Guest Mahboub Posted May 2, 2014 Partager Posted May 2, 2014 Par Mohammed Berrahou et Jamal Amiar- Medias24. Deux femmes et deux hommes, quatre histoires: le football, la communication, la culture, l'expertise comptable. Voici les portraits de quatre Algériens du Maroc, qui rêvent d'un Maghreb uni et ne voient aucune différence entre les deux peuples. Arrivé au Maroc en 1997 avec un visa valable un mois, Karim Benchoubane, 48 ans, expert-comptable de formation, passera les semaines suivantes à faire les démarches nécessaires à l’obtention de sa carte de séjour. L’année suivante, en 1998, il épousera sa femme marocaine, connue à Alger en 1993 dans le cabinet d’expertise-comptable où ils travaillaient tous les deux. Avant cela, Karim était rentré à Alger en 1991 après des études supérieures en Belgique et avait démarré un cycle de formation d’expertise-comptable en 1992. Tout en étudiant, il enchaîne les missions au sein d’un groupement de cabinet algérois, le GIREC, à la Sonatrach, dans des banques ou dans le BTP. Mais à Alger, l’armée et les islamistes s’affrontent, et on n’échappe pas au service militaire. >Service militaire et études supérieures C’est en 1994, qu’est venu pour lui le temps du service militaire d’une durée de 24 mois dans la marine algérienne, notamment basé près d’Oran, à la base de Mers El Kébir. C’est l’époque de la guerre civile algérienne qui avait démarré au lendemain de l’annulation du second tour des élections législatives en janvier 1991, rappelle Karim qui se souvient qu’entre sa présence dans l’armée et la guerre civile, «ma mère pleurait tous les soirs». La guerre civile des années 1990 en Algérie fera près de 200.000 morts, elle est jalonnée de dizaines d’attentats. Durant cette période d’état d’urgence, le service militaire durait 24 mois au lieu de 18 mois auparavant. C’est durant ces années, en 1993, que Karim fait la connaissance de celle qui sera sa future épouse avant de terminer sa formation en 1996. Karim sera le plus jeune des diplômés experts comptables à l’Université d’Alger. Il se souvient avec gratitude de son supérieur hiérarchique à l’armée, «un énarque, souligne-t-il, qui m’encourageait à poursuivre mes études supérieures tout en effectuant mon service militaire». Entretemps, la guerre civile faisant rage et dès 1995 il incitera vivement sa future épouse à quitter l’Algérie et à rentrer à Tanger, avant de la rejoindre en 1997. >Découverte du Maroc De ses années en Algérie, avant de partir étudier en Belgique et après son retour en 1991, Karim garde le souvenir d’une proximité culturelle avec le Maroc. «Jeune, je découvrais le Maroc à travers les magazines que mon père ramenait de ses voyages à l’étranger». «Adolescent et même plus tard, poursuit Karim, j’aimais écouter la radio marocaine, découvrir une programmation musicale variée et la musique andalouse que j’aime beaucoup ; je viens d’une famille de musiciens », précise-t-il.«Mon père jouait du piano, mon grand-père de la mandoline, et moi de l’harmonica». Pour Karim, «s’il n’y a pas eu de déclic automatique et instantané pour le Maroc, c’est quelque chose qui est venu progressivement». Jeune tout d’abord, il réalise qu’en Algérie, «il y avait tout et rien en même temps». «Il y a la paix et la quiétude, insiste Karim, mais rien du point de vue des produits de consommation et des loisirs. Heureusement que mon père voyageait souvent en Europe ». Mais durant la deuxième moitié des années 80, Karim va être témoin «des sanglantes émeutes d’octobre 1988 à Alger et en Kabylie et ses centaines de morts», et avant cela, «le choc de la baisse des prix pétroliers en 1985-86 qui accentuèrent les tensions sociales dans le pays». Citer Link to post Share on other sites
Guest Mahboub Posted May 2, 2014 Partager Posted May 2, 2014 Karim se rappelle avec amertume de ces années. «A la fin des années 80, raconte-t-il, j’ai assisté à des bagarres à l’intérieur des mosquées pour des questions de dogmatisme religieux». Les magazines, les informations sur le Maghreb sur Médi 1, la musique andalouse et un désir de quiétude feront le reste jusqu’à sa rencontre amoureuse. «J’avais l’image d’un pays touristique, différent, plaisant» souligne-t-il. Séduit par le Maroc, tombé amoureux d’une Marocaine et usé par la guerre civile alors que lui-même était incorporé entre 1994 et 1996, Karim, dès la fin de son service militaire pense à aller rejoindre sa belle et s’installer au Maroc, ce qu’il fera en 1997. En juillet, il envoie son cv au cabinet d’expertise comptable de Tanger où sa femme travaillait. La réponse sera immédiate et positive. Il commencera à y travailler dès septembre 97 en tant que salarié avant d’en devenir associé en 2000. >"Etre Algérien ou Marocain, c’est la même chose» Entretemps, en 1998, Karim se marie à Tanger, apprend à découvrir le Maroc, sa belle-famille et les Marocains qu’il trouve «sympas et faciles à vivre». Il est enthousiaste et heureux, et réalise qu’ «être Algérien ou Marocain, c’est la même chose ». «Nous sommes Maghrébins, souligne-t-il, car nous avons la même langue, les mêmes traditions, la même religion». Ces sentiments n’empêchent pas Karim d’être «à chaque fois personnellement affecté par les tensions politiques récurrentes entre le Maroc et l’Algérie». «On perd du temps alors que le temps ne pardonne pas,» assène-t-il. «J’ai toujours eu l’impression qu’il y avait deux forts courants politiques opposés au sein du système algérien. On dit que ça va s’apaiser, et tout de suite après un incident vient saboter les minces espoirs de réconciliation et de rapprochement entre le Maroc et l’Algérie,» déplore-t-il. Karim trouve absurde qu’Alger «ne veuille pas l’ouverture des frontières car cela enclave les deux pays», rappelant les 20 ans de fermeture des frontières terrestres cette année, la mondialisation économique qui fait son chemin sans que les pays maghrébins n’y prennent pleinement part. «Cela crée des déséquilibres, constate-t-il ; l’Union du Maghreb arabe est quelque chose de nécessaire». >"Ici, les gens sont pour le dépassement de cette situation de blocage" Alors difficile d’être Algérien au Maroc? «Franchement, non», répond Karim qui souligne que «tant de la part des Marocains que des autorités, il n’y a jamais eu de difficultés». «Les gens ici sont pour le dépassement de cette situation de blocage,» juge-t-il. Malgré cela, il manque deux «petites» choses pour parfaire le bonheur marocain de Karim Benchoubane né à Alger un jour de l’année 1965. «Obtenir une réponse à ma demande nationalité déposée en … 2007 et être officiellement inscrit au tableau des experts comptables car cela est dommage pour moi et pour le Maroc parce que je contribue à l’économie avec mon expertise et mon savoir». «Mes enfants sont Marocains et Algériens; j’aime Tanger, une ville belle et qui a de l’avenir. Je suis convaincu que le plan Tanger-Métropole par exemple constitue l’un des instruments des futurs succès de ma ville. L’avenir de Tanger est aussi le mien et celui de ma famille», plaide-t-il. « Parfois je rêve à un jumelage entre Alger ma ville de naissance et Tanger, la ville natale de mon épouse et de mes enfants». Alors que les Algériens ont voté le 17 avril dans le cadre d’élections présidentielles, Karim pense que «les Algériens sont très inquiets de l'avenir de leur pays et croient profondément que seule une vraie démocratie peut faire évoluer les choses». Il est aussi inquiet car il pense que la situation économique du pays qui dépend quasi-exclusivement du pétrole peut basculer comme ce fut le cas lors des chocs pétroliers antérieurs, et ce, malgré un matelas en devises très confortable. Il pense «qu'iI faut un changement et une alternative politique dans la paix». Peut-on souhaiter autre chose à l’Algérie voisine avec laquelle des milliers de familles marocaines partagent tant de liens anciens et plus récents? Peut-on souhaiter autre chose à un pays voisin dont nous sommes si proches culturellement et humainement? Peut-on souhaiter autre chose lorsque 20 ans de fermeture de frontières font perdre deux points de PIB à chacun des deux pays, sachant que chaque point de PIB représente entre 30.000 et 50.000 emplois de plus créés chaque année dans chacun des pays? Karim, au terme de notre entretien, espère «de meilleures relations entre le Maroc et l’Algérie et beaucoup de bonne volonté de part et d’autre». Banal, direz-vous ? Pas tant que ça au vu du gâchis et des opportunités ratées entre le Maroc et l’Algérie depuis au moins 20 ans. «Lorsque j’ai pris l’avion à Alger en 1997 pour venir ici j’ai pleuré», indique Karim. « Quand je fais un Casablanca-Tunis et que l’avion survole l’Algérie, des émotions remontent» confesse-t-il. «On ne tourne pas facilement la page sur 30 ans de vie algéroise». Mais l’amour, le Maroc et la guerre civile ont forcé le destin du plus jeune des diplômés experts comptables de l’Université d’Alger de 1996. «In fine, souligne Karim, on est des Maghrébins. Moi, je suis bien ici, je suis attaché au Maroc ». Citer Link to post Share on other sites
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