lettre à M le président de la 3° république

[B.KHELFAOUI 10]

LETTRE A MONSIEUR LE PRESIDENT DE LA 3° REPUBLIQUE

 

Par Benaoumeur KHELFAOUI*

« (…) Je ne veux nullement faire ce que je vous interdis. Je ne veux que la réforme, autant que je le puis. Et ma réussite ne dépend que d’Allah. En Lui je place ma confiance, et c’est vers Lui que je reviens repentant. »1

 

 

Votre excellence, Monsieur le Président,

Troublé et ému par d’abracadabrantes émotions et bien que peinant à me délivrer de la résonnance des récents discours de tractations, qui ont caractérisé cette exceptionnelle élection - quant à la miraculeuse urne et sa tumultueuse gestation, là n’est pas la question !…

Le contexte me dictant - devoir citoyen actant - de vous présenter mes respectueuses Félicitations pour « la confiance » dont les héritiers de Ben-Boulaid et Ben-Mhidi (et tous les éternels héros de nos glorieuses révolutions, de Massinissa à Zabana qui a divinement déboussolé la terrifiante décapitation !) vont vous investir par procuration, cependant je suis plus tenté - sincérité, naïve soit-elle, « en voilà une obligation ! » - de prier pour vous, loin de Cheaayeb Lekhdim une quelconque éphémère tarification !, en invoquant le Seigneur Tout-Puissant, quoique sachant que ses voies n’ont aucune pénétration !, pour qu’il vous assiste par sa divine bénédiction et ait pitié de l’être humain que vous êtes tant la charge de vos obligations, qui va peser de tous ses fardeaux sur vos épaules, n’est pas du champ lexical " Facilitation" …! « Nous avions proposé aux cieux, à la terre et aux montagnes la responsabilité (de porter les charges, de faire le bien et d’éviter le mal).Ils ont refusé de la porter et en ont eu peur, alors que l’homme s’en est chargée ; car il est très injuste (envers lui-même) et très ignorant. »2

Désormais, la campagne électorale est arrivée à son terme ! Enfin, une lueur de calme vient déloger la tumultueuse réclame ! Ainsi, cette expédition présidentielle des six « Mahdi » dont une exceptionnelle Dame, aura donc duré - contre vents et marrées - le temps que consacre une bougie à sa flamme…Que retiennent les bonnes âmes, caractérisant les électeurs hommes et femmes, qui scrutent un nouveau sésame à même de leur fournir, par enchantement, les précieuses et efficaces armes, en mesure de sculpter un sourire de bonheur et d’espoir sur leurs visages sabrés par les larmes, depuis les enfumades de Dahra jusqu’à la décennie des braises et des lames…

 

En récepteurs dociles et inébranlablement optimistes, en théorie comme en pratique, nous avons mémorisé voire valorisé, pour ne plus être de nouveau terrorisés, le slogan, sensé dégager plus d’une charge sémantique, « Notre avenir entre nos mains ! ». Néanmoins, cette expression emblématique, quoique dépourvue de l’actant nodal, le nœud des nœuds3, se métamorphosera - c’est plus que logique - à partir de ce 18 avril mystique, comme suit : « Notre avenir est entre Vos mains ! ». N’en soyez pas sceptiques, vous qui avez daigné partager avec Cheaayeb Lekhdim ce modeste papier cancre en boule-éthique, qui sera valorisé comme emballage par les épiciers et les boutiques (renseignez-vous auprès des critiques)… ! « Je ne m’innocente cependant pas, car l’âme est très incitatrice au mal, à moins que mon Seigneur, par miséricorde, (ne la préserve du péché). Mon Seigneur est certes Pardonneur et très Miséricordieux »4.

Monsieur le Président,

Me déplumant d’une quelconque vanité, sans aucune utilité - n’a-t-on pas atteint, après plus d’un demi-siècle, l’âge de maturité !? -, j’ose penser, plus par simplicité, avoir compris cette explicite vérité - et pour ça, on doit, en Samouraï, obéissance et respect à votre honorable autorité ! - : Vous allez incarner la 3° République ! C’est tout à votre Honneur !, tout comme l’ont été vos prédécesseurs de la 1° et 2° République. L’Emir Abdel Kader, qui demeure pour l’Etat algérien son premier fondateur et Ferhat Abbes, le 1° Chef d’Etat de Nedjma arrachée des mains des civilisateurs…Pour votre bonheur, en vous choisissant comme Eclaireur, nous nous refusons, nous les pécheurs, d’être forcés, dos au mur, à exposer, en pleurs, notre malheur, en implorant le Créateur « Seigneur, nous avons obéi à nos chefs et à nos grands. C’est donc eux qui nous ont égarés du Sentier »6. N’y a-t-il pas là, plus d’un message révélateur…Soyez-donc noter riche Laboureur et faites-nous apprécier le travail et ses inestimables valeurs. Chemin faisant, pourquoi ne pas bannir ces prédateurs-conteurs qui ne cessent de nous abêtir par les mille et une histoires de Khalifa-Baba et les 40 voleurs !

Face à cette croisée des chemins, et ayant les rênes, de notre destinée entre vos mains, en scrutant, avec nos Aïnis et nos gamins, les lueurs de notre Algérie de demain5, sommes-nous en droit de rêver - loin de nous un quelconque dubitatif examen - du paradis égaré et ses jasmins, qui fut diaboliquement convoité tant par les Français que les Romains… !?

Aurions-nous la chance, sous votre présidence, d’être nourris contre la faim et rassurés des craintes qui s’enchainent, deux inestimables aubaines dont nos frères irakiens et syriens, qui saignent sous les maillons de la chaîne de la haine, en ont découvert la richesse vitale, tout en déboisant jusqu’à leur nature humaine… ! Car ils ont perdu cette sagesse simple et saine « La vie est un mystère qu’il faut vivre et non un problème à résoudre »7

Serons-nous soumis, par votre autorité impartiale - tant dissuasive que répressive - à un discours martial, joignant parallèlement l’acte à la parole impériale, prêchant le bien et empêchant le mal, sur le terrain et non dans le confort des somptueuses salles « Ô mon peuple, faites équitablement pleine mesure et plein poids, ne dépréciez pas aux gens leurs valeurs et ne semez pas la corruption sur terre. »8

 

Revivrons-nous les folles-sages années non-voilées durant lesquelles notre polygone étoilé - Chaire de Saint Augustin et Minbar de Sidi Okba - fut la Mecque des Che Guevara et Madiba tout comme le Madison Square Garden animée par Marcel khalifa et Miriam Makeba …!? La Numidie de Masinissa et l’Algérie de Fatma N’Soumer est-elle devenue stérile pour ré-enfanter de nouveaux Vingt-deux jeunes vertuistes dits « aventuristes !» et réinventer pour nos horizons de rassurantes pistes…écaillées des vampires opportunistes qui éclosent, après atterrissage forcé, comme tête de listes !?

La réforme ! Voilà un mot magique voire utopique qui ronge les programmes politiques, dérange la plèbe amnésique et arrange les seigneurs-saigneurs cycliques…L’Auteur « Du Contrat Social » n’a-t-il pas mis en garde contre l’impossibilité d’une Réforme ludique, dangereusement tragique…« Rien n'est plus dangereux que l'influence des intérêts privés dans les affaires publiques, et l'abus des lois par le gouvernement est un mal moindre que la corruption du législateur, suite infaillible des vues particulières. Alors, l'État étant altéré dans sa substance, toute réforme devient impossible. »9. Allons-nous finir avec la Quête de Sisyphe, cette fuite labyrinthique, pour ne plus devoir scruter l’apparition des « généreux » Salihines mythiques de Kaki10 le visionnaire métaphorique…

 

Monsieur le Président,

Inébranlablement sages et convaincus de la nécessité de tourner la page, pour pouvoir feuilleter sereinement les paragraphes restants de notre légendaire Histoire, et prêts à affronter, sous votre gouvernail, les pires tsunamis - c’est notre Devoir ! - Nous ne pouvons croire que vous ne sentiez, comme arrière gout, toute l’amertume et tout le déboire des milles évènements tristes, tragiques et fâcheux, une grande tache noire dans le crédit de nos avoirs…

 

Nous nous souvenons, comme si cela datait d’hier, des éradicateurs « intangibles » ou réconciliateurs irascibles, qui eurent l’aubaine d’être cloitrés dans des bureaux invisibles et couvés par des body-gardes invincibles, ne sont-ils pas, désormais, comptables de leurs actes irréversibles devant une justice d’outre-tombe irrémissible avec des sentences assourdissantes quoiqu’inaudibles…Ceux, aussi, qui ont construit des châteaux avec les containers des bateaux - une fausse image digne des mirages ! - Et tout l’argent sale qu’ils avaient entassé dans leur malles tout comme l’acquisition des terres dont ils répondront une fois sous terre…En agonisant sur leurs lits défrichés, n’ont-ils pas regretté leurs péchés !? Même leurs plus proches avec lesquels ils avaient longtemps triché ne pouvaient les pleurer tant leurs yeux étaient taries et desséchées !

Néanmoins, en ayant épousé l’incontournable et clairvoyante sagesse caractérisant la réconciliation nationale, car persuadés « qu’il nous faut apprendre à vivre ensemble comme des frères, sinon nous allons mourir ensemble comme des idiots. »11, nous osons espérer que vous ne ménageriez aucun effort pour nous réapprendre à vivre et à nous aimer en nous purifiant de tous nos torts…Et que ceux qui travaillent et prennent de la peine, sans prétendre à un éphémère trésor en or, ne soient pas récompensés par l’ingratitude d’une vie de lancinants remords et offensés par une fausse réhabilitation après leur mort… « De son vivant, il avait besoin d'un raisin, une fois mort on lui accorda toute une grappe »12

 

 

En bref, sachant que vos conseillers et vos entourages - nous espérons qu’ils ne feront pas barrage à nos élites armés de bagages ! - ont la charge de vous embellir l’image de nos mirages, il ne peut vous échapper ce vieil adage, qui revient en première page « Ô toi qui est embelli de l’extérieur, qu’en est-il de ton intérieur !? », nous nous obstinons à croire qu’étant le principal personnage de notre long métrage, loin d’un inutile verbiage, qui n’est que radotage, vous balayerez avec une main de fer, en l’abordant terre-à-terre, la crise des scènes de ménage que connaissent, à Ghardaïa, nos frères…avant qu’elle ne soit gérée en outre-mer !!! « Un dirigeant s’efforce perpétuellement d’apaiser les tensions, surtout quand il a affaire à des problèmes sensibles et complexes »13

Enfin, il est plus qu’urgent voire primordial, de porter secours à notre système scolaire qui râle sous son mal ! Le constat puisé des cours de récréation et des salles suggère le paysage d’un désordre digne des carnavals…Hier encore, nos bonnes vieilles écoles, étaient de rassurantes alvéoles pour nos abeilles qui dansaient en survol ! Et pour qu’un projet de cette envergure soit un aigle de bon augure, il est plus que fondamental d’accompagner les Aïnis épuisées, dos au mur, par une vie très dure, pour élever voire éduquer leur Omar et Aicha jusqu’à ce qu’ils soient mûrs… ! « La mère est une école : la préparer, C’est préparer un peuple aux nobles origines ! »14

 

Monsieur le Président,

Pour conclure, quoi de plus rassurant et plein d’espoir que de vous rappeler que vos concitoyens, qui vous ont honoré en vous mandatant leur Premier Magistrat, nés sous les drapeaux de l’Algérie libre et indépendante, ont plus d’un demi siècle de vie…Une longue marche à même d’affronter la Grande Muraille de Mao Zedong, ne trouvez-vous pas !? « Ce n’est pas, d’ailleurs, que je désespère le moins du monde du triomphe. Je le répète avec une certitude plus véhémente : la vérité est en marche et rien ne l’arrêtera. »15

« Vivement Notre 3° République, Gloire à nos Chouhadas »

 

Je vous prie de bien vouloir agréer, Monsieur le Président, l'expression de mon profond respect.

 

 

*Universitaire

Notes :

1- Coran, S 11, V 88

2- Coran, S 33, V 72

3- Syntaxe de LUCIEN TESNIERE

4- Coran, S 12, V 5

5- Le 18 Avril 2014

6- Coran, S 33, V 67

7- Mahatma Ghandi

8- Coran, S 11, V 85

9- Jean jacques Rousseau (1712-1778)

10- Ould Abderrahmane Kaki, « Guerrab Wa Salihines »

11- Martin Luther King (1929-1968)

12- Proverbe du terroir

13- Nelson Mandela (1918-2013)

14- Hafed Ibrahim, Poète égyptien (1872-1932)

15- Emile Zola, « J’accuse », l’Aurore, 1898