vous partirez, les yeux humides et la mine défaite en grand danger d’être rossé. D’autres Yahya Guidoum, hommes des bonnes besognes, seront toujours prêts à reprendre du service. Tu seras un homme, mon fils… (....) Benflis avez-vous eu raison d’y aller? Conservez-vous le moindre doute sur l’issue de la mascarade en cours? Si vous répondez par l’affirmative, il faudrait vous élire à la dignité du plus grand naïf au monde. Si Ali, vous vous êtes attaqué à la montagne avec une pioche. Ne récriminez pas contre la fraude. La fraude n’a rien à voir avec le bourrage annoncé des urnes. La scandaleuse tromperie réside dans la candidature d’un homme qui n’a plus la force d’assumer les lourdes servitudes de la charge et qui le reconnaît lui-même. Cette fraude originelle, cette atteinte à l’honneur d’un peuple, contraint de subir une présidence par procuration, vous l’avez tolérée et admise en acceptant de jouer le rôle que la mécanique des élections à l’algérienne vous a imparti. Le jour d’après, lorsque Bélaïz aura, magnanime, doublé ou triplé votre score de 2004 ; (un encouragement pour la prochaine fois, rira-t-il sous cape) (....) Qui êtes-vous monsieur le président ? Vous ne pouvez pas me répondre. Je sais. Vous êtes trop malade pour articuler une seule phrase. Vous avez d’ailleurs écrit une lettre à défaut de pouvoir parler. Je dirai donc quelques mots à votre place. (....) Le danger vous émoustille et met à l’épreuve votre sens de la manœuvre. La réussite de la feinte est votre suprême délice. Vous avez porté le coup d’Etat par personne interposée au sommet des arts politiques. Vous ne nourrissez jamais de sentiments de haine même envers ceux qui vous ont offensé au temps de votre traversée du vide, ce «no erguez land» qui désespère les has been». Vous leur dédiez la plus mortelle des pointes, le silex ciselé qui reste dans la plaie. Votre adresse à Abdesslem, le vaguemestre d’Accra, en est un cas fameux. La médaille qui a accompagné votre investiture, présentée sur un écrin de soie par le survivant des 22, vous est précieuse, non pour le symbole qu’elle représente, mais parce qu’elle garde la trace des larmes de Banaouda. Pour asseoir, à vie, votre pouvoir et les privilèges de votre famille, vous vous êtes occupé à plein temps à diviser les membres de la hiérarchie militaire et à accentuer leurs discordes, à briser leur bague de Soliman, à corrompre une partie de la classe politique, à user de la pacotille contre les jeunes Algériens, et à fabriquer par l’argent une phalange d’inconditionnels. Cette redoutable capacité à réussir tout ce que vous entreprenez avait un seul ressort : l’ambition d’ETRE au-dessus des autres. L’Algérie dans votre canevas n’était qu’un accessoire et ses habitants un simple parterre. Vous voilà donc au sommet par la grâce de vous-même. Votre système fonctionne désormais en roue libre. Les institutions de l’Etat ne sont plus au service du peuple algérien. Elles sont une mécanique à votre unique profit. La Constitution n’est plus la loi fondamentale dont procèdent toutes lois. Elle se résume à une loi : la vôtre ! Le Conseil constitutionnel s’incline devant le droit divin. Et, soudain, alors que tout baignait dans votre ordre, un coup de tonnerre dans votre ciel serein. Le quatrième mandat, vous le voulez comme la plus belle de vos victoires. Convaincre le monde que vous êtes plus fort que jamais, plus fort que ceux qui disent que vous n’êtes plus en état de cogiter, de projeter et d’agir. Le 17 avril en fera la preuve. Plus la tâche est difficile et plus vous vous obstinez. Ceux qui vous décrivent tel que vous êtes, un vieil homme malade et accro au pouvoir ont perdu le sens commun. Ils délirent. Il leur en cuira. Les cinq chevaux légers dont vous tenez la bride courent l’Algérie. Ils écument la campagne. Ils raclent les fonds de tiroirs de votre maigre popularité passée. Ils hennissent devant des auditoires contraints que votre quotient intellectuel est supérieur à celui de tous les Algériens réunis. Ils s’étranglent de fureur si on ricane. On les croyait gens de bon sens, leur démesure, leurs outrances, traduisent votre emprise pharaonique sur eux. Vous êtes «ELAZZIZ». Dieu. Ghoul, l’islamiste à éclipses, le ministre des transports de joie, connaît ses classiques, il nous refera, au besoin, le coup du scanner. Observons le ciel, au-dessus du «5-Juillet», le 18 avril, les lettres qui composent votre nom vont apparaître sur l’écran des nuages. Le machine huilée va sonner, le 17 avril, soixante-trois fois par l’urne violentée, la perfusion sans laquelle vous ne sauriez vivre, obtenue au prix de la fraude, de la division du peuple et de l’odeur de la terre brûlée. Lorsque vous jurerez sur le saint Coran, d’une voix à peine audible que vous aimez l’Algérie et que vous respectez la Constitution, rappelez-vous, à l’orée de votre quatrième paradis terrestre, ce que vous avez dit un jour, le pied à peine sorti de la tombe : lahila maa rab el alamine. M. C. « Le Soir d'Algérie » http://www.lesoirdalgerie.com/articles/2014/04/08/article.php?sid=161963&cid=41 Citer Link to post Share on other sites
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